RDC, Complot contre Katumbi : Didier Reynders piégé ?


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En RDC, plus que jamais, Moïse Katumbi est dans le viseur des autorités. Face à la popularité du dernier gouverneur de l’ex-Katanga, l’entourage du Président Kabila tente par tous les moyens de le décrédibiliser. Mais dans l’échelle de gravité, la tension est en train de monter d’un cran. Dernier exemple en date : une machination, fomentée par le ministre congolais des Affaires étrangères, le chef d’état-major particulier du chef de l’Etat et l’Administrateur général de l’Agence Nationale de Renseignements (ANR), destinée à jeter le discrédit sur Moïse Katumbi.

Ce que certains craignaient est manifestement en cours à Kinshasa. « Un dossier contre Moïse Katumbi est en train d’être monté », a-t-on appris de sources sûres. A la manœuvre, Raymond Tshibanda, le ministre des Affaires étrangères, le Général Kalenga, le chef d’état-major particulier du Président Kabila, et Kalev Mutomb, l’Administrateur général de l’Agence nationale de renseignements (ANR).

Acte I de cette triste pièce, l’entretien que Didier Reynders a eu avec son homologue de RDC hier, mardi 26 avril, à Kinshasa. A cette occasion, Raymond Tshibanda a soutenu au ministre belge des Affaires étrangères que la police n’aurait pas dû tirer lors de la manifestation de dimanche, réprimée par la force, à Lubumbashi. Et si, au final, elle l’a fait en visant et la foule et Moïse Katumbi, c’est parce que ce dernier aurait, selon Raymond Tshibanda, après avoir quitté le Stade Mazembe, lieu prévu à un moment donné pour le meeting, tenté de lever les scellés apposés quelques jours plus tôt au siège de l’UNAFEC, le parti de Gabriel Kyungu. Or, selon l’entourage de l’ex-gouverneur, « cela est faux car, au final, il était prévu que Moïse Katumbi prenne la parole, non pas dans ce stade-ci, situé dans la commune de Kamalondo, mais dans un autre stade, se trouvant lui dans la commune de la Kenya, à plus de 5 km de là. Le ministre des Affaires étrangères fait donc fausse route ! Première approximation, contre-vérité ou mensonge que les autorités congolaises tentent d’accréditer auprès de Didier Reynders… ».

Didier Reynders a fait mine de comprendre la situation

Le ministre belge des Affaires étrangères a, semble-t-il, fait mine de comprendre la situation, selon une fuite émanant de l’entourage de Raymond Tshibanda. Pourtant, cette version est totalement contredite par la police de le MONUSCO, présente aux premières loges sur le terrain lors de la manifestation de dimanche. Celle-ci insiste bien sur le caractère pacifique de la marche organisée par Moïse Katumbi dans la commune de la Kenya. « A aucun moment, les participants ne se sont montrés menaçants. L’ambiance était bon enfant jusqu’à ce que la police ne sonne la charge avec des tirs et de gaz lacrymogènes ». Quant aux assertions de Raymond Tshibanda tendant à faire croire que Moïse Katumbi aurait eu la volonté de se rendre au siège de l’UNAFEC pour y retirer les scellés, ce sont de « pures élucubrations », affirme sans ambages un responsable de la police de la MONUSCO. « Nous n’avons rien constaté de tel. Nous avons été présents avant, pendant et après la marche. Qui plus est, face aux menaces pesant sur son intégrité physique, c’est nous qui avons raccompagné Moïse Katumbi à son domicile afin de le mettre en sécurité ». Difficile de remettre en cause un tel témoignage…

L’acte II de la pièce se joue à l’occasion d’une rencontre, il y a quelques heures à Kinshasa, entre un collaborateur de Didier Reynders et le chef d’état-major particulier de Joseph Kabila, le général Kalenga. A son tour, celui-ci a tenu des propos peu amères à l’encontre de Moïse Katumbi ; mais très éloignés, ici aussi, de la réalité… Le général Kalenga a affirmé tout de go au collaborateur de Didier Reynders que le dernier Gouverneur de l’ex-Katanga était ni plus ni moins en train de préparer un coup d’Etat et que, dans cette perspective, il mettait sur pied des milices et implantait des camps d’entraînement dans la province cuprifère. « Un mensonge éhonté », soutient un haut responsable de l’administration locale, pourtant membre du PPRD local. « Mon combat pour la démocratie est et restera pacifique », répète inlassablement Moïse Katumbi. De fait, difficile de faire croire que ce dernier est capable de fomenter un coup d’Etat à quelques mois d’une élection présidentielle qu’il appelle de ses vœux… « Tout ça n’est pas crédible », tranche Matanda, un responsable du mouvement citoyen La Lucha à Kinshasa.

L’Acte III de cette tragédie congolaise se joue également à Kinshasa, mais cette fois-ci dans les locaux de l’ANR, l’Agence National de Renseignements. Son rôle dans cette affaire : produire les preuves matérielles afin d’accréditer l’idée d’un coup d’Etat fomenté par Moïse Katumbi. Et pour ce faire, tous les moyens sont bons, même les plus funestes. Les personnes arrêtées à Lubumbashi dimanche et transférées dans la capitale, trois Congolais et un citoyen américain, sans aucun antécédent chacun, sont victimes depuis d’actes de tortures destinés à leur extorquer des aveux, a-t-on appris de sources internes à l’ANR. Leur nom : Franck Mwashila, Idi Sefu, Yannick Muteba (lequel a été tabassé et sévèrement blessé – fracture de la main gauche – dans les locaux de l’ANR à Lubumbashi par Banza Musodi, le chef d’équipe mobile au sein de l’ANR Katanga) et Daryl Lewis.

« Terminator » de retour à Lubumbashi

Un élément, à ce propos, est particulièrement inquiétant : le transfert de ces personnes à Kinshasa s’est opéré sous la supervision de Nzita, le « Redoc » de Lubumbashi. Or, celui-ci a des antécédents pour le moins chargés. Relevé de ses fonctions de chef de l’ANR provincial en 2008 pour avoir torturé à mort un citoyen français, celui que l’on surnomme dans la province « Terminator » a été rappelé au Katanga après le fameux discours de Moïse Katumbi sur le 3ème pénalty en décembre 2014 afin « de mettre ce dernier au pas ». In fine, l’objectif de l’ANR est, en l’espèce, de faire avouer à ces malheureux une supposée participation à une milice montée par le dernier Gouverneur de l’ex-Katanga. Une fois collectées, les preuves de ce scénario, créé de toute pièce et directement supervisé par l’Administrateur général de l’ANR, Kalev Mutomb, ce dernier doit les communiquer au Président Kabila afin qu’il puisse les produire devant Didier Reynders.

Ces informations, toutes recoupées, ont pu être collectées grâce à des indiscrétions recueillies auprès des entourages respectifs du ministre Tshibanda, du général Kalenga et au sein de l’ANR, qui ne souscrivent pas tous – loin s’en faut – à ces méthodes. Beaucoup gardent en effet à l’esprit le récent précédent concernant Pierre Lumbi, le président du Mouvement social pour le renouveau (MSR). Vendredi dernier au soir, un inconnu a réservé une chambre dans un hôtel que possède à Lubumbashi cette figure éminente du G7,le Rift Congo. Le dimanche 24 avril, à 5 heures du matin, les services de sécurité sont arrivés sur place et ont demandé à ce que la porte de la chambre réservée par l’inconnu en question soit ouverte. Lors de cette « perquisition », un sac contenant des armes a été retrouvé. Les dirigeants de l’hôtel, les propres fils de Pierre