Le mandat de la Minurso expirant officiellement le 31 octobre prochain, le Conseil de sécurité de l’Onu devra à nouveau plancher sur la question du Sahara Occidental. La tendance, ces derniers jours, des organes de l’institution onusienne (commission des droits de l’homme et commission de décolonisation) à réaffirmer le principe de l’autodétermination des Sahraouis a constitué une sérieuse alerte pour Rabat.
Le Maroc ne désespère pas de faire passer son projet de substitution encore non clarifié d’autonomie pour le Sahara, rejeté par le Front Polisario, mais la partie paraît très difficile, voire impossible. Hier, selon un communiqué de l’Elysée, le ministre marocain des Affaires étrangères, Mohamed Benaïssa, a été reçu par le président français Jacques Chirac et lui a présenté les « idées marocaines sur le Sahara Occidental ». Le projet marocain est censé constituer une alternative à la mise en oeuvre du référendum d’autodétermination prévu par l’Onu mais il ne recueille pas l’assentiment de la communauté internationale. Or, c’est bien cette sortie de l’option référendaire que le Maroc ne parvient pas à obtenir malgré le soutien de Paris et de Madrid.
La France semble choisir la prudence
Il faut rappeler en effet que la dernière résolution du Conseil de sécurité adoptée le 28 avril 2006 réaffirmait que l’objectif était de parvenir « à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara Occidental dans le cadre d’arrangements conformes aux buts et principes énoncés dans la Charte des Nations unies ». Il est totalement improbable que les « idées marocaines » puissent être entérinées par le Conseil de sécurité. Paris qui soutient ouvertement les positions marocaines sur le Sahara Occidental et s’est retrouvée de ce fait dans l’incapacité de jouer un rôle politique sur ce dossier, semble choisir la prudence. Selon le communiqué de l’Elysée, le président Jacques Chirac a rappelé au ministre marocain que la France « appuie une solution politique mutuellement acceptable dans le cadre des Nations unies ».
Le Polisario qui a toujours considéré Paris et accessoirement Madrid comme des acteurs qui ont entravé la mise en oeuvre des résolutions de l’Onu ne sera pas surpris que le président français ne mentionne pas le mot « autodétermination ».
On retrouve aussi la classique formule de solution « mutuellement acceptable » qui dans le cas d’espèce ne sert à rien d’autre qu’à entretenir le statu quo. Dans la dernière résolution du Conseil de sécurité sur le Sahara Occidental, le représentant français à l’Onu avait surtout salué le renouvellement du mandat de la Minurso qu’il avait qualifié de « bonne décision puisque la mission des Nations unies continue de jouer un rôle utile et stabilisateur ». Dans la foulée, il estimait que l’annonce de propositions marocaines constituait un « développement important et encourageant ». Le soutien de Paris ne fait donc pas défaut à Rabat même si dans le communiqué on ne trouve aucune appréciation sur les « idées marocaines ».
Ne pas sortir du cadre de l’ONU
Le président français paraît mesurer la difficulté à faire admettre ces « idées » aux autres membres du Conseil de sécurité. Paris qui a protégé Rabat de la mise en oeuvre du Plan Baker en arguant qu’aucune « solution ne doit être imposée » à l’une des parties, sait que le Polisario ne se laissera pas non plus imposer les « idées marocaines ». A plus forte raison quand ce qui est proposé est aux antipodes de l’ensemble du travail accompli au sein des Nations unies.
Dans la réponse de Jacques Chirac, l’autodétermination n’est pas de mise mais on perçoit néanmoins une très forte insistance à ne pas sortir du cadre de l’Onu, option qui avait été caressée par Rabat. Et aussi par certains Etats et fonctionnaires onusiens qui, agacés par la persistance d’une impasse de plus de 30 ans, ont suggéré également que l’Onu se dessaisisse du problème. La France qui n’est pas en position d’agir au niveau régional sur ce dossier en raison de sa position ouvertement favorable au Maroc, s’accroche au contraire à un « pilotage » de l’Onu. Si l’idée de faire avaliser le projet marocain de « large autonomie » par l’Onu paraît vaine, Paris veut s’assurer de la préservation du statu quo avec le maintien d’une Minurso, chargée non plus de la mise en oeuvre du référendum d’autodétermination comme cela est prévu, mais à superviser le gel du conflit et la poursuite du cessez-le-feu.
M. Saâdoune