Revirement discret à Tunis


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Drapeau de la Tunisie
Drapeau de la Tunisie

Cinq jours après l’explosion survenue à la synagogue de la Ghriba, à Djerba, le gouvernement tunisien, qui avait longtemps soutenu la thèse de l’accident, amorce un prudent revirement. Une démarche de plus en plus inévitable compte tenu de la pression internationale et des avancées de l’enquête.

Le 11 avril dernier, un camion-citerne, chargé de bouteilles de gaz, explosait devant l’entrée de la synagogue de la Ghriba à Djerba, faisant, selon le dernier bilan, quinze morts et une trentaine de blessés. Parmi les victimes décédées, dix ressortissants allemands, un Français, un Franco-tunisien et trois Tunisiens, dont le chauffeur du camion. Le gouvernement tunisien, d’après les premiers éléments recueillis sur place, avait conclu sans tarder à l’accident. Une thèse rapidement devenue insoutenable aux vues des derniers développements d’une enquête, menée conjointement sur les sols tunisien et allemand. Ce qui amène Tunis à modifier prudemment sa position.

L’Agence Tunis Afrique Presse (TAP) indique aujourd’hui, mardi, que les autorités judiciaires tunisiennes poursuivent l’enquête en collaboration étroite avec les services de sûreté allemands et français et ne négligent aucune piste. Sans toutefois exclure l’hypothèse de l’accident. Elles cherchent en particulier à vérifier la source et l’authenticité d’un communiqué paru dans un journal arabe à Londres selon lequel le réseau Al Qaïda revendiquerait l’attentat. Parallèlement, après l’identification du chauffeur décédé dans l’explosion et la découverte de son lieu de résidence à Lyon, les autorités tunisiennes disent enquêter sur « les liens du suspect avec des éléments résidant en Allemagne » et évoquent pour la première fois « le contexte des actes dirigés contre les lieux de culte juif en Europe » pour justifier les nouvelles orientations de l’enquête. Un revirement de taille sous des allures discrètes.

Des indices concordants

Il faut dire que la position des autorités n’était pas tenable. Hier, le gouvernement allemand critiquait violemment l’enquête menée à Tunis, se demandant par exemple s’il était bien judicieux de commencer immédiatement les travaux de réfection de la synagogue. L’Allemagne exigeait une enquête digne de ce nom. Investigation qu’elle n’a d’ailleurs pas tardé à entreprendre elle-même, en interpellant mardi sur le sol allemand un homme soupçonné d’avoir eu une communication téléphonique avec le chauffeur du camion ou un éventuel copilote juste avant l’explosion. En outre, les témoignages des touristes allemands blessés lors de l’explosion, corroborés aujourd’hui par ceux de deux Françaises, assurent tous que le camion n’a pas foncé accidentellement dans le mur, mais était garé là dès l’arrivée des touristes. Autant d’indices qui orientent résolument les enquêteurs vers l’hypothèse d’un attentat.

Un discours rassurant

Ses récentes avancées de l’enquête ne sont pas pour arranger Tunis, à l’aube de sa saison touristique et quelques jours avant les célébrations annuelles de la Ghriba, qui attirent 8 000 juifs chaque année, et devraient avoir lieu du 25 avril au 2 mai. Mais à Tunis on se veut rassurant. Aucune réservation d’avion n’aurait été annulée pour les célébrations. Et on estime les mesures de sécurité mises en place pour ce genre de cérémonie suffisantes pour ne pas les renforcer. L’urgence pour Tunis est aussi de préserver son tourisme, pilier de l’économie du pays.

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