Les événements s’accélèrent en République Démocratique du Congo où la Majorité présidentielle peine à endiguer la lame de fond qui semble s’être déclenchée avec le véritable tsunami politique que constitue le retour triomphal d’Etienne Tshisekedi à Kinshasa.
La fin de la semaine a été probablement décisive pour donner à la suite de l’histoire congolaise un tour nouveau : certes les deux camps ont successivement mobilisé leurs partisans, samedi 30 juillet pour la Majorité présidentielle, dimanche 31 juillet pour le rassemblement de l’opposition, mobilisé autour du grand retour sur la scène congolaise du Sphinx, Etienne Tshisekedi, 83 ans révolus, ancien Premier ministre du Zaïre et président de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS).
La démonstration de force de l’opposition a sans contexte dépassé celle des partis gouvernementaux, et elle met désormais le Président sortant, Joseph Kabila, dans une situation nouvelle pour lui : il va devoir s’exprimer clairement sur ses intentions, et la manière dont il entend conduire le pays vers des élections transparentes.
La donne a changé
Jusque là il avait suffi à Joseph Kabila de s’abriter derrière les atermoiements techniques de la Commission électorale Nationale dite indépendante, la CENI, qui repoussait les échéances du scrutin en arguant de difficultés matérielles d’organisation, et en prouvant surtout sa mauvaise volonté à créer les conditions dans lesquelles elle pourrait effectivement les organiser.
Mais la pression internationale est forte, à la fois aux Etats-Unis, qui n’ont jamais renoncé à s’impliquer en RDC, en Belgique, ancienne puissance coloniale, qui nourrit toujours des liens étroits avec Kinshasa, et jusqu’au sein de l’Union européenne où les opposants ont su trouver des relais.
Le fait que la population congolaise ait montré de manière explicite qu’elle était réellement partagée, et que le Rassemblement de l’opposition constituait une force très significative, change désormais la donne. Il sera difficile d’éviter un dialogue national équilibré, donnant à chacun sa place, et conduisant à un compromis réunissant l’ensemble des forces en présence.
Le travail du facilitateur de l’Union africaine, soupçonné de pencher pour Joseph Kabila, ou celui de Denis Sassou N’Guesso, président de la République du Congo, avant tout désireux d’éviter que son grand voisin sombre dans la violence, va devoir prendre en compte ce nouveau rapport de forces.
La personnalité très forte et centrale d’Etienne Tshisekedi, l’intégrité des prises de position qu’il incarne, l’autorité qu’il exerce sur le Rassemblement de l’opposition, tout cela en fait un acteur désormais incontournable de la médiation qui va commencer. Reste que son âge et son état de santé ne lui permettent sans doute pas de prétendre incarner le renouveau ou l’avenir, dans un pays jeune et dont les attentes modernes doivent trouver à s’incarner dans de nouvelles figures. Nul doute que le populaire Moïse Katumbi, désormais allié à Etienne Tshisekedi, aura sa partie à jouer, malgré les embûches diverses, judiciaires ou autres, que le pouvoir actuel a essayé de mettre en travers de sa route.
En clair, les jeux sont désormais ouverts. Les prochaines semaines seront décisives.