RG contre FLN : la guerre d’Algérie en France


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La guerre de l'ombre
La guerre de l'ombre

« La guerre de l’ombre, guerre d’Algérie, RG contre FLN ». C’est le titre du dernier livre de Laurent Chabrun, écrit en collaboration avec Benjamin Stora à partir des notes des Renseignements généraux français. Une vision à travers le prisme français de la période 1950-1960 pour comprendre comment le Front de libération nationale était organisé et la façon dont il a supprimé le Mouvement national algérien après un terrible combat qui a fait 4000 morts en France.

Jour après jour, pendant plus de 10 ans, les policiers des Renseignements généraux (RG) français ont accumulé des informations, rédigé des notes, avant de tout synthétiser. Autant d’éléments destinés au gouvernement et au Général de Gaulle pour les tenir au courant de la « situation algérienne » et de son évolution. Des tonnes d’informations que Laurent Chabrun [[Laurent Chabrun est journaliste à L’Express et auteur de Les Policiers français sous l’occupation, d’après les archives inédites de l’épuration, aux éditions Perrin, prix Derogy 2001 du livre d’investigation]] a récupéré au ministère de l’Intérieur français et qu’il nous livre avec l’aide de Benjamin Stora, spécialiste du Maghreb et auteur de nombreux ouvrages sur l’Algérie.

Messali Hadj, père du nationalisme algérien

Ce livre est notamment l’occasion de redécouvrir Messali Hadj, père du nationalisme algérien. Né en 1898 à Tlemcen, il fut l’un des premiers leader de l’ENA, Etoile nord-africaine, premier mouvement indépendantiste algérien en France, soutenu par le parti communiste français. En Algérie, il se fera surtout connaître en 1936 avec sa fameuse déclaration : « Cette terre est à nous, nous ne la vendrons à personne », lors d’un discours qui fera date. Il est le fondateur du PPA, Parti du peuple Algérien, devenu ensuite le MTLD, Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques, puis le MNA, Mouvement national algérien. Entre passages en prison et exils, Messali Hadj a participé à la création de l’OS, l’Organisation spéciale, le bras armé du MTLD, dirigée successivement par Hocine Aït Ahmed et Ahmed Ben Bella. Messali s’avèrera être un adversaire farouche du FLN, Front de libération nationale, dans une guerre qui fera plusieurs milliers de victimes, en Algérie comme en France. Décédé à Paris en 1974, ce personnage sera longtemps occulté de l’histoire officielle de l’Algérie, jusqu’à ce qu’Abdelaziz Bouteflika décide, le 5 juillet 1999, de donner à l’aéroport de Tlemcen le nom de Messali Hadj .

MNA contre FLN

A travers la vision des Renseignements Généraux français, on découvre comment le FLN va progressivement s’imposer. Jeune mouvement bien organisé, c’est en partie par la violence que le FLN réussira à s’implanter face à son rival. Le FLN, soutenu par les Américains et la CIA, va apporter son aide à l’UGTA, l’Union générale des travailleurs algériens, syndicat créé et affilié par le FLN. Cet appui servira dans un premier temps à affaiblir la France, puis à empêcher le rapprochement du FLN et du bloc communiste. De page en page on découvre les détails de la lutte armée qui opposera le FLN et le MNA.

Suite à un nouvel assassinat en pleine rue, le journal français Le Républicain Lorrain titre, le 9 novembre 1957, en première page de son édition : « Le FLN a déclaré ouvertement la guerre au MNA en France ». Les attaques mortelles s’accumuleront au fil des années. On estime « qu’en France, entre 1956 et 1962, l’affrontement coûte la vie à 4 000 algériens ». Le FLN sortira grand vainqueur de ce combat grâce à une organisation dite sans faille. De la récupération des fonds (qui s’apparente aux yeux de RG à un racket de la population algérienne de France) à la gestion impitoyable de ses troupes, le FLN ne laissera rien au hasard. « Le militant révolutionnaire, fidèle à l’idéal pour lequel il combat, doit en s’engageant au service de la patrie algérienne accepter la vie clandestine, ses rigueurs et ses risques, la prison et sa conséquence coutumière en régime colonialiste, la torture, la mort plutôt que l’esclavage (…) Aucune lâcheté ne pourra être tolérée. Dans les circonstances que nous vivons, elle constitue une trahison », explique un document interne du FLN diffusé en novembre 1958. Une organisation implacable, et largement bureaucratique très bien décrite dans le livre, qui n’est pas sans rappeler certaines dérives de la bureaucratie algérienne de ces cinquante dernières années… Les RG considèrent que « l’extermination des réfractaires et des messalistes a été conduite sans défaillance, comme prévu, et sans qu’aucune des péripéties de la lutte ait fait réviser en quoi que ce soit cette position initiale »

17 octobre 1961

L’histoire se poursuit jusqu’au 17 octobre 1961, date du massacre par la police française de plus d’une centaine de manifestants algériens. Les protestaires non violents ont été molestés ou jetés dans la Seine lors de cette répression sanglante. Les notes des Renseignements généraux, récupérés par Laurent Chabrun, permettent de mieux comprendre ce déchaînement de violence. Maurice Papon, le préfet de police a par exemple déclaré à ses troupes, au matin du 17 octobre 1961, « qu’il s’agissait de mener une guerre et non pas de rétablir l’ordre républicain ». A ce moment-là, les RG et la Sureté nationale jugent cette manifestation comme le « coup de boutoir » que le FLN veut donner pour faire basculer définitivement le processus d’indépendance de l’Algérie. Ils pensent alors que tout cela sera suivi d’une offensive de l’Organisation spéciale contre « l’infrastructure économique de la France ».

Selon les RG, « la Fédération de France du FLN est en train de sacrifier ses 20 000 militants des deux wilayas de Paris (…) Pour accepter la perte de tels cadres et un démantèlement de l’organisation à Paris, où elle était toute puissante, il faut que la Fédération de France considère la partie engagée comme décisive », lit-on dans le livre de Chabrun. Toujours selon les RG, l’objectif du FLN est « que l’opinion doit tirer la conclusion que la France est incapable de contrôler la masse musulmane, même sur le territoire métropolitain ». Le calcul n’était pas si mauvais. Au terme du combat du FLN, l’indépendance de l’Algérie est proclamée et… le FLN arrive au pouvoir.

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Editeur : Jacob-Duvernet

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