La nouvelle a été donnée le lundi matin par la police rwandaise. Le chanteur gospel et opposant au régime de Paul Kagame, Kizito Mihigo, a été retrouvé, très tôt ce matin, mort dans la cellule où il était détenu depuis le 13 février dernier. La police a conclu à un suicide. Est-ce réellement le cas ?
Le corps inanimé de Kizito Mihigo a été découvert, le lundi 17 février au matin, dans sa cellule, vers 5 heures. Selon le communiqué publié par la police rwandaise, l’artiste se serait donné la mort. Le même communiqué publié en kinyarwanda annonce qu’une enquête est en cours pour identifier la cause du suicide. Mais suicide, y a-t-il réellement eu ? Beaucoup restent dubitatifs.
En effet, après avoir été, pendant un temps, adulé par le régime de Paul Kagame, le chanteur de 38 ans, qui a créé en 2001, une fondation pour la promotion de la paix et la réconciliation au Rwanda post-génocide, et contribué à la composition du nouvel hymne national du pays, a fini par tomber en disgrâce. La raison de ce changement, la sortie en 2014 d’un morceau, Igisobanuro cy’Urupfu (La Signification de la mort), dans lequel le jeune chanteur tutsi bien que dénonçant le génocide dont lui-même et les membres de son groupe sociolinguistique ont été victimes, condamne tout autant les représailles tutsi contre les Hutu.
Pour le régime de Kigali, le chanteur a franchi le Rubicon et devient donc une bête à abattre. Aussi, a-t-il été arrêté la même année et condamné à 10 ans de prison ferme pour « conspiration contre le gouvernement rwandais », soupçonné d’entretenir des liens avec des chefs rebelles rwandais comme le général Kayumba Nyamwasa, un des pères fondateurs du Front patriotique rwandais (FPR), aujourd’hui en opposition avec Paul Kagame.
En septembre 2018, Kizito Mihigo, bénéficie, en même temps que l’opposante Victoire Ingabire et quelques 2 138 autres détenus, de la grâce présidentielle. Mais cette liberté était assortie de certaines conditions : interdiction de quitter le territoire national sans autorisation, obligation de se présenter chaque mois au parquet durant toute la période d’incarcération qui lui restait. C’est le non-respect de la première condition qui aurait valu une nouvelle arrestation au musicien, le 13 février dernier.
En effet, accusé de vouloir traverser la frontière avec le Burundi, dans la localité de Nyaraguru au sud du Rwanda, Kizito Mihigo a été interpellé par les éléments du Rwanda Investigation Bureau. Quatre jours après cette arrestation, c’est son corps sans vie qui sortira dans la cellule. La vérité sur cette mort ne sera peut-être jamais connue.