Rétro 2024 en Afrique : ANC, tensions Bénin-Niger, inondations, présence militaire française, affaire Baltasar, Katumbi et Kabila


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Rétro 2024
Rétro 2024

2024 vient de laisser la place à une nouvelle année, 2025. Au cours de l’année qui vient de s’achever, l’actualité politique et sociale du continent africain a été riche d’événements dont Afrik.com a sélectionné quelques-uns parmi les plus marquants dans ce deuxième article.

Parmi les faits les plus marquants en 2024 en Afrique, il y a la perte d’hégémonie de l’ANC en Afrique du Sud, les tensions entre le Bénin et le Niger, les inondations, la fin de la présence militaire au Sénégal et au Tchad, l’affaire Baltasar et l’alliance entre Kabila et Katumbi pour dire non au projet de révision de la Constitution soutenu par le Président Thisekedi.

L’ANC perd pour la première fois et forme un gouvernement d’union nationale

2024 a été marquée par un séisme politique en Afrique du Sud. En effet, pour la première fois depuis la fin de l’Apartheid, l’ANC perd la majorité absolue au Parlement et se voit obligé de former un gouvernement d’union nationale avec un parti comme l’Alliance démocratique (DA) foncièrement opposée à sa gouvernance. Avec 40% des sièges du Parlement, le parti de Nelson Mandela n’avait pas la majorité absolue pour continuer à gouverner seul.

Cyril Rampahosa a été certes réélu, mais est désormais contraint de coopérer l’Alliance démocratique. C’est la conséquence directe de la corruption qui était devenue un mal endémique dans le pays, surtout sous le mandat de Jacob Zuma finalement contraint à la démission en 2018. L’impact de cette grande corruption continue de se faire sentir dans le quotidien des Sud-Africains qui ont commencé à perdre la foi en ce parti qui avait porté la lutte contre le régime de l’Apartheid.

Tensions Bénin-Niger

En Afrique de l’ouest, la tension entre le Bénin et le Niger, extension de la tension entre la CEDEAO depuis le coup d’État du 26 juillet 2023. En mai, le Président Patrice Talon a décidé de bloquer l’embarquement du pétrole nigérien au Bénin pour protester contre le choix des autorités nigériennes de garder les frontières de leur pays fermées. Commence alors un véritable bras de fer entre les deux pays voisins, ponctué d’accusations de la part du Niger, démenties par le Bénin.

Il a fallu la visite des anciens Présidents béninois, Nicéphore Soglo et Boni Yayi au Niger pour qu’un dégel soit observé. En effet, quelques semaines après la mission de bons offices des anciens Présidents béninois auprès des autorités du Niger, une délégation nigérienne de haut niveau conduite par le général Mohamed Toumba, ministre de l’Intérieur a été reçue à Cotonou par le Président Patrice Talon. Peu de temps après, des ambassadeurs ont été nommés de part et d’autre. Malgré ces avancées, la frontière nigérienne est restée fermée. Avant le rebondissement intervenu il y a quelques jours avec la reprise des accusations contre le Bénin par le Niger.

Une année d’inondations en Afrique

2024 aura également été une année remarquable en raison des inondations qui ont touché plusieurs pays du continent. Du Maroc au Nigeria, en passant par le Mali, le Niger, le Tchad, le Soudan du Sud, les eaux, dans leur furie, ont dicté leur loi à tous ces pays emportant des vies, et détruisant des récoltes, des habitations. Dans le mois de septembre, le Tchad dénombrait pas moins de 250 morts et 1.5 million de sinistrés. Au Niger voisin, c’est au moins 273 morts et 700 000 sinistrés. Au Mali, l’état de catastrophe nationale a été déclaré alors que le pays dénombrait 18 140 ménages sinistrés et 42 morts, début septembre. Le pays s’est vu obligé de solliciter l’aide internationale face aux dégâts causés par les eaux.

