Sénégal : après des propos « agressifs », un imam recadré par l’Eglise et convoqué par la gendarmerie


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Serigne Lamine Sall
Serigne Lamine Sall

Après avoir tenu des propos peu amènes à l’égard des catholiques, l’imam Serigne Lamine Sall subit les critiques les plus sévères de la part de la communauté catholique sénégalaise. Par ailleurs, il a été convoqué par la Section Recherches de la gendarmerie nationale.

Les catholiques du Sénégal sont mécontents de l’imam Serigne Lamine Sall. Et pour cause ! Invité sur une émission de la chaîne locale Walf TV, jeudi dernier, le religieux a tenu des propos acerbes à l’égard de la communauté catholique. Pour lui, les catholiques sont « condamnés de la même manière » que les francs-maçons et les juifs dans l’islam. Serigne Lamine Sall ne reconnaît que deux religions : « l’islam et les mécréants ». Ce qui revient à dire que le catholicisme n’est même pas une religion.

Suffisant pour que les récriminations fusent, ce mardi, de toutes parts au sein des catholiques. Parmi les personnes qui se sont exprimées figure l’abbé Alphonse Birame Ndour, vicaire épiscopal de l’Église catholique du Sénégal, chargé du dialogue interreligieux. « Ce que nous attendons n’est pas compliqué : il y a un adage qui dit à offense publique, réparation publique. Nous souhaitons que l’imam revienne dans l’émission où il a parlé et qu’il présente ses excuses », a laissé entendre le prêtre.

Se positionnant sur la même longueur d’onde que ce dernier, Philippe Abraham Birane Tine, président du Conseil national du Laïcat trouve que ces propos sont « inadmissibles et ne peuvent être justifiés que par le mépris, l’indécence et l’ignorance ». L’abbé Alphonse Birame Ndour va plus loin en proposant une auto-saisine du parquet dans des situations comme celle-ci où il y a « flagrant délit et que la cohésion nationale peut être menacée ».

Là encore, l’avis de Philippe Abraham Birane Tine rejoint l’opinion du prêtre. Pour lui, les propos « discriminatoires, outrageants, agressifs » de l’imam « confortent notre certitude que les fondements de notre nation sont en danger ». C’est pourquoi il lance un appel au Président Macky Sall qu’il invite à mettre « tout en œuvre pour que, désormais, les coupables de telles forfaitures soient repérés et sanctionnés ».

Même dans la communauté musulmane, les propos de l’imam ont été condamnés. Pour Mame Mactar Guèye, vice-président de Jamra, une ONG islamique, « l’imam Serigne Lamine Sall aurait pu se passer de ces propos malheureux à l’égard de la communauté chrétienne. C’est (une) parole de trop ». Dans un pays majoritairement musulman – les musulmans représentent 95 % de la population sénégalaise –, mais réputé pour sa grande tolérance, les propos de l’imam vont, en effet, à contre-courant des habitudes.

Ce qui lui a d’ailleurs valu une convocation à la Section Recherches de la Gendarmerie nationale. L’imam pourrait passer les pires moments de son existence, avec des poursuites judiciaires auxquelles pourraient s’adjoindre une exclusion sociale, après avoir osé tenir de tels propos dans un pays comme le Sénégal. Quant à la télévision qui lui a servi de relais pour tenir de tels propos, elle a reçu une mise en demeure de la part de l’autorité de régulation de l’audiovisuel, « suite à des manquements graves  notés dans l’émission ».

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Par Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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