Le 6 avril dernier, j’étais comme nombre de parlementaires, de responsables associatifs et politiques au Panthéon pour l’hommage rendu par la nation à Aimé Césaire.
Il est certain qu’entendre résonner sous cette vaste coupole la force des vers de Césaire était un moment très fort. Quand on pense que le Cahier du retour au Pays Natal a été écrit par un jeune homme d’à peu près 26 ans qui sans doute devait s’interroger sur son choix de rentrer vers cette petite ville des tropiques au lieu de tenter de réussir en Europe, la profondeur et la rectitude du choix, l’élévation de la pensée et la beauté de la langue impressionnent.
J’ai écouté avec attention le discours du Président de la République et tout ce qu’il a retenu de la vie et de l’œuvre d’Aimé Césaire qu’il a sans doute rappelé avec pertinence. Certes le propos était bienvenu et j’ai apprécié ce qui a été affirmé par lui comme conception de la République, de sa diversité, de l’importance du respect des identités particulières dans l’ensemble français.
Je déplore toutefois que cet hommage intervienne alors que les responsables de la droite, et même ceux qui se pressaient nombreux hier, aient ignoré superbement Césaire ou l’ont combattu quand il était élu de la nation. Quand François Mitterrand s’est rendu à l’Hôtel de Ville de Fort de France il était quasiment un des premiers responsables politiques français à effectuer cette visite. Il n’y a jamais eu la moindre ambigüité dans le parcours de celui ci, il est resté un homme de gauche jusqu’au bout, soutien de François Mitterrand, de Lionel Jospin et de Ségolène Royal. Il a refusé durant des mois de recevoir Nicolas Sarkozy à cause du discours de Toulon sur la colonisation et a cédé par lassitude, vu son âge.
Si on considère par ailleurs, non les propos tenus à cette occasion par le Président, mais sa politique, ceux de Claude Guéant, assis à côté de lui, force est de ressentir un fort malaise car ce qui est exprimé, prôné et mis en œuvre aujourd’hui est contraire à tout ce que Césaire a défendu toute sa vie. Césaire était un homme bon, qui aimait le petit peuple, qui défendait les opprimés, les colonisés, les obscurs, tous ceux que la politique menée par ce président méprise ou écrase.
Maintenant que Nicolas Sarkozy a fait entrer au Panthéon le chantre de la négritude, souhaitons qu’il le lise, qu’il s’en imprègne et qu’il essaie en changeant ses orientations de se montrer plus digne de la pensée de Césaire.
Par George Pau-Langevin