Au Rwanda, la justice vient de rejeter la requête de l’opposante Victoire Ingabire qui avait demandé à être restaurée dans ses droits civiques. Elle les avait perdus lors de sa condamnation, en 2013, à 15 ans de prison ferme.
Victoire Ingabire ne pourra pas participer à l’élection présidentielle du 15 juillet 2024 au Rwanda. Tel en a décidé la Haute Cour de Nyamirambo, ce mercredi. En effet, les juges ont tout simplement rejeté la requête de l’opposante qui avait demandé à être restaurée dans ses droits civiques perdus en raison de sa condamnation à 15 ans de prison, en 2013.
Une décision contestée, mais sans suite possible
Sans surprise, Victoire Ingabire a protesté contre cette décision de la justice. « Je ne suis pas d’accord avec cette décision. Elle est clairement politisée. Nous avons toujours un pays où les tribunaux ne sont toujours pas indépendants », a-t-elle rapidement réagi. Avant de poster un communiqué sur les réseaux sociaux. « La décision d’aujourd’hui nous rappelle brutalement les obstacles à la participation politique et le besoin urgent d’une réforme de la gouvernance de notre pays », peut-on lire dans le texte. L’opposante y rappelle par ailleurs que cette décision n’entame en rien sa détermination dans la lutte qu’elle mène depuis des années. « Je suis déterminée à poursuivre la lutte pour l’établissement d’une véritable démocratie au Rwanda, en plaidant pour le respect des droits de l’homme et de l’État de droit », soutient-elle dans le communiqué.
De son côté, le tribunal estime que la requête de l’opposante était « sans fondement », étant donné que « lors de la grâce présidentielle accordée à Ingabire, certaines conditions ont été fixées qu’elle doit respecter ». Pour les juges, « il est impossible d’annuler la condamnation, puisque les conditions imposées lors de sa grâce présidentielle n’ont pas expiré ».
Déterminée malgré la menace permanente de la répression
Victoire Ingabire, 55 ans, fait preuve d’un courage peu ordinaire dans ce Rwanda dirigé de main forte par Paul Kagame depuis 24 ans. Un pays dans lequel l’opposition n’a pas voix au chapitre. D’ailleurs, Victoire Ingabire en a elle-même fait l’expérience. En 2013, soit trois ans après son retour de 16 années d’exil aux Pays-Bas, elle devait faire l’objet d’une condamnation à 15 ans de prison ferme, notamment pour « minimisation du génocide de 1994 » qui a décimé pas moins de 800 000 victimes, principalement des Tutsi.
Le 16 janvier 2010, en effet, à l’occasion d’une visite au mémorial du génocide de Kigali, Victoire Ingabire, hutu, avait réclamé des jugements à l’égard des auteurs des crimes contre les Hutu aussi. Cette réclamation lui valut arrestation et condamnation pour négation de la réalité du génocide, une question hautement sensible au Rwanda. L’opposante a pu recouvrer la liberté, en 2018, à la faveur d’une grâce présidentielle accordée par Paul Kagame à plus de 2 000 détenus.
Paul Kagame, qui est assuré de sa réélection, se trouve pour l’instant avec un seul challenger. Il s’agit du chef du Parti vert démocratique, Frank Habineza. Ce dernier n’avait réuni que 0.45% des suffrages exprimés lors de la dernière Présidentielle tenue en 2017. Pas de quoi inquiéter Paul Kagame constitutionnellement autorisé à diriger le Rwanda jusqu’en 2034.