
La situation continue de se détériorer dans la province du Sud-Kivu, à l’Est de la République Démocratique du Congo. Les combattants de l’AFC/M23, après avoir pris le contrôle de la cité de Kamanyola, située à une cinquantaine de kilomètres de Bukavu, avancent désormais en direction d’Uvira, une ville stratégique sur les rives du lac Tanganyika. Cette progression s’accompagne d’une série de violences, de pillages et d’affrontements sporadiques qui plongent les habitants dans une grande inquiétude.
Le mouvement des combattants de l’AFC/M23, qui a déjà pris le contrôle de Kamanyola et de Luvungi, poursuit sa progression vers le sud, empruntant la route nationale N°5. Sur leur chemin, plusieurs localités clés, dont Sange et Kiliba, sont traversées. Ces deux zones sont traditionnellement considérées comme des bastions de milices pro-gouvernementales, les Wazalendo. Selon des sources locales, des militaires burundais ont été aperçus dans la région, renforçant l’instabilité qui règne déjà dans cette partie de la RDC.
Une avancée militaire inquiétante, pillages et terreur à Uvira
À Uvira, la situation s’aggrave. Des tirs sporadiques ont éclaté dès le matin du 19 février, paralysant toute activité dans la ville. Des affrontements ont opposé les militaires congolais aux miliciens Wazalendo qui tentaient de repousser l’avance des insurgés. Les échanges de coups de feu ont duré plusieurs heures, ce qui a provoqué une panique généralisée. « Des tirs ont éclaté dans toute la ville, et des affrontements ont persisté jusqu’à la fin de l’après-midi », explique un témoin sur place. La violence s’est intensifiée lorsque les portes de la prison centrale d’Uvira ont été forcées, entraînant l’évasion de centaines de détenus.
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Les scènes de pillages se sont rapidement multipliées dans la ville d’Uvira. Des hommes armés, souvent accompagnés de soldats congolais, ont envahi les habitations et les commerces, volant de l’argent, des téléphones et autres biens de valeur. « Les pillards passaient de maison en maison, exigeant des biens sous la menace de leurs armes. Ceux qui n’avaient rien à offrir étaient directement menacés de tirs », rapporte un habitant. Cette situation a semé un chaos absolu, forçant une grande partie de la population à fuir.
Des hommes armés fuyant Bukavu avant l’arrivée des M23
Mercredi soir, un semblant de calme est revenu, bien que la ville restait désertée par une majorité de ses habitants. Beaucoup ont cherché refuge au Burundi voisin ou ont pris la mer pour rejoindre Kalémie, plus au nord, en traversant le lac Tanganyika. Mais même ce jeudi matin, les scènes de pillages continuaient. « J’ai vu des hommes armés, qui avaient fui Bukavu avant l’arrivée des M23, forcer les portes et piller les maisons », témoigne un autre résident. Les commerces et maisons ont été vidés de leurs ressources, notamment des provisions alimentaires comme du riz et des haricots.
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Dans les quartiers périphériques, la vie a repris timidement. Quelques habitants sont sortis pour acheter de la nourriture ou de l’eau, mais la circulation reste quasi inexistante, témoignant de l’ampleur de la peur qui continue de régner. Les autorités congolaises restent pour l’heure silencieuses, et la situation humanitaire devient chaque jour plus précaire. Les équipes de Médecins Sans Frontières (MSF) présentes dans la région lancent un appel urgent pour la protection des civils. Les hôpitaux locaux, déjà saturés, continuent de recevoir des blessés, pour la plupart des civils pris au piège des combats.
Une crise humanitaire grandissante
« Nous avons dû réduire nos effectifs en raison de l’insécurité, mais nous continuons d’envoyer du matériel médical pour soigner les blessés », explique un responsable de MSF. Cependant, cette aide reste largement insuffisante face à l’ampleur de la crise. Les civils continuent de fuir vers les deux ports d’Uvira, mais même les trajets en bateau deviennent de plus en plus dangereux. Des témoins ont rapporté que des hommes armés ont attaqué une embarcation en fuite, ce qui rendu la traversée du lac Tanganyika particulièrement risquée. La situation est désormais très tendue, et de nombreux habitants se retrouvent dans des conditions de plus en plus précaires.