La RDC est plus que jamais sous les feux de la rampe. Insécurité dans l’Est du pays, avancée des rebelles du M23 sur le terrain, visite du pape François, les sujets de discussion sur la RDC sont sans doute ce qui manque le moins actuellement. Dans ce contexte, Afrik.com a recueilli l’avis d’un militant congolais sur ces sujets brûlants de l’actualité du pays. Martin Mololo Nsenda, activiste des mouvements citoyens congolais, s’est prêté à cet exercice de questions-réponses. Entretien.
Afrik.com : Jeudi dernier, on a assisté à la prise de contrôle des rebelles sur Kitshanga. Comment expliquer cette avancée du M23 face aux FARDC sur le terrain ?
Martin Milolo Nsenda : Les avancées du M23 s’expliquent par trois faits majeurs. Il y a le soutien de l’armée rwandaise (la Rwanda Defense Force, RDF), la désorganisation de l’armée congolaise et l’hypocrisie des mécanismes ad hoc de résolution de ce conflit (les processus de Nairobi et de Luanda). Mais la principale raison qui explique les avancées du M23 est l’appui de l’armée rwandaise ; on peut même dire que c’est l’armée rwandaise qui combat sous le nom du M23. Car le Président rwandais, Paul Kagame, est personnellement dans ce conflit. Comme en témoignent ses différentes déclarations et plusieurs rapports des experts de l’ONU.
À vous entendre, on se rend bien compte que le soutien du Rwanda n’est pas le seul motif qui justifie ce qu’on pourrait assimiler à la supériorité du M23 face aux FARDC sur le terrain.
Comme je l’ai mentionné, il y a d’autres faits qui justifient la montée en puissance du M23 en dehors du soutien rwandais. C’est notamment le cas des faiblesses internes des FARDC. Parmi ces faiblesses, nous pouvons mentionner la traîtrise et l’affairisme de certains officiers supérieurs, les détournements des fonds destinés à l’armée qui conduisent au manque de matériels militaires. Il y a également ce qu’on peut qualifier d’hypocrisie des mécanismes ad hoc de résolution de ce conflit, à savoir le processus de Luanda et celui de Nairobi. Je l’ai évoqué tantôt, mais il faut bien insister là-dessus.
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Toutes les recommandations de ces deux mécanismes à l’égard du Rwanda et du M23 ont été violées par ces derniers sans qu’aucune sanction ne soit prise à leur encontre. Une force militaire de la communauté des États de l’Est est même présente dans la province du Nord-Kivu au moment même où nous parlons. Mais, elle ne fait rien face aux avancées du M23 et des RDF. Par ailleurs, il faut aussi souligner l’inaction de la MONUSCO sur place depuis plus de 20 ans. Son porte-parole avait même déclaré que le M23 était plus équipé et avait des armes modernes qui équivalaient celles d’une armée conventionnelle. Tous ces éléments réunis expliquent la supériorité du M23 sur les FARDC.
À l’allure où vont les choses, ne craignez-vous pas que les rebelles finissent par prendre le contrôle de tout le pays ?
Je ne crois pas, car la détermination du peuple congolais est désormais plus forte que jamais. Le commanditaire de cette rébellion, le Président Kagame du Rwanda, a été clairement désigné. Le monde ne continuera donc pas à fermer indéfiniment les yeux. Le M23 pourrait prendre la ville de Goma comme il l’avait fait en 2013 (même si le contexte n’est pas le même). Mais ne prendra jamais le contrôle du Congo et même pas du Nord-Kivu ; ce sera une joie courte, devant la détermination du peuple congolais.
Alors que votre pays est en pleine crise sécuritaire, il vient d’accueillir le pape. Que vous inspire cette visite du premier responsable de l’église catholique dans le plus grand pays catholique du continent ?
C’est une visite de réconfort pour les victimes des différents conflits à l’Est. C’est aussi une façon de mettre les projecteurs sur le génocide oublié qui se commet dans ce pays.
Avez-vous des attentes spéciales de cette visite ?
Oui. En dehors de la prière, nous demandons un soutien diplomatique du pape pour obtenir les sanctions des auteurs des crimes commis ici et pour que la guerre cesse.
Auriez-vous souhaité voir le souverain pontife à Goma ?
Oui, c’est là où on a plus besoin de lui, sur le théâtre des affrontements. Mais hélas, le contexte ne le permet pas. Toutefois, il recevra, ici à Kinshasa, une délégation des victimes du Nord-Kivu.
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