Regain de spiritualité au Maroc


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Drapeau du Maroc
Drapeau du Maroc

Le Maroc est une terre de haute spiritualité, où le rapport à l’invisible,  » l’enchantement du monde « , et l’existence d’une transcendance sont des convictions profondément ancrées dans toute la population : pour beaucoup l’univers est peuplé de djouns, d’esprits qu’il faut apprivoiser où simplement apaiser, calmer par des offrandes ou des témoignages de respect.

Le Maroc est une terre de haute spiritualité, où le rapport à l’invisible,  » l’enchantement du monde « , et l’existence d’une transcendance sont des convictions profondément ancrées dans toute la population : pour beaucoup l’univers est peuplé de djouns, d’esprits qu’il faut apprivoiser où simplement apaiser, calmer par des offrandes ou des témoignages de respect. Les progrès du rationalisme n’ont pas encore mis en déroute l’armée des ombres et leurs influences secrètes.

C’est sur ce terreau que l’on assiste parallèlement, depuis quelques années, à une recrudescence du phénomène des  » confréries « , Aïssawa, Gnawa, Jilalya, Rahaliya, Shadhiliya, Hamadcha, groupes d’initiés qui appartiennent au soufisme, donc à l’Islam, et qui ont hérité de rituels particuliers, parmi lesquels l’usage le plus spectaculaire est sans doute celui de la transe, dans lequel l’individu s’échappe à lui-même et puise la forme de dépasser ses inhibitions, ses psychoses, ses frustrations, en s’infligeant à lui-même, bien souvent, des châtiments corporels.

Le rôle joué par ces confréries au sein de la société marocaine ne doit pas être négligé : leur présence est souhaité dans certains territoires, comme les banlieues pauvres de Meknès où ils jouent le rôle de thérapeutes pour de nombreuses affections socio-psychanalytiques. De plus, les pratiques qu’elles perpétuent au sein de la modernité marocaine n’ont rien de commun avec les tentations islamistes radicales qui leur sont profondément étrangères. Aucun de ces rites de transe n’a pour finalité l’exorcisme d’une possession diabolique : au contraire, il s’agit de créer les conditions d’un approfondissement de la relation avec le monde invisible, et les forces incontrôlables de la nature et d’un sacré immanent à l’univers.

Parallèlement à cette paradoxale renaissance des confréries, où l’on pourrait lire un effet d’un croissant besoin de spiritualité que l’on observe dans d’autres régions du monde et qui n’épargne pas l’Occident, l’intérêt universitaire qu’elles suscitent va croissant : cinq ouvrages majeurs y ont été consacrés ses dernières années : depuis le livre de Tobie Nathan sur « L’influence qui guérit « , publié en 1996 aux Editions Odile Jacob, jusqu’à l’étude sur les Hamadcha de Vincent Crapanzano, traduite en janvier 2000 en Français, en passant par les travaux de Zakia Zouanat sur  » Ibn Mashish, Maître d’al Shadhili  » (1998), ceux de René Brunel,  » Essai sur la confrérie religieuse des Aissaouas au Maroc  » (1999) et de Bertrand Hell,  » Possession et chamanisme, les maîtres du désordre  » (1999).

Autant d’éclairages sur ce qui forme un pan méconnu de la spiritualité marocaine, et où réside pourtant probablement un part de l’âme du Maghreb. L’oeil que posent sur ces phénomènes les savants qui se penchent sur eux est exempt de jugements préconçus et de réserves faciles. Il tente de les comprendre et d’en faire saisir la logique propre. On ressort de ces lectures comme d’une véritable plongée dans le quotidien émotionnel et religieux d’un pays encore fortement marqué par ses traditions. Nul doute que l’on saisit mieux le Maroc véritable, quand a lu toutes ses pages. Le monde a plusieurs épaisseurs, chacune a ses règles et ses lois. Le hasard est nécessité…

Vincent Crapanzano, Les Hamadcha, Paris, Institut d’édition Sanofi-Synthelabo, 2000.

Tobie Nathan, L’influence qui guérit, Paris, Odile Jacob, 1996.

Zakia Zouanat, Ibn Mashish, Maître d’al Shadhili, Najah al jedida, Casablanca 1998.

René Brunel, Essai sur la confrérie religieuse des Aissaouas, Afrique-Orient éd. Casablanca 1998.

Bertrand Hell, Possession et chamanisme, les maîtres du désordre, Paris Flammarion, 1998.

Françoise Gründ,  » Gens de la transe  » La Quinzaine literraire n°784.

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