Je déteste les guerres. Je pense profondément à des populations qui vivent les violences de guerre au quotidien. C’est désolément le cas de nos frères et sœurs de l’Est du Congo. Il n’y a rien de pire que de s’habituer au mal infligé à l’être humain ou de chercher à le normaliser.
Le traitement réservé à cette région, depuis trois décennies, mérite largement mieux que cela. Aujourd’hui, des intérêts dits « stratégiques, géopolitiques et multinationaux » prennent le dessus, de manière vertigineuse, sur les vies humaines. Ces concepts sont chargés de signifiants dans un monde du capitalisme sauvage. On a l’impression de revenir à la vie primitive de la jungle, où le petit sert de proie au grand, la souffrance du premier demeurant davantage tolérée ou inaperçue.
Cette sale guerre a tué des milliers d’enfants, de femmes et d’hommes. Elle est partie du Rwanda et s’est propagée à l’Est du Congo où elle trouve sa demeure. Elle se métamorphose au gré de ses concepteurs. Elle contraint désastreusement des populations à des déplacements massifs, sans répit, entrainant ainsi des conséquences sanitaires dramatiques. Les viols et violences faites aux femmes et aux enfants sont monnaie courante.
Doit-on répéter qu’il existe des groupes armés dans cette région, soutenus ou créés par l’un ou l’autre des pays voisins ? Ignore-t-on que différents accords pour le retour de la paix ont été signés mais sont restés lettre morte ? Faut-il redire que c’est une région convoitée par les grandes puissances qui rivalisent de capacités d’influence ? Tout est connu, rien de neuf.
Du maintien de la paix au maintien du désordre
Les forces régionales ou internationales s’y sont succédé, sans succès. Les violences cycliques montent, redescendent, remontent à nouveau malgré la présence desdites forces. Les jours passent, rien ne change. Tellement les gens sont morts, là-bas, que le monde ne s’y intéresse plus.
Sur le terrain, en ce moment, on se congratule, d’un côté, des offensives terrestres massives. De l’autre, on parle de défensives aériennes foudroyantes. Les morts se comptent par dizaines et jonchent les collines et les tranchées. Des images choquantes circulent sur les réseaux sociaux. On n’en peut plus. La tension diplomatique et militaire (Rwanda et Congo) est palpable.
La communauté internationale, désaxée et perdue, gesticule dans un discours flou et approximatif. Elle a l’air d’avoir perdu tous les plans et le contrôle de la région, théâtre d’enjeux multiples et contradictoires. Ces derniers paraissent parfois ahurissants. On pense notamment au fameux projet londonien d’envoyer les migrants au Rwanda, pays pauvre, et pire, qui ne respecte pas les droits humains (Cf. Rapports de Human Rights Watch). Le monde à l’envers !
Une région qui ne sait plus à quel saint se vouer
Tous les plans géopolitiques conçus jusque-là ont visiblement échoué. Il n’est plus possible de maintenir les populations sous la damnation des armes. Les pays influents dans cette région devraient revoir leur copie, un tant soit peu et abandonner le soutien des logiques militaires. La stratégie suprématiste ne fonctionne plus. Au lieu de concentrer les efforts sur le renforcement de la démocratie et la dissuasion des dictatures, les tendances semblent fatalement s’inverser. Certaines puissances cherchent à fonder un nouvel équilibre mondial en s’appuyant sur des régimes autocratiques impulsifs, qui agissent sans scrupules. Sur un mauvais arbre, peut-on cueillir de bons fruits ?
Le retour de « La politique généreuse » (terme emprunté à Dominique De Villepin) et la diplomatie humaine, celle du gagnant-gagnant, constituent, à mon sens, l’unique solution qui arrange tout le monde. La militarisation de la région, quelle que soit sa forme, est un échec.
Hormis cette vision et perspectives humaines, les solutions de rapport de forces qui semblent fatalement se dessiner, ne pourront que transformer totalement la région, énième fois, en territoire de carnage et de viols.
Ma voix, celle du petit homme, ne sera sûrement pas entendue. Elle aura néanmoins rempli sa mission de crier haut et fort « vox clamantis in deserto ». Le latin au moins toi, tu n’es pas définitivement mort !