Sénégal-CREI : Karim Wade scotché à Rebeuss


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La stratégie du pourrissement comme système de communication se heurte à l’accélération que la Cour veut imposer à un procès qui s’enlise et tourne à l’eau de boudin. Les motifs de heurts ne pouvaient dès lors manquer dans le procès de Karim MeÏssa Wade. Le dernier, avec l’expulsion musclée d’un avocat, est une première.

Les heurts sans faim

La condamnation implicite de l’expulsion musclée de Me El Hadj Amadou Sall par le Garde des Sceaux, le 15 janvier, est le dernier signe manifeste d’un geste historique posé dans les annales de la Justice au Sénégal. « C’est la première fois, dit Me Sidiki Kaba, que j’entends un tel incident », phrase ambiguë à souhait, pouvant aussi bien renvoyer aux annales qu’à l’actualité. Certes, les incidents font le charme du prétoire, tout comme les effets de manche : tous les grands procès en ont eu leur dose ; au Sénégal cependant, ils ont connu un coup d’accélération le 14 janvier avec l’expulsion « manu militari » d’un conseil du prévenu Karim Meïssa Wade, Me El Hadji Amadou Sall, lui-même, comble d’ironie, ancien ministre de la Justice. La solidarité de ses confrères de la Défense qui ont enlevé leur robe et quitté la salle et la manière heurtée dont le prévenu a été rappelé devant la barre sur ordre du président ont ajouté à une journée historique dans les annales de la Justice au Sénégal.

Les conséquences en étaient encore visibles le lendemain jeudi : la Cour s’installe sans les prévenus, appelle un absent, se rend compte de l’incongruité de la situation, suspend la séance, le temps que le box soit occupé, pour réapparaître. Le vide avec l’absence des avocats de la Défense ajoutera à un comique d’une situation déjà assez étriquée.

Le président Henri Grégoire Diop qui voulait imposer une accélération à un procès qui traîne en longueur en augmentant le temps de présence en Cour s’est rendu compte du dilatoire de la défense qui voulait faire traîner les choses en étirant un temps sans…faim. Il semble en effet que les populations se lassent de plus en plus d’un procès qui n’avance pas et qui est le cadet de leurs soucis, elles tenaillées par d’autres préoccupations. La force des prévenus et de leurs conseils consistera donc à accentuer ce malaise en prenant tout le temps nécessaire, en étirant les heures et les …heurts. La stratégie de communication de la défense de Karim Meïssa Wade était alors toute tracée : faire durer le procès le plus longtemps possible. À ce jeu, Me Sall de la Défense était imbattable, au point d’irriter le président Henri Grégoire Diop qui s’impatientait, perçu d’ailleurs comme un supplétif du collège de la partie civile, ce qui ajoutait à la tension ambiante.

Cette forme de communication a porté ses fruits puisque le pouvoir semble avoir percé le mystère et décidé de réagir, au point de brusquer les choses. De manière musclée, avec un prévenu ajoutant d’autres chapitres à sa communication, comme la claudication, comme si la Justice était bancale, et la grève de la faim, avec le buzz qu’on connaît depuis jeudi.

Pathé Mbodje, journaliste, sociologue

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