Rose Mefalessi, née au Congo et arrivée en Belgique à l’âge de quatorze ans, est aujourd’hui candidate aux élections municipales belges dans la ville de Bruxelles. Attachée-juriste à la trésorerie du ministère de la région Wallonne, elle pourrait devenir conseillère municipale voire maire-adjointe. Tout dépendra des résultats.
Afrik.com : Pour commencer, pourquoi vous êtes-vous engagée en politique ?
Rose Mefalessi : Parce que cela allait de soi. Dans ma famille, on s’est toujours engagés en politique. Je viens d’une famille où la politique est une chose courante. Comme je viens de Kisangani, on était entourés des gens qui faisaient de la politique, notamment de la famille de Lumumba. Ma sœur, par exemple, s’est mariée avec le frère de Lumumba. Et j’ai fait de la politique quand j’étais jeune. A huit ans déjà, je distribuais des tracts. Lumumba était notre héros. Je pense que cette fibre là est restée. La politique, c’est dans mon ADN. Lorsque j’ai terminé mes études, je me suis dit pourquoi ne pas m’intéresser à la politique belge, car le Congo, à l’époque ne me plaisait pas, il y avait beaucoup de restrictions de droits car une dictature était au pouvoir. J’ai donc décidé de faire ma vie ici. Je me suis mise à chercher une formation politique qui défendait mes valeurs. C’est-à-dire la défense des droits fondamentaux et des libertés. C’est pourquoi je me suis tournée vers le parti libéral, le Mouvement réformateur.
Afrik.com : Comment se positionne votre parti ?
Rose Mefalessi : C’est un parti optimiste. Le parti libéral n’est pas un parti conservateur. On cherche à pousser les individus à donner le meilleur d’eux-mêmes, et à comprendre que le fatalisme peut être combattu. L’idée c’est de se demander : qu’est-ce que je peux faire pour donner un plus à la société et ne pas nécessairement attendre quelque chose de la société.
Afrik.com : Est-ce un aboutissement d’être candidat aux élections municipales ?
Rose Mefalessi : C’est un début. J’espère que j’irai au-delà. Je veux faire quelque chose pour la société belge. La politique s’intéressait à moi, et maintenant je ne veux plus la quitter. Après les municipales, il y a les régionales. Tout dépendra de l’issue de ma campagne. Je verrai si mes idées font mouche ou pas, si le programme que je vais mettre en place sera apprécié ou non par les Bruxellois.
« Lumumba était notre héros. » |
Afrik.com : Quel programme défendez-vous ?
Rose Mefalessi : Il faut plus de sécurité pour les commerces. Il y a un grand souci avec la sécurité des commerçants. Ils manquent cruellement de contact public avec les responsables municipales. Par ailleurs, il y a beaucoup d’incivisme lié au manque de visibilité de la police. Il faudrait que la police fasse un travail préventif et que les commissariats soient ouverts 24/24h. En outre, la prostitution de rue est insoutenable. Enfin, Il faut essayer de rénover le logement public. Si les libéraux passent au mois d’octobre, il y aura un grand changement. Les rues seront plus propres et je mettrai notamment en place une structure d’accueil pour la petite enfance.
Afrik.com : Vous êtes une candidate du changement et pourtant vous êtes conservatrice ?
Rose Mefalessi : C’est ce que les gens disent. Etre libéral ce n’est pas être conservateur. Comme son nom l’indique, le Mouvement réformateur est en mouvement permanent, c’est-à-dire qu’on va vers le futur et on progresse. Alors que les conservateurs s’enferment dans leurs traditions, nous libéraux, on est dynamiques et on se fixe l’avenir comme objectif. On n’est pas du tout conservateurs.
Afrik.com : Si vous n’êtes pas conservatrice, vous n’êtes pas contre l’immigration et l’homosexualité ?
Rose Mefalessi : Il y a certaines valeurs familiales qui sont individuelles. En ce qui me concerne moi, je respecte les autres et j’essaye de les comprendre. Même si je ne partage pas les mêmes opinions qu’eux, ce n’est pas pour autant que je vais me mettre à les agresser gratuitement. En ce qui concerne l’immigration, plus une société évolue, plus elle est amenée à accepter les valeurs des autres. Un pays qui ne reçoit pas d’immigrés est un pays qui est mort. Il faut juste contrôler et réprimer l’immigration de masse. De toute façon, aucun pays ne peut ouvrir ou fermer totalement ses frontières. Depuis que le monde existe, l’immigration a été une grosse richesse et ça le restera. C’est une plus-value. En ce qui concerne l’homosexualité, je n’adhère pas à ce qu’ils revendiquent mais tous les citoyens ont les mêmes droits et devoirs.
« Les obstacles ne doivent pas être un frein et nous devons être des modèles pour la génération à venir. » |
Afrik.com : Vous avez échoué il y a six ans. Quel est votre état d’esprit à trois mois du scrutin ?
Rose Mefalessi : Exacte. Si j’échoue, ce n’est pas grave, j’irai de l’avant. Le monde ne va pas s’écrouler si je ne suis pas élue. Je me bats, avec quelques députés libéraux, contre les violences et les viols à l’Est de la République démocratique du Congo. Si on est élus, on aura plus de visibilité pour condamner ce qui se passe dans la région du Nord-Kivu. C’est mon combat, j’avais d’ailleurs publié une pétition en ligne pour dénoncer ces massacres et fustiger les viols qui sont utilisés comme une arme à part entière. Si j’échoue, je continuerai toujours à défendre ces causes. Sinon, il y a d’autres moyens.
Afrik.com : Vous êtes née au Congo. Quel effet cela fait-il d’être devenue une politique belge de premier plan ?
Rose Mefalessi : C’est notre pays d’origine, notre cœur se trouve là-bas. La Belgique aussi c’est mon pays. Quand ça va mal au Congo, on est touchés de toutes nos forces. Le Congo et la Belgique c’est vraiment un couple qui ne peut pas se séparer. Si par chance je suis élue, je vais beaucoup œuvrer pour le Congo. En 1999, les libéraux ont été les premiers à pousser les instances internationales à s’intéresser à la cause congolaise. Avec une congolaise qui est députée belge, partageant des valeurs comme la liberté d’expression et des droits individuels, le Congo ne peut que mieux se porter. Je réunirai les députés qui ont les mêmes valeurs afin d’œuvrer en faveur de mon pays d’origine. On a la possibilité de faire beaucoup de choses. C’est grâce à la bonne volonté des gens, qu’on a mis en place le système d’assurances qui accorde une couverture sociale spéciale aux Congolais restés au pays.
Afrik.com : Comment êtes-vous devenue une femme politique belge ?
Rose Mefalessi : On se bat. Comme je dis toujours, il y avait des obstacles mais la persévérance paye. Je suis issue d’une famille de politiques, donc des battants. Je suis arrivée ici, j’ai fait des études et je n’ai jamais succombé aux obstacles. Grâce à ma foi foncièrement chrétienne, je me suis reposée sur Dieu, avec lui on peut faire de grandes choses. Dans le parti auquel j’appartiens, il y a une grande liberté, j’ai la liberté totale de pratiquer ma religion. Ils le respectent. Moi, je respecte leurs convictions.
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