Rwanda : l’opposante Victoire Ingabire condamnée à huit ans de prison ferme


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L’opposante rwandaise Victoire Ingabire a été condamnée, mardi à Kigali, à huit ans de prison ferme pour « conspiration contre les autorités par le terrorisme et la guerre » et négation du génocide de 1994.

Deux ans après son incarcération, celle que l’on qualifie déjà d’Aung San Suu Kyi rwandaise, Victoire Ingabire est désormais fixée sur son sort : principale opposante au régime de Paul Kagame, elle a été condamnée à 8 ans de prison ferme pour « conspiration contre les autorités par le terrorisme et la guerre » et négation du génocide.

Pour de nombreux observateurs, ce verdict parait moins sévère qu’attendu car le parquet avait requis la prison à perpétuité. Fin avril, le parquet affirmait disposer des preuves de transfert d’argent effectué par Mme Ingabire au profit des Forces démocratiques de libération du Rwanda, un mouvement de rébellion hutu rwandais basé dans l’Est de la République démocratique du Congo, que Kigali qualifie de groupe « terroriste ». A la fin de l’audience, la juge Alice Rulisa a déclaré au nom des trois magistrats que Victoire Ingabire avait bénéficié de l’indulgence de la cour, indulgence qu’elle avait demandée par lettre au président, Paul Kagame.

Présidente des forces démocratiques unifiées (FDU), principal parti d’opposition, Victoire Ingabire Umuhoza est mariée et mère de trois enfants. Après sa formation en droit commercial et comptabilité, elle entreprend des études supérieures en économie commerciale et gestion des entreprises, aux Pays-Bas. En 1997, elle s’engage en politique en adhérant au Rassemblement Républicain pour la Démocratie au Rwanda, un parti politique de l’opposition démocratique. Un an plus tard, elle devient Présidente de la section Pays-Bas du RDR. En 2000, elle est nommée présidente du RDR au niveau international. Elle amène son parti à s’affirmer et à condamner le génocide en cours. De 2003 à 2006, elle assume la présidence de l’Union des Forces Démocratiques Rwandaises (UFDR), une plateforme regroupant des formations politiques d’opposition, et dont le RDR est un membre actif. En 2010, candidate désignée de son parti aux élections présidentielles, elle ne prendra finalement pas part aux élections, étant sous contrôle judiciaire. L’ascension de l’opposante pourrait peut-être se poursuivre, ses avocats vont faire appel.

Le point de vue de Lydie Boka, manager su site strategico.fr et spécialiste de l’Afrique, contactée par Afrik.com

« Je trouve ce verdict sévère. Plusieurs organisations des droits de l’Homme se sont d’ailleurs émues de cette sentence. Ce n’est pas tant sur le fond que je le critique – je ne suis pas apte à juger des actes commis ou non par Victoire Ingabire- mais plutôt sur la forme. Pour moi, dans ce procès, l’accusation n’a pas fourni assez de preuves de ce qu’elle avançait.

A mon sens, Victoire Ingabire est quelqu’un qui dérangeait très certainement. Elle faisait partie de l’opposition et avait l’intention de se porter candidate à la présidentielle en 2010. Elle a aussi fait des déclarations qui n’ont pas plu, en demandant notamment à ce que les responsables de crimes commis contre les Hutu pendant le génocide soient poursuivis. Elle est aussi tombée sous le coup d’une loi (la loi de 2008 sur « l’idéologie du génocide »), assez floue, qui permet d’arrêter les gens assez facilement.

Selon moi, toutefois, ce n’est pas le procès d’une ethnie contre une autre – le Rwanda a tellement souffert qu’il n’a certainement pas envie de réveiller ce monstre-là- mais il s’agit plutôt d’un régime autoritaire qui a encore de la peine avec la liberté d’expression. Le Rwanda a fait beaucoup de progrès, notamment d’un point de vue économique, mais a encore des efforts à faire pour ce qui est de la démocratie. »

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