RFI : Sassou a eu la tête de Placca


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La « chronique de Jean-Baptiste Placca » disparaît. Les auditeurs s’opposent. Cet éditorial hebdomadaire consacré à l’Afrique était, depuis novembre 2007, la marque de fabrique de la radio internationale indépendante que se veut RFI, … Et pourtant, hormis les palais présidentiels d’Afrique où elle agace, cette chronique était saluée par les auditeurs pour sa pertinence, le ton et la coloration uniques qu’elle apporte à cette radio. Il n’y a rien de scandaleux qu’un employeur se sépare de son associé. Mais l’acte devient questionnable lorsqu’il prend une forme inopportune qui laisse suspecter un bras extérieur à l’entreprise. Est-il vrai que Placca et sa chronique ont été emportés par le courroux et les menaces du président Denis Sassou Nguesso du Congo ?

Les gens, pas tous mais beaucoup, des auditeurs africains du continent et de la diaspora, vont ressentir le besoin d’être éclairés sur ce que J.-B. Placca a bien pu faire pour que la direction Afrique de RFI, sans sourciller, supprime un éditorial aussi populaire que celui-là. Selon la Société Des Journalistes (SDJ-RFI), ce collaborateur du dehors recueille critiques et louanges. Critiques de ceux que sa plume écorne, louanges des auditeurs. La SDJ-RFI, surtout, s’étonne : « Placca n’est pas concerné par la réduction d’effectifs. Au contraire, ses commentaires, analyses et réflexions sont plus que jamais nécessaires à un moment où l’information a tendance à se replier sur soi ». Elle s’interroge aussi : « Y a-t-il un lien entre l’annonce de fermeture de l’émetteur de RFI au Congo après une chronique de Jean-Baptiste Placca, le 10 mars dernier, à propos de l’explosion du dépôt de munitions à Brazzaville ? » Le « Non » de la direction n’a pas convaincu. Il montre, mal, une anguille sous la roche.
Si c’est Denis Nguesso qui a utilisé ses leviers français pour éjecter Placca, comme toutes les coïncidences le font croire, on peut aisément déduire que le « dictateur de Brazza » a dû prendre ombrage de ce paragraphe de l’édito qui lui est consacré: « Le général Denis Sassou Nguesso est chef de l’Etat congolais depuis 1979 (trente-trois ans !). Congédié par les urnes en 1992, il a repris le pouvoir par les armes, en 1997. Quinze ans plus tard, il a encore manifestement toujours besoin d’un arsenal conséquent au cœur de la capitale, pour protéger son pouvoir. Le scandale, ici, ne réside pas uniquement dans le fait que l’on investisse des centaines de milliards dans l’armement, dans un pays qui n’a jamais été en guerre avec personne. Le scandale, c’est qu’un Etat pétrolier de ce rang, peuplé d’à peine 4 millions d’habitants, ne puisse pas investir quelques dizaines de millions dans les pansements, compresses et autre Bétadine dont ont cruellement besoin les hôpitaux du Congo », écrivait J.-B. Placca. On ne peut décrire mieux Denis Sassou Nguesso. Combien y a-t-il d’inexactitudes dans les remarques du journaliste ? Aucune !

En effet, il est de notoriété publique que le chef de l’Etat congolais est l’un des pivots africains de la Françafrique. Constamment accusé dans les affaires de biens mal acquis, il fait partie de ces vieux despotes africains qui confisquent le destin de leurs peuples, contrariant dramatiquement l’avenir des jeunes générations. C’est d’une main de fer que ce président, que l’on raille de n’aller dans les sommets de chefs d’Etat que pour exhiber son élégance vestimentaire, régente son pays d’à peine quatre millions d’âmes. Pays où les citoyens, pour avoir droit à une portion de la colossale manne pétrolière, doivent militer, avec zèle, dans la périphérie immédiate de la galaxie du pouvoir.

Lorsqu’une suppression d’émission suscite un tollé continental et prend l’allure d’un scandale, c’est qu’elle semble avoir été effectuée, dans le cas d’espèce, sur ordre d’un vétéran de la Françafrique. Puis, il y a la période de l’incident, qui coïncide avec l’entrée en fonction de François Hollande, même si la décision a été prise dans les dernières semaines du « règne » de Sarkozy, par la direction que celui-ci a placée à la tête de RFI et France 24, direction contestée par le personnel.

Le nouveau locataire de l’Elysée est attendu, sur le continent, au sujet de ses promesses visant notamment à abolir les réseaux obscurs dans lesquels sont impliqués certains chefs d’Etat dont, justement, le Congolais Sassou Nguesso. On le voit, les Africains resteront, ces prochaines années, très sensibles, très attentifs aux paroles et gestes en provenance de Paris. RFI, un outil de la politique française, va-t-elle accompagner « le changement » promis ? Ou, continuera-t-elle de recevoir ses ordres depuis les palais à Brazzaville, Lomé, Abidjan, Libreville, Yaoundé … ? Eh oui, le changement, c’est maintenant. Et cela devrait commencer, à RFI, par le retour de la « chronique de Jean-Baptiste Placca »

Kodjo Epou

Washington DC

USA

La pétition: http://www.gopetition.com/petitions/pétititon-en-faveur-de-la-chronique-de-jean-baptiste-p.html

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Kodjo Epou est journaliste et chroniqueur pour différents médias, spécialisé sur l'Afrique et/où d'investigation. Il est aussi spécialiste de Relations Publiques
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