Sahara occidental : la CJUE confirme le droit exclusif du peuple sahraoui à décider de son avenir


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Enfants Sahara occidental
Enfants Sahara occidental

La France et l’Espagne échouent à faire modifier l’interprétation démographique de la Cour européenne, qui réaffirme que seul le peuple sahraoui, majoritairement déplacé, peut décider du sort du territoire.

Face aux revendications d’autodétermination du peuple sahraoui et aux mutations profondes du continent africain, la France peine à redéfinir sa position diplomatique. Entre décisions de justice européennes défavorables et tensions avec l’Algérie, Paris doit repenser son approche des relations franco-africaines, comme le soulignent experts et observateurs internationaux.

La France peine à maintenir son influence en Afrique, comme en témoignent les récentes tensions diplomatiques et décisions juridiques européennes. L’historien Benjamin Stora, spécialiste des relations franco-algériennes, pointe du doigt dans une interview à El Massa les difficultés de Paris à s’adapter aux nouvelles réalités du continent, alors que la question du Sahara occidental cristallise les tensions.

Un revers juridique qui fragilise la position française

La position française sur le Sahara occidental vient de subir un nouveau revers significatif avec une récente décision de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). En effet, la CJUE a rejeté une tentative de la Commission européenne, soutenue par la France et l’Espagne, de modifier la notion d’interprétation démographique du territoire. Ainsi, en cohérence avec ses deux arrêts d’octobre 2024, la Cour maintient fermement sa position selon laquelle ‘le droit à l’autodétermination appartient au peuple concerné, et non pas à la population de ce territoire en général’. C’est-à-dire au peuple Sahraoui, où qu’il se trouve, et non pas aux populations occupant le territoire du Sahara occidental, qui aujourd’hui sont majoritairement des colons marocains, déclare la CJUE.

Cette décision a des implications majeures pour les accords commerciaux et de pêche entre l’UE et le Maroc. En effet, la CJUE a conclu le 4 octobre 2024 que ces accords « sont inapplicables au Sahara Occidental, car le peuple du territoire n’y a pas consenti« . Pour Sara Eyckmans de WSRW, la tentative de la Commission européenne de « déformer la démographie du Sahara Occidental est un acte flagrant de manipulation, destiné à saper les décisions claires de la Cour« .

Une nécessaire réinvention des relations franco-africaines

Cette situation s’inscrit dans un contexte plus large de remise en question de l’influence française en Afrique. Benjamin Stora dans son interview observe que « la France officielle a trop tardé à voir et à comprendre ce qu’est devenue la nouvelle Afrique aujourd’hui dans le contexte de l’établissement de sa souveraineté politique« . Les relations avec l’Algérie sont particulièrement affectées par ce dossier. « Le début de l’impasse dans les relations algéro-françaises est dû à la question du Sahara occidental et à ce qu’on appelle le plan marocain d’autonomie du Sahara occidental« , explique l’historien.

Le spécialiste préconise un « retour à la légitimité internationale et au droit international approuvé par les Nations Unies« . C’est à dire un référendum d’autodétermination concernant uniquement le peuple Sahraoui. Cette approche apparaît d’autant plus nécessaire précise-t-il que « la dépendance de certains pays africains à l’égard de la France a suscité de nombreuses interrogations chez les nouvelles générations d’Africains qui rejettent cette dépendance« .

Face à ces défis multiples, Stora estime que « la France n’a d’autre choix que de chercher un autre type d’influence sur le continent, et elle n’a d’autre choix que d’être la porte d’entrée culturelle et économique de l’Afrique« . Cette réinvention des relations franco-africaines apparaît comme une nécessité urgente, alors que les décisions juridiques européennes et les aspirations des peuples à l’autodétermination redessinent le paysage diplomatique du continent.

La récente ordonnance de la CJUE, en réaffirmant que « la majorité du peuple sahraoui ne vit pas aujourd’hui sur le territoire, ayant été déplacé« , souligne l’importance d’une approche respectueuse du droit international et des aspirations des peuples à disposer d’eux-mêmes. Un principe que la France doit désormais intégrer dans sa nouvelle politique africaine.

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