« Je suis venu vous proposer, jeunes d’Afrique, non de ressasser ensemble le passé mais d’en tirer ensemble les leçons et de regarder ensemble vers l’avenir » Nicolas Sarkozy. C’est cette phrase que je retiens du discours du président français. Il a cru bon de parler à la jeunesse africaine en évoquant le passé et en l’invitant ainsi à ne pas vouloir toujours émigrer. M. Sarkozy s’est trompé à mon humble mon avis.
par Sandy Katluaza (« étudiante africaine en France »),
Notre jeunesse ne regarde pas le passé colonial de la France. Pour la plupart des personnes de ma génération nées dans les années 75-80, ce n’est pas cette France là que nous décrions. Nos parents ne nous racontaient même pas cette période. Les seules fois où j’ai entendu parler un tantinet de cette histoire de « colons », ou « Blancs », venus en Afrique, c’est par mon grand-père. Et il faut voir la fierté avec laquelle il raconte comment il a serré la main du « général » De Gaulle et comment il était cheminot de l’empire français. A vrai dire, cela ne m’intéressait pas moi.
D’ailleurs ça m’écoeurait de devoir entendre que mon grand père était sous la direction des Blancs qui n’avaient aucune considération pour lui. Mon grand père fait partie de ces vieux Africains instruits. Il est allé à l’école coloniale, a eu son CEP et a ainsi intégré la société des chemins de fer congolais, dirigée par des Français. Puis ils sont partis. Combien il regrette. Et moi de lui dire : « toi, tu ne serais jamais chef dans leur pays papi. Alors arrête avec ces vieux démons ».
J’écoutais mon grand père avec désinvolture, pas comme lorsque je lisais un livre d’histoire (que j’ai toujours trouvé intéressants). Cette histoire qu’il me racontait ne me plaisait pas car je la trouvais inhumaine, sans but ni bénéfices pour nous. Ce qui fait que je m’en détachais parce que je voyais les mêmes choses se répéter en réalité. Ma mère travaillait avec des Français, qui se permettaient de venir enfumer notre maison sans aucune retenue. Elle se sentait obligée de mettre des cendriers et me confinait dans un coin parce que j’avais un problème de respiration. Je n’ai aucune haine. Je ne me sens aucunement concernée pour ce qui est de défendre une soit disant « bonne cause de mémoire » qui voudrait faire porter tous nos malheurs à la France. Je pousse un coup de gueule contre toutes ces politiques françaises qui, jusque là, ont et continueront toujours de narguer l’Afrique.
La France qui nous sidère n’est pas celle des années 1940-60
La France qui nous sidère n’est pas celle des années 1940-60. Nous ne la connaissons pas et d’ailleurs les manuels d’histoire à ce sujet chantent pratiquement la gloire de ce pays. Celle que nous décrions est celle des Mitterrand, Chirac et bientôt Sarkozy, avec leurs pratiques malsaines qui portent une responsabilité dans bon nombre de guerres civiles en Afrique, comme au Congo-Brazzaville. Même s’il existe aussi des problèmes ethniques en Afrique. Sarkozy est finalement bien venu voir le président du Gabon. Pensez-vous qu’ils ont discuté de leurs nouvelles talonnettes à la mode ?
Soit M. Sarkozy réalise la rupture qu’il prône, soit il reste dans la continuité de cette attitude que nous connaissons déjà de cette France que nous trouvons arrogante et qui traite avec les dirigeants africains corrompus. Cette France qui pense toujours qu’elle a des leçons à donner à l’Afrique. Je pense que la France doit voir d’abord sa relation avec l’Afrique comme un vrai partenariat et non plus comme une zone où l’on va puiser les ressources pour venir doper les résultats du CAC 40.
La France charme de moins en moins les étudiants Africains qui ont une réelle ambition
Le partage que Nicolas Sarkozy propose à l’Afrique c’est : « si vous acceptez ceci… alors la France va faire cela ». Balivernes M. le président. Car la France traite avec les « durs présidents africains » et non avec son peuple. L’Afrique a toujours été dans une relation paternaliste avec la France, qui la maintenait dans un rapport de dominant et dominé. Alors vous ne proposez rien de nouveau. Et votre discours était sans intérêt pour l’Afrique.
Investissez dans des projets de développement économique en Afrique, pas seulement dans des Centres culturels français, seule manifestation de l’aide française dont je me souviens. Cela peut se traduire par l’embauche de jeunes dans ces nombreuses sociétés françaises présentes en Afrique. Confiez leur un vrai rôle social dans la formation des jeunes qu’ils emploient. Et évitez de les cantonner dans des rôles de « serviteurs » dans leur pays. Donnez leur des responsabilités car dans ces pays, tous les jeunes n’aspirent pas à venir en France. Elle charme de moins en moins les jeunes étudiants Africains qui ont une réelle ambition.