Amnesty International a rendu, jeudi, son rapport sur la situation des droits humains en 2009 dans 159 pays et territoires. En Afrique, comme partout ailleurs, un constat s’impose : un trop grand nombre de responsables politiques impliqués dans des actes de violence parviennent à échapper à la justice. A l’heure où le président soudanais Omar El-Béchir, investi ce jeudi à la tête de son pays, fait l’objet d’un mandat d’arrêt pour crimes de guerre, la question de l’impunité des chefs d’Etat africains est au centre du débat.
En finir avec l’impunité. C’est l’objectif majeur d’Amnesty International qui s’attaque, dans son dernier rapport annuel sur la situation des droits humains, publié jeudi, à l’immunité judiciaire en Afrique. Alors que le soudanais Omar El-Béchir, investi ce jeudi à la présidence de son pays, est sous le coup d’un mandat d’arrêt émis par la Cour Pénale Internationale (CPI) pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, la question de l’impunité des responsables politiques africains n’a jamais été aussi sensible. Selon Claudio Cordone, secrétaire général par intérim d’Amnesty International, « quiconque commet un crime de guerre ou un crime contre l’humanité doit rendre compte de ses actes, en toute égalité, quelles que soient les forces, régulières ou autres, auxquelles il appartient ».
Une vision qui ne semble pas partagée par les principaux concernés. En effet, l’Union Africaine (UA) a fait part, en juillet, de son refus de coopérer avec la CPI pour le transfert à la Cour du président el Béchir. Parallèlement, «le contraste saisissant entre le discours sur les libertés fondamentales tenu par de nombreux dirigeants africains et l’absence de mesures concrètes visant à respecter, protéger et promouvoir ces droits » laisse l’ONG perplexe. Selon elle, l’année 2009 a été marquée en Afrique « par de nombreux autres exemples illustrant l’absence de volonté politique de veiller au respect de l’obligation de rendre des comptes, à quelque échelle que ce soit ».
Des résultats prometteurs
Des pays comme la Centrafrique, la République démocratique du Congo (RDC), la Somalie, le Soudan ou encore le Tchad, actuellement sous l’emprise de conflits armés, doivent également répondre d’atteintes aux droits humains. En RDC, ce sont des viols, des pillages, des enrôlements d’enfants ; en Somalie, des conflits entre différents groupes armés et les forces gouvernementales qui ont provoqué la mort de milliers de civils… Mais alors que les politiques et les forces armées sont les principaux responsables de ces crimes, ils n’ont été ni suspendus de leurs fonctions ni déférés devant la justice.
Malgré ce manque d’engouement de la part des pays africains, le rapport d’Amnesty International semble optimiste quant aux progrès de la justice internationale. « Il est aujourd’hui plus difficile pour un auteur d’atteintes aux droits humains de garantir sa propre impunité », explique Claudio Cordone. L’arrestation d’Ignace Murwanashyaka, président des Forces démocratiques de libération du Rwanda, impliqué dans la mort de milliers de civils, et de son adjoint, Straton Musoni, au mois de novembre en Allemagne, a constitué une avancée selon l’ONG, et « prouvé que la compétence universelle avait son utilité dans la lutte contre l’impunité ». Ce rapport est donc un appel à l’égalité et un rappel simple mais souvent oublié : nul n’est au dessus de la loi.