Fin de la présence militaire française au Sénégal et au Tchad

Fin novembre, le nouveau Président sénégalais, Bassirou Diomaye Faye, annonce lors d’une interview accordée à des médias français, la fin de la présence militaire française au Sénégal. Une décision tombée d’un coup, mais qui ne devrait pas surprendre qui suivait l’actualité politique sénégalaise. Puisque l’annonce du Président Faye ne vient que confirmer une promesse de campagne du PASTEF. Avec cette décision sénégalaise, la France perd un allié de poids en Afrique de l’ouest. Toutefois, Bassirou Diomaye Faye a précisé que la France demeure un « partenaire privilégié » pour son pays. Dans tous les cas, une nouvelle ère s’ouvre dans les relations militaires franco-sénégalaises, la partie sénégalaise revendiquant haut et fort sa souveraineté.

Dans la même foulée, le Tchad de Mahamat Idriss Déby Itno a rompu les accords militaires le liant à la France, et demandé un départ rapide des soldats français de son territoire. En dépit du caractère surprenant de la décision tchadienne, la France a rapidement amorcé son repli en rétrocédant, le 26 décembre, une première base militaire – la base de Faya dans l’extrême nord désertique du pays – au Tchad.

À la suite de ses déboires dans les pays de l’AES, la France avait déjà décidé de reconfigurer sa présence militaire en Afrique. Dans ce sens, la base militaire française sera rendue à la Côte d’Ivoire à partir de janvier 2025. L’annonce a été faite mardi soir par le Président Alassane Ouattara à l’occasion de son discours de fin d’année. « Ainsi, le camp du 43e BIMA, le bataillon d’infanterie de marine de Port-Bouët, sera rétrocédé aux forces armées de Côte d’Ivoire dès ce mois de janvier 2025 », a déclaré le chef d’État ivoirien.

Affaire Baltasar et ses 400 coups

Du nom de l’Équato-Guinéen Baltasar Ebang Engonga, l’affaire Baltasar est un scandale sexuel ayant agité pendant plusieurs semaines la Guinée équatoriale et bien au-delà. Le principal protagoniste de l’affaire est le fils de Baltasar Engonga Edjo’o, président de la Commission de la CEMAC et proche du Présdent Teodoro Obiang Nguema Mbasogo. Haut responsable de l’administration de son pays, Baltasar Ebang Engonga dirigeait l’Agence nationale d’investigation financière. Et c’est dans son bureau qu’il a enregistré une bonne partie de ses ébats sexuels avec des dizaines de femmes parmi lesquelles des épouses et des filles de dignitaires du régime de Malabo.

Plus de 400 vidéos de ces relations intimes ont fuité sur les réseaux sociaux engendrant le scandale qui a dépassé les frontières de la Guinée équatoriale. Un scandale de plus pour un régime qui en multiplie. Les frasques et le train de vie ostentatoire du Vice-président du pays lui-même, incluant des achats de propriétés luxueuses et des dépenses extravagantes en Europe et aux États-Unis relèvent du secret de polichinelle.

Union des deux “K” contre Tshisekedi

L’actualité politique africaine a habitué à toutes sortes d’alliances entre acteurs politiques en fonction des intérêts du moment. Et l’année 2024 a confirmé cette règle en RDC entre deux vieux amis devenus par la force des choses adversaires politiques. Joseph Kabila et Moïse Katumbi autrefois très proches sont devenus de farouches adversaires politiques parce que le premier, au pouvoir, voulait modifier la Constitution, et le second s’y était farouchement opposé. Les deux hommes se sont retrouvés à Addis-Abeba pour sceller leur alliance anti-révision de la Constitution, en un mot, pour mener le même combat. Cette fois-ci, celui qui est au pouvoir et qui veut réviser la Constitution est Félix Tshisekedi. Lui qui, aux côtés de Katumbi, a mené, il y a tout juste quelques années, le combat contre cette même révision de la Constitution initiée par Joseph Kabila.

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Par Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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