Pour plonger dans le Caire cosmopolite et bouillonnant de 1908, il faut suivre les enquêtes du mamour zapt, chef de la police secrète, chargé de protéger les intérêts britanniques dans l’Egypte du début du XXème siècle. » Le retour du tapis » de Michael Pearce est un polar qui se déguste comme un narguilé : lentement et avec délectation.
Enquêtes, manipulations et coups montés dans le Caire de 1908. Le Britannique né en Egypte Michael Pearce entraîne son lecteur au coeur de la capitale égyptienne sur les pas de Gareth Cadwallader Owen. Celui-ci est le mamour zapt, chef de la police politique et des services secrets, au service du consul général de Grande-Bretagne, alors véritable maître de l’Egypte. Le meurtre raté d’un notable égyptien est prétexte pour l’auteur de plonger au coeur de la société cairote, celle » d’en haut » et celle » d’en-bas « . Car Owen, qui parle couramment l’arabe, est aussi à l’aise au Sporting Club que dans les quartiers mal famés du vieux Caire.
Le vrai mamour zapt de l’époque ne ressemblait peut-être pas à ce gentleman enquêteur, délicieusement anti-conventionnel et irrésistiblement indépendant. Mais pour le reste, Michael Pearce s’est attaché à rester » au plus près des faits historiques « . » Les ruelles sont celles du Caire en 1908 « , explique-t-il. Les clubs » terroristes » auxquels il est fait allusion dans l’ouvrage sont également un fait marquant du début du XXème siècle en Egypte, alors que le nationalisme commence à poindre et que la présence britannique, qui dure depuis 30 ans déjà, est de moins en moins bien supportée par la population…
Pays des ambiguïtés
» En 1908, l’autorité britannique n’était pas aussi fermement enracinée qu’elle le paraissait. D’autres puissances commençaient à la jalouser, comme la France et la Turquie. (…) L’Egypte regorgeait de maîtres potentiels. Elle possédait quatre systèmes juridiques complémentaires, trois langues principales et plusieurs religions outre l’islam. Elle abritait de très nombreuses nationalités. C’était un pays mûr pour les ambiguïtés. Un pays étincelant de soleil et obscurci d’ombres. Et c’était dans l’ombre, parmi ces ambiguïtés, que travaillait le mamour zapt « , écrit Michael Pearce.
Le Caire cosmopolite et polyglotte, à l’image de l’équipe d’Owen avec le copte Nikos et le Grec Georgiades, sert donc de toile de fond à ce roman policier drôle et haletant. On y découvre le petit peuple cairote – déjà 500 000 habitants à l’époque – qui utilise l’humour et la dérision comme armes de poing. Le Caire y est une ville attachante et en ébullition. Alors que l’Angleterre découvrait en 2001 la quatorzième enquête du mamour zapt, la France pourra se délecter de deux sorties aux éditions 10/18 : Le retour du tapis et La nuit du chien. En attendant plus.
Le retour du tapis et La nuit du chien de Michael Pearce, éditions 10/18.
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