Révolution paléontologique au Maroc : le dinosaure cérapodan réécrit l’histoire


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Cerapodan dinosaure
Cerapodan dinosaure

Une équipe internationale de paléontologues a fait une découverte exceptionnelle dans les montagnes du Moyen Atlas marocain : un fossile de dinosaure cérapodan datant de 168 millions d’années, repoussant de près de deux millions d’années l’apparition connue de cette lignée. Cette trouvaille, publiée dans Royal Society Open Science, révolutionne notre compréhension de l’évolution des dinosaures herbivores.

Un fémur vieux de 168 millions d’année

C’est dans la formation El Mers III, une région déjà connue pour avoir livré le plus ancien ankylosaure du monde, que les chercheurs ont découvert un fémur fossilisé aux caractéristiques distinctives. L’analyse de cet os, notamment la présence d’une rainure caractéristique et d’une morphologie particulière du col fémoral, a permis aux scientifiques d’affirmer qu’il appartenait à un dinosaure cérapodan. Les tests de datation ont estimé son âge à environ 168 millions d’années, le situant en plein Moyen Jurassique, une période encore très méconnue dans l’histoire des dinosaures. Jusqu’à présent, le plus ancien fossile connu de cérapodan provenait d’Angleterre et était daté de 166 millions d’années.

« Cette découverte est véritablement extraordinaire, » explique le Dr. Nadia Khouri, paléontologue marocaine participant à l’étude. « Non seulement nous repoussons la chronologie connue des cérapodans, mais nous démontrons également que leur origine pourrait être africaine plutôt qu’européenne comme on le pensait jusqu’à présent. »

Des dinosaures méconnus aux origines mystérieuses

Les cérapodans font partie des ornithischiens, un groupe de dinosaures herbivores reconnaissables à leur bassin en forme d’oiseau. Ces animaux de petite taille se déplaçaient sur deux pattes, un peu à la manière des oiseaux modernes. Ils ont joué un rôle crucial dans l’évolution des herbivores du Jurassique et du Crétacé, se diversifiant en une multitude d’espèces adaptées à différents environnements.

Malgré leur présence abondante au Crétacé, les preuves de leur existence avant cette période étaient jusqu’ici rares. Ce fémur marocain constitue donc un élément clé pour comprendre l’émergence et la répartition géographique de ces dinosaures avant leur règne au Crétacé.

L’équipe de chercheurs estime que ce spécimen appartenait à un individu mesurant environ 1,5 mètre de long et pesant une cinquantaine de kilogrammes. Sa morphologie suggère qu’il s’agissait d’un animal agile, capable de se déplacer rapidement pour échapper aux prédateurs qui abondaient à cette époque.

Le Moyen Atlas, nouveau hotspot paléontologique mondial

La formation El Mers III s’impose de plus en plus comme un site de référence pour les paléontologues. En plus de ce cérapodan, les scientifiques y ont découvert certains des plus anciens fossiles d’ankylosaures et de stégosaures connus.

« Le Moyen Atlas marocain est en train de devenir l’un des gisements fossilifères les plus importants au monde pour comprendre l’évolution des dinosaures au Jurassique moyen, » souligne le professeur Carlos Martinez, co-auteur de l’étude. « Chaque campagne de fouilles nous révèle de nouveaux trésors qui comblent progressivement les zones d’ombre de notre connaissance. »

Cette nouvelle découverte suggère que d’autres fossiles de dinosaures encore inconnus pourraient être enfouis dans les couches rocheuses de cette région. La poursuite des fouilles pourrait ainsi permettre de combler les lacunes actuelles dans la connaissance de l’évolution des dinosaures au Jurassique moyen.

Un pas de plus dans la compréhension de l’évolution des dinosaures

Ce fémur constitue une pièce essentielle pour reconstituer l’arbre évolutif des cérapodans et mieux comprendre comment ces dinosaures ont prospéré à travers les âges. Il confirme notamment que leur diversification a commencé bien avant le Crétacé, renforçant l’idée que le Jurassique moyen était une période charnière pour l’évolution des dinosaures herbivores.

Avec cette découverte, le Maroc se positionne une fois de plus comme un acteur majeur de la recherche paléontologique mondiale. Ce pays, riche en fossiles exceptionnels, continue de livrer des trésors qui repoussent les limites de nos connaissances sur la préhistoire. Une chose est certaine : les montagnes du Moyen Atlas n’ont pas encore livré tous leurs secrets.

Les autorités marocaines ont déjà annoncé leur intention de renforcer la protection de ces sites fossilifères exceptionnels et d’investir davantage dans les infrastructures de recherche locales, afin de faciliter le travail des équipes internationales tout en développant l’expertise nationale en paléontologie.

Zainab Musa
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Zainab Musa est une journaliste collaborant avec afrik.com, spécialisée dans l'actualité politique, économique et sociale du Maghreb et de l'Afrique de l'Ouest. À travers ses enquêtes approfondies et ses analyses percutantes, elle met en lumière des sujets sensibles tels que la corruption, les tensions géopolitiques, les enjeux environnementaux et les défis de la transition énergétique. Ses articles traitent également des évolutions sociétales et culturelles, notamment à travers des reportages sur les figures influentes du Maroc et de l’Algérie. Son approche rigoureuse et son regard critique font d’elle une voix incontournable du journalisme africain francophone.
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