RDC : des préservatifs pour cirer les chaussures


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Dans la province congolaise du Bandundu, une partie de la population utilise le lubrifiant des préservatifs pour donner un coup d’éclat à leurs chaussures. Cette solution de fortune, destinée à pallier la cherté du cirage, inquiète les acteurs de la lutte contre le VIH/sida.

A Bandundu-ville, chef-lieu de la province du même nom, à près de 400 km au nord-est de Kinshasa, les organisations de lutte contre le VIH/SIDA et les infections sexuellement transmissibles (IST) sont très inquiètes du fait que de nombreux habitants utilisent le lubrifiant des préservatifs, souvent distribués gratuitement, pour donner de l’éclat à leurs chaussures, rapporte l’agence de presse Syfia Grands Lacs.

« Réduire l’usage du condom à un simple cirage est un acte d’immaturité flagrante et un sabotage », proteste le chef d’antenne du Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP) au Bandundu, le Dr Philémon Sikulisimwa.

Un père de famille, Luc Mukwakumi, s’en offusque et estime qu’utiliser ce produit à cette fin est « un acte criminel, une honte ».

Pour mettre un terme à cette pratique, considérée comme un « détournement abusif » du préservatif, des actions timides sont menées, notamment auprès des groupes cibles jugés très vulnérables en matière de propagation du SIDA.

« Nous avons commencé à sensibiliser les policiers et les militaires », indique Séverin Mitinimi du bureau local du Programme national multisectoriel de lutte contre le SIDA (PNMLS).

En fait, cette étonnante pratique d’utiliser le lubrifiant des condoms comme cirage résulte de l’imagination d’un groupe de policiers et militaires de la ville.

Tout a débuté en 2007, lorsqu’ils étaient internés pour une formation dans un camp militaire de la place.

« N’ayant pas de sous pour s’acheter une boîte de cirage noir, nous avons commencé à utiliser le lubrifiant des préservatifs pour cirer nos bottes », explique un jeune militaire.

« La découverte s’est alors rapidement propagée dans la ville, où la pratique a suscité beaucoup de curiosité auprès du reste de la population civile.

Le préservatif est vendu à 50 FC, soit 0,09 dollar, pour trois pièces sur le marché local, c’est-à-dire moins cher qu’une boîte de cirage vendue 350 FC, soit 0,6 dollar.

« C’est la pauvreté qui pousse les gens à utiliser ce lubrifiant comme cirage, surtout qu’on distribue gratuitement les préservatifs », explique Bienvenu Mayembe, qui en fait lui-même usage.

Un jeune du quartier Ngamilele, Christian Bakandowa, fait, par ailleurs, remarquer qu’avec ce lubrifiant, il ne se pose pas de question de couleur.

Pour lutter contre la propagation du VIH/SIDA et des IST à Bandundu-ville, le PNMLS a installé, à divers endroits publics de la ville, des distributeurs automatiques des condoms.

Cela permet à de nombreuses personnes de s’en procurer facilement, d’autres s’approvisionnant dans des pharmacies.

Le fait qu’après usage, certains abandonnent les condoms n’importe où est un autre sujet de préoccupation, car les enfants peuvent les ramasser pour en faire des jouets en soufflant dedans comme des ballons de baudruche.

« Cela représente un danger pour la santé », s’inquiète Kambusi Fofana, étudiant en Biomédical au Centre universitaire de Bandundu.

On précise qu’à Bandundu, le taux de prévalence du VIH/SIDA est de 3,1 pour cent dans les milieux urbanisés de la province, pour une population d’environ six millions d’habitants.

Au niveau national, le taux de prévalence se situe autour de 7 pour cent pour 60 millions d’habitants.

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