Le tribunal militaire du Nord-Kivu a rendu son verdict, ce lundi, dans l’affaire des six militaires jugés dans le cadre de la sanglante répression des manifestations du 30 août à Goma. Un verdict qui ne satisfait pas pleinement la société civile congolaise.
Tard dans la soirée du lundi 2 octobre 2023, le verdict du procès des militaires impliqués dans le massacre du 30 août à Goma est tombé. La plus lourde peine incombe au colonel Mike Mikombe, commandant de la Garde républicaine, l’unité soupçonnée d’avoir été au-devant de la tuerie. Il est radié de l’armée et condamné à mort. La peine de mort n’étant plus appliquée en RDC, depuis au moins 20 ans, elle sera commuée en prison à perpétuité. Mwati Musembua, Mbaya Mbaya Fabrice et Amita Bangala Daniel écopent chacun de 10 ans de prison ferme. Le lieutenant-colonel Dem Bawili Mbolitini Donatien et le soldat Kabamba Kabula Idriss sont eux autres acquittés.
La Voix des sans voix exige une enquête approfondie
Si elle ne cache pas sa satisfaction pour la tenue du procès, la société civile congolaise est restée quelque peu sur sa soif. Plusieurs composantes de cette société civile ont donné de la voix pour demander un approfondissement de l’enquête. C’est ce que soutient par exemple la Voix des sans voix (VSV) pour qui toutes les personnes impliquées dans ce drame doivent être démasquées et châtiées. VSV est foncièrement contre la culture de l’impunité. De même, l’organisation demande une indemnisation des victimes et leurs familles.
La société civile de Goma s’indigne
Même son de cloche chez la société civile de la ville de Goma. Satisfaction mitigée également. Ici, ils sont même allés jusqu’à désigner des personnes qui auraient dû comparaître aussi dans ce dossier. «La société civile n’est pas totalement satisfaite parce que, dans cette opération, il y avait par exemple des agents de l’ANR qui ont planifié cette opération. Il y avait aussi des agents de la 34e région militaire qui ont été dans la planification des opérations parce que l’opération se trouvait dans leur région militaire. Il y avait tout le monde. La mairie aussi. Et par-dessus tout, le commandant des opérations en province qui est le gouverneur, Constat Ndima. Mais malheureusement, toutes ces personnes ne sont pas inquiétées. Nous, nous pensons qu’il faut encore beaucoup plus de suivi. Pour que toutes ces personnes répondent de leurs actes», s’est indigné son président, Marrion Ngavho.
La Lucha dénonce un «procès fantaisiste»
Le mouvement Lutte pour le changement (Lucha) est allé dans le même sens, dénonçant un «procès fantaisiste». Ceci pour deux raisons : « La première raison, c’est que les personnes qui ont donné l’ordre de tirer sur les manifestants n’ont pas été inquiétées. La première d’entre elles, c’est l’ancien gouverneur, Constant Ndima qui, malgré les demandes de la société civile et de toutes les parties au procès, n’a pas été appelé, ne serait-ce que comme renseignant», observe Stewart Muhindo, un militant de la section de Goma de la Lucha. Et d’ajouter : «La deuxième raison, c’est le nombre insignifiant des condamnés pendant que les preuves factuelles montrent plusieurs responsables». Pour lui, il n’est pas question de faire croire aux Congolais que seuls six militaires ont abattu tous ces civils. Ce procès a juste été utilisé comme un moyen pour calmer la tension de la population.
Pour rappel, le 30 août 2023, des adeptes de la secte locale “Wazalendo” ont décidé de manifester à Goma contre la présence de la MONUSCO qu’ils jugent inutile. L’armée est intervenue pour réprimer la manifestation avec une rare violence. 58 personnes, dont un policier, ont perdu la vie, et 70 autres sont blessées.