RDC : Polémiques diplomatiques autour des massacres des réfugiés congolais à Gatumba


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Des horreurs dans le camp qui abritait des réfugiés congolais, à Gatumba, province de Chibitoke, au Burundi. Près de 160 morts et autant de blessés. Qui a fait le coup et pourquoi ? Les questions ne trouvent pas de réponses à part celles, stéréotypées, des hommes politiques. Sans gant, Kigali et Bujumbura accusent Kinshasa qui exige une enquête internationale

De notre correspondant Octave Kambale Juakali

Les victimes des massacres perpétrés contre des réfugiés congolais dans le camp de Gatumba, non loin de Bujumbura, ont été enterrées ce mercredi, sur le lieu où ont été commises les atrocités. Près de 160 personnes ont trouvé la mort, spécialement les femmes et les enfants. Elles auront commis la seule faute d’être des Tutsi. L’opération qui aurait duré au plus une heure, a visiblement été menée par des professionnels qui n’ont laissé aucune trace qui pouvait les identifier. Ce qui permet une large manœuvre pour une exploitation politicienne. Kinshasa, Kigali et Bujumbura, les capitales de trois pays concernés dans la crise, s’accusent mutuellement et se rejettent les responsabilités. A Kigali, on crie à l’exécution d’un plan de génocide contre la communauté tutsi, à Bujumbura on dénonce la violation du territoire par la RDC pendant qu’à Kinshasa, on exige la mise en place d’une enquête internationale qui établirait les responsabilités.

« Depuis les événements de Bukavu de mai et juin 2004, les Congolais ont l’impression de jouer des rôles dans une pièce dont la scène se passe ailleurs, estime M. Richard Mwamba, député congolais. L’insurrection du colonel Mutebusi, à Bukavu avait comme prétexte, une tentative d’extermination des Tutsi-banyamulenge à Bukavu alors que la Monuc (Mission des Observateurs des Nations Unies au Congo) comme Human Rights Watch avaient établi qu’il n’y avait eu aucune trace, ni de génocide, ni d’affrontements entre communautés. Dans la nuit du vendredi, 13 août au samedi 15 août dernier, un commando a opéré tranquillement sur le camp des réfugiés à Gatumba qui se trouve entre deux garnisons militaires, tuant des personnes et incendiant des maisons ». Richard Mwamba trouve que l’enchaînement de tous ces événements n’est pas normal et n’est pas dû au hasard.

Les Banyamulenge au centre des tensions

Sur place, à Uvira, une ville sur la rive congolaise, en face de Bujumbura, la capitale du Burundi, on s’étonne du fait que le président du Burundi, M. Domitien Ndayizeye ait proclamé, sans aucune précaution diplomatique, que le commando venait du Congo et qu’il ait fermé sa frontière : « Notre pays a été attaqué et notre frontière violée par des éléments venant de la RDC pour massacrer des civils congolais qui avaient demandé asile ». Le FNL (Front National de Libération), en fait le fer de lance de lutte des Hutu contre les Tutsi a eu beau revendiquer la paternité des massacres, la revendication n’a pas été prise en compte par le gouvernement du Burundi. On s’étonne également que le président du Rwanda, depuis Pointe-Noire où il assistait aux cérémonies marquant les 44 ans d’indépendance du Congo-Brazzaville, ait menacé de ramener ses troupes au Congo pour s’occuper personnellement des milices Interahamwe. Pour Dunia Malinga, un activiste des droits de l’Homme, habitant la ville d’Uvira, le Burundi et le Rwanda se montrent très inquiets du renforcement, par Kinshasa, de troupes militaires sur la frontière avec les deux pays. Depuis les événements de Bukavu, les frontières Est de la RDC ont en effet été sensiblement renforcées militairement. Alors de trois choses l’une : ou l’incident de Gatumba a été délibérément créé par le Rwanda et le Burundi, histoire de mettre un accent sur le renforcement trop remarqué de militaires congolais sur la frontière, ou il faut accepter la thèse du FNL qui dit avoir attaqué le camp des réfugiés parce que des militaires burundais tutsi s’y étaient réfugiés eux-mêmes fuyant les combattant FNL. Ou il faut considérer une éventuelle responsabilité directe ou indirecte de l’Etat congolais dans le massacre de mercredi dernier. Mais quel intérêt pour Kinshasa d’attaquer un camp de réfugiés ?

Ce qui est certain est que le drame de Gatumba va sensiblement détériorer les délicates et sensibles relations de voisinage que la Belgique tente de renouer entre les trois pays, le Rwanda, le Burundi et la RDC. Sur le plan national, c’est tout le processus de paix qui risque d’en souffrir. La problématique des Banyamulenge a toujours pour toile de fond la question de la douloureuse nationalité qui aurait provoqué les deux dernières guerres. Curieusement pendant qu’elle se discute au parlement, huit députés banyamulenge ont décidé de suspendre leur participation aux débats. C’est sûrement ce genre de comportement qui a poussé le CIAT (le Comité International d’Accompagnement de la Transition) comprenant les ambassadeurs des pays siégeant au Conseil de Sécurité des Nations Unies, dirigé par le patron de la Monuc, à tirer sur la sonnette d’alarme, le 15 août dernier, pour dénoncer des tentatives de faire échouer la transition.

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