RDC : le Parlement valide la prolongation de l’état de siège


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Un convoi de la MONUSCO
Un convoi de la MONUSCO

Ce samedi, les deux chambres du Parlement de la RDC ont validé une nouvelle prorogation de l’état de siège dans les deux provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri. Dans un contexte où la mesure est toujours fortement décriée.

Les deux chambres du Parlement congolais ont tenu une séance plénière, ce samedi, avec pour sujet principal la question de l’état de siège. À l’issue des débats, l’Assemblée nationale puis le Sénat ont tout simplement donné un blanc-seing au gouvernement pour continuer avec cette mesure d’exception.

Une prolongation dans un contexte d’allègement

La décision des parlementaires congolais intervient dans un contexte particulier. Plus de deux ans après l’instauration de l’état de siège, le Président Félix Tshisekedi a, dans une adresse à la nation, jeudi dernier, annoncé un «allègement progressif et graduel de l’état de siège». «J’ai opté (…) pour la mise en œuvre d’un dispositif transitoire graduel au terme duquel cette situation exceptionnelle devra connaître sa fin», a déclaré le chef de l’État congolais. Selon le dirigeant, l’autorité civile sera progressivement rétablie, les restrictions (couvre-feu, interdiction de manifestations pacifiques et de réunions, etc.) seront levées.

Cette décision de Félix Tshisekedi ne rencontre pas l’adhésion de l’opposition qui a toujours demandé la levée pure et simple de l’état de siège. Après la déclaration du président de la République, ils ont été encore nombreux à monter au créneau pour exprimer leur désapprobation. «D’abord, il faut signaler que cet allègement de l’état de siège est illégal. Aucun article de la Constitution n’en parle. Aucune loi n’en parle. Quand c’était l’état de siège, il y avait des prorogations qui étaient faites par (les parlementaires). On va maintenant proroger sur la base de quoi ?», s’interroge Espoir Ngalukiye, un acteur politique du Nord-Kivu. «L’état de siège dans son ensemble, poursuit-il, c’est une solution qui a été rejetée par la population. Le chef de l’État devrait écouter les résultats de la table ronde : l’état de siège doit être levé totalement».

La sénatrice Francine Muyumba a adopté une position similaire. «Avec cet allègement, le parlement prorogera quoi, sur la base de quoi ? La Constitution ainsi que les lois du pays continuent à être violées systématiquement, et cela sans gêne en privant les citoyens leurs droits, car l’état de siège est une mesure exceptionnelle qui ne doit durer longtemps. Il faut écouter nos concitoyens du Nord-Kivu et de l’Ituri qui ne veulent plus de cet état de siège qui a déjà montré ses limites. Il doit donc être levé totalement», tranche-t-elle.

Un bilan globalement négatif

Instauré en mai 2021 pour ramener la paix et la sécurité dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri, l’état de siège n’a pas eu les résultats escomptés. Les deux provinces sont toujours à la merci des groupes armés dont l’un des plus redoutables demeure le M23 qui occupe certaines portions de la province du Nord-Kivu. Même Amnesty International a dressé un bilan catastrophique de la mesure à l’occasion du deuxième anniversaire de son instauration. Selon l’ONG, «la situation sécuritaire dans les deux provinces s’est considérablement détériorée», avec «une recrudescence des attaques contre les civils». Pour elle, l’état de siège a également «aggravé la situation des droits humains», avec des arrestations arbitraires. Par conséquent, Amnesty International recommande au Président congolais de « lever cette mesure répressive, sans délai».

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Par Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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