RDC : Félix Tshisekedi face à Corneille Nangaa, vers un tournant historique à Luanda


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Félix Tshisekedi et Corneille Nangaa

Les négociations directes entre le gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC) et la rébellion du M23 se tiendront le 18 mars 2025 en Angola. Ces discussions, placées sous l’égide du président angolais João Lourenço, suscitent à la fois espoir et prudence dans un contexte où la stabilité de l’est du pays reste un enjeu majeur.

Le dialogue direct entre les autorités de Kinshasa et le M23 semble désormais acquis. À quelques heures de l’ouverture des discussions prévues pour débuter le 18 mars à Luanda, des voix s’élèvent. Vital Kamerhe, le président de l’Assemblée nationale, a profité de la rentrée parlementaire de la session de mars pour lancer un appel solennel à Félix Tshisekedi. Dans le même temps, la société civile de Beni-Butembo et Lubero dans le Nord-Kivu se prononce et fixe une ligne rouge à ne pas dépasser à l’occasion de ces négociations.

Un appel à la paix et à la résilience

Lors de la session parlementaire du 15 mars 2025, le président de l’Assemblée nationale, Vital Kamerhe, a lancé un message fort en faveur de la paix. Dans un discours teinté de spiritualité, références bibliques à l’appui, et d’encouragement, il a exhorté le président de la République, Félix Tshisekedi, à faire preuve de fermeté et de sagesse dans la conduite des pourparlers.

« Que le Saint-Esprit vous inspire, Monsieur le Président, et vous guide en ce temps particulier, pour que s’accomplisse le miracle : le bâton de Moïse, afin que les obstacles les plus coriaces soient brisés et que les voies les plus inattendues soient ouvertes vers la paix, le progrès et la prospérité de notre pays, de son peuple et de l’ensemble de l’Afrique », a déclaré Vital Kamerhe. Aux populations de l’est qui sont les premières victimes de la guerre, le président de l’Assemblée nationale, lui-même ressortissant de la province du Sud-Kivu, n’a pas manqué d’adresser un message d’espoir : « Je voulais terminer mon adresse par une note d’espoir et d’interpellation, en disant à nos populations de l’est, actuellement en proie à des violences de tout genre, quelle que soit la durée de la guerre, la victoire appartient à la paix, et elle sera restaurée ».

La société civile pose ses conditions

Cependant, la société civile des territoires de Beni-Butembo et Lubero (Nord-Kivu) a exprimé ses réserves et fixé des limites claires à ne pas franchir dans le cadre des discussions. Richard Kirimba, vice-président de la société civile de Beni, aurait, pour sa part, préféré l’option militaire pour régler le problème sécuritaire à l’est du pays.

Mais, puisque des négociations sont en passe d’être ouvertes, il insiste pour que ces négociations ne fragilisent pas la souveraineté ou l’intégrité territoriale de la RDC. « Il serait important de se fixer des limites à ne pas dépasser : ne pas ouvrir la brèche à la déstabilisation de l’ordre constitutionnel chèrement acquis en RDC ; s’abstenir de signer des engagements exposant davantage à la violation de l’intégrité et de la souveraineté nationale de la RDC ; veiller à ce que le processus de dialogue ou de négociation ne soit pas un prétexte ou une justification pour consacrer l’impunité en blanchissant les crimes commis », a-t-il déclaré.

Par ailleurs, les représentants de la société civile mettent en garde contre une éventuelle introduction de nouveaux éléments étrangers dans l’armée congolaise en dehors des processus légaux, ainsi que contre toute forme d’installation de populations non congolaises sur le territoire national.

Un tournant décisif pour la RDC

Alors que la communauté internationale observe de près ces négociations, la RDC se trouve à un moment charnière de son histoire. La position du Rwanda, accusé de soutenir le M23, demeure un facteur clé, tout comme la volonté des différents acteurs d’aboutir à une paix durable.

Le gouvernement congolais devra jongler entre les aspirations des populations locales, les exigences diplomatiques et les contraintes militaires pour trouver une issue favorable à cette crise. Une chose est certaine : la stabilité et l’avenir de l’est de la RDC dépendront largement des décisions qui seront prises dans les prochains jours à Luanda. Samedi déjà, le médiateur, le Président angolais, a invité les belligérants à observer une trêve à partir du 16 mars à minuit. Ceci pour faciliter les discussions qui s’ouvriront le 18 mars.

« Le cessez-le-feu devrait inclure toutes les actions hostiles possibles contre la population civile et la conquête de nouvelles positions dans la zone de conflit, dans l’espoir que ces initiatives et d’autres mèneront à la création d’un climat de détente qui favorisera le début des pourparlers de paix qui auront lieu prochainement à Luanda, entre la République démocratique du Congo et le M23 », lit-on dans une note publiée, samedi, par la Présidence angolaise.

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Par Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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