Ross Mountain a suivi de près le processus électoral en RDC et est chargé, à travers le Pnud, de mobiliser les fonds de la communauté internationale pour soutenir les élections municipales et locales. Entretien
Notre correspondant en RDC
Ayant plus de vingt-cinq ans d’expérience aux Nations-Unies, Ross Mountain, de nationalité Néo Zélandaise, est Représentant spécial adjoint du Secrétaire général adjoint de l’Onu en RDC. Il est également Coordinateur résident du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et Coordinateur humanitaire en RDC. Avant sa nomination à la Mission de l’Onu en Rdc (Monuc), M. Mountain a assumé les mêmes fonctions en Iraq. Il était également en poste dans différentes agences de l’Onu, mais également des missions de l’Onu, notamment à Genève, au Liban, à Haïti, aux Caraïbes, au Libéria, en Afghanistan, etc.
Afrik.com : Quelle est la situation humanitaire actuelle dans le pays en général ?
Ross Mountain : La situation reste toujours très fragile et dans certains endroits elle est mauvaise. On a des chiffres pour le pays qui datent de 2 ans et qui indiquaient que 1.200 Congolais meurent chaque jour pour des raisons différentes. La plupart par la violence, d’autres pour des raisons de santé, de maladies, d’eau non potable, de malnutrition, du Sida, etc. Mais, on espère qu’avec les efforts qui se font depuis deux ans, la situation s’améliore. Il y une enquête en cours pour vérifier cette hypothèse. Nous savons aussi que 1,5 millions de déplacés sont rentrés chez eux. Mais il reste encore plus d’un million en dehors de leurs résidences. C’est tout de même une avancée significative. Au Katanga, par exemple, il y avait 130 000 déplacés, beaucoup de progrès ont été accomplis par la communauté internationale et les partenaires congolais et cela a donné un impact positif. Mais quand les combats continuent, malheureusement, ce sont toujours les plus vulnérables qui souffrent.
Afrik.com : Dernièrement, le Pnud a relancé le processus DDR. Qui est concerné par ce programme et quels sont les chiffres dont vous disposez des ex-combattants et des moyens mis en œuvre pour cette fin ?
Ross Mountain : Nous avons lancé un nouveau programme en Ituri. Mais il y a déjà le programme national DDR, un programme du gouvernement soutenu par pas mal de bailleurs à travers la Banque mondiale, qui a permis de démobiliser plus de 100 mille ex-combattants. Le programme de l’Ituri est indispensable à nos yeux, car nous pensons qu’il permettra à ce district de revenir au calme et relancer l’économie pour le bien de la population. Le nouveau programme que nous venons de lancer avec le gouvernement vise à la réinsertion des ex-combattants. C’est une bonne chose de les appeler à sortir de la brousse et déposer leurs armes, mais c’est tout à fait autre chose pour eux de se réconcilier avec les communautés auxquelles ils ont souvent causé du tort. Ils faut qu’ils soient pour ces communautés une partie de la solution et non un nouveau problème. C’est cela notre préoccupation pour l’Ituri. Ce n’est pas une troisième phase comme on le dit souvent, mais c’est la dernière phase. On doit finir là-bas pour s’engager dans le progrès dont la population a besoin, et elle le mérite. Nous sommes satisfait de voir un groupe de bailleurs qui a accepté de nous soutenir, notamment, les Etats-Unis, la Suède, l’Irlande, la Norvège et le Japon. L’aspect particulier de ce programme est qu’il vise l’intégration des ex-combattants dans leurs communautés. A cet effet, ces communautés doivent également être bénéficiaires de ce programme.
Afrik.com : La communauté internationale, à travers le Pnud, a accompagné le processus électoral en Rdc avec les élections présidentielles, législatives et sénatoriales. Est-ce que le même appui et les mêmes moyens sont aussi disponibles pour les élections locales et municipales ?
Ross Mountain : Le processus électoral, organisé par la CEI avec à sa tête l’abbé Malumalu demeure jusqu’à présent une grande victoire pour le peuple congolais. C’était un travail remarquable et nous en sommes fiers. En soutenant la CEI, nous avons pu lancer la plus
grande opération de soutien électoral jamais accompli jusque là par l’Onu. On est parvenu à des résultats presque inespérés par beaucoup de gens à l’extérieur du pays. Il faut absolument enraciner le système démocratique par des élections locales et municipales. C’est toujours un grand défi à relever par tous. Nous avons eu près de 385 circonscriptions pour les élections provinciales. Maintenant il nous faut penser à 6.037 circonscriptions pour les locales. Hier (mercredi 11 juillet), on s’est mis d’accord avec la CEI pour chercher l’appui qu’il faut. Nous avons besoin de 120 millions de dollars. Nous allons chercher des bailleurs à travers le Pnud, mais aussi nous devons dégager également un montant assez significatif à travers le budget de la Monuc, pour financer les postes d’appui et pour la logistique. Il faut encore travailler, l’argent n’est pas acquis. Le gouvernement s’est engagé à donner sa part, mais on est bien lancé. Je vous confirme certainement l’appui, mais je ne vous confirme pas du tout qu’on a l’argent en main. Il y a certes certains bailleurs qui sont prêts à s’engager aussi.
Afrik.com : Parlons du nouveau mandat de la Monuc, qui a entre autres missions la bonne gouvernance. Comment allez-vous appuyer la Rdc dans ce domaine précis ?
Ross Mountain : Le nouveau mandat de la Monuc renferme trois volets. La première, c’est d’aider le gouvernement à rétablir l’ordre et la sécurité. Nous devons parvenir à avoir des éléments de force de l’ordre qui sécurisent la population et non le contraire. Le deuxième aspect consiste à soutenir l’établissement de la démocratie, notamment instaurer et consolider l’autorité de l’Etat à travers le pays. C’est dans ce volet qu’on trouve la question de gouvernance. Il s’agit précisément d’un appui aux reformes annoncés par le gouvernement, notamment le programme d’actions prioritaires (PAP) mis en place par le gouvernement en concertation avec la communauté internationale qui cherche à appuyer le gouvernement dans la recherche des solutions urgentes aux problèmes qu touchent la plus grande partie de la population congolaise, notamment les problèmes d’assainissement, l’eau, l’électricité, le Vih/sida, l’emploi et bien sûr la mauvaise administration. Le Pnud avec l’appui des bailleurs va aider à soutenir la reforme de l’armée, de la police, la justice, l’administration, l’appui au parlement et à la société civile, au programme de la décentralisation, mais aussi la lutte contre la corruption. Cela pour que les richesses de ce grand pays soient utilisées au bénéfice de la population tout entière.