Roschdy Zem ne joue pas au terroriste


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Propos recueillis par Kenza ALAOUI et Amin RBOUB de nos partenaire de L’Economiste, premier quotidien économique du Maroc

 » J’ai toujours refusé de jouer les rôles d’Arabes poseurs de bombes ». Originaire de Skoura, près de Ouarzazate, Roschdy Zem, acteur marocain résidant en France, est devenu une méga-pointure du 7e art. Il a côtoyé Gérard Depardieu, Fanny Ardant, Philippe Noiret et a été dirigé, dès le début de sa carrière, par André Téchiné. A le voir de près, il dégage modestie, charisme et surtout beaucoup d’humanité.

Comment êtes-vous arrivé dans le monde du cinéma?

Roschdy Zem : J’y suis arrivé comme un intrus. Au début, je n’étais pas acteur et je ne cherchais pas à l’être. Mon domaine à moi ce sont les costumes et le design. Un milieu où je travaillais beaucoup avec les gens du cinéma qui m’ont proposé plusieurs fois de travailler avec eux. Un jour j’accepte. Et de fil en aiguille, les réalisateurs commencent à me proposer des films plus importants.

Quelle était la première proposition de film que vous avez eue?

Roschdy Zem : Un film d’André Téchiné qui s’appelait J’embrasse pas avec Emmanuelle Béart et Philippe Noiret.

Vous avez placé la barre très haut en travaillant dès le début avec ce grand réalisateur?

Roschdy Zem : Et pourtant je ne l’aime pas beaucoup.

Alors pourquoi avoir accepté de travailler avec lui?

Roschdy Zem : Parce qu’à l’époque, je ne m’intéressais pas au cinéma. J’étais plutôt attiré par les films d’action, comme beaucoup de jeunes d’aujourd’hui. Donc, je ne savais pas qui était Téchiné. J’ai accepté de travailler avec lui uniquement pour des raisons financières. Il m’a dit que j’avais une semaine de travail pour laquelle je serais payé à 50 000 FF, alors que je mettais 6 mois pour les gagner.

Etait-ce difficile pour quelqu’un qui n’a jamais fait de cinéma de s’y embarquer brusquement?

Roschdy Zem : Non. Je dirais même que je regrette les années où j’étais totalement insouciant et où je faisais des films uniquement parce qu’on me le demandait. Je me sentais tranquille. Je ne devais rien à personne parce que je me disais tout le temps que je n’étais pas un acteur. Alors que maintenant, on m’attend au tournant, j’ai plus de pression et je dois faire mes preuves à chaque fois…

Vous jouez la plupart du temps le rôle d’un beur dans vos films. Cela ne vous dérange pas trop de porter cette étiquette?

Roschdy Zem : Cela me dérange quand il s’agit d’un cliché. Par contre si le rôle est intéressant, le film est conséquent et que le scénario me plaît, cela ne me pose aucun problème. Cela n’a jamais dérangé Al Pacino ou Robert De Niro de camper des rôles d’Italo-Américains. Il faut accepter ses origines.

Où en êtes-vous avec votre projet de film aux côtés de Gérard Depardieu?

Roschdy Zem : Le tournage est déjà terminé. Là par exemple, Blanche est différent. C’est un film d’époque dont l’action se déroule au XVIe siècle.

Avez-vous déjà joué dans des films américains?

Roschdy Zem : Non, parce qu’ils me contactent pour des rôles d’Arabes terroristes. Depuis quelques mois, ça n’a pas changé, ça va même être pire. C’est à se demander pourquoi ils viennent chercher des acteurs en France. On ne va pas détruire tout le travail qu’on a essayé de faire en France pour sortir des clichés en acceptant des rôles d’Irakiens ou de Palestiniens poseurs de bombes aux Etats-Unis. C’est exactement ce que nous avons voulu éviter en France.

Et les réalisateurs marocains, avez-vous déjà été sollicité par l’un d’eux?

Roschdy Zem : Non. Enfin si, deux ou trois fois. La dernière fois c’était par Nabil Ayouch. Mais nous nous sommes rencontrés trop tard. Je m’étais déjà engagé sur le film avec Depardieu alors qu’il était pressé pour le tournage de son film.

Quel est le rôle dont vous rêvez et que vous n’avez pas encore interprété?

Roschdy Zem : Je viens de voir le film Ali, avec Will Smith sur la vie de Mohamed Ali et il y a deux ans, j’ai vu Hurricane Carter avec Denzel Washington. Alors je me dis que cela m’intéresserait de jouer la vie d’un boxeur. Néanmoins, la vie d’un boxeur américain n’est pas la même que celle d’un boxeur nord-africain ou français. Il y a moins d’histoires à raconter.

Vous avez travaillé avec le réalisateur tunisien Rachid Bouchareb sur plusieurs films. Avez-vous des projets ensemble?

Roschdy Zem : On a fait trois films ensemble. Little Senegal, L’honneur de la famille et il a produit Vivre au paradis et là on attaque un gros film sur la deuxième Guerre mondiale avec Jamel Debbouze. Il raconte l’histoire de soldats nord-africains qui se battaient pour la France.

Qu’est-ce que cela vous fait de revenir au Maroc après être devenu un grand acteur en France?

Roschdy Zem : J’ai perdu mon père il n’y a pas très longtemps. Il vivait à Skoura, près de Ouarzazate. Il n’avait pas de télé. Le Maroc pour moi c’est ça. Quand je reviens dans mon pays, je ne le fais pas en tant qu’acteur. Ce qui compte pour moi, c’est être chez moi et être connu tout simplement en tant qu’homme et non en tant qu’acteur. Car je n’ai pas une popularité évidente au Maroc. Mais cela me va très bien. Mon père savait à peine que j’étais acteur. Il n’a jamais vu mes films.

Avez-vous des projets?

Roschdy Zem : Le film de Bouchareb, notamment, et au mois de mai, j’attaque un film sur l’histoire de Napoléon où je joue le rôle du Général Bertrand qui est un brave homme et qui a suivi Napoléon jusqu’à sa mort. Le tournage va durer 5 mois, et se déroulera en Afrique du Sud.

De notre partenaire L’Economiste :

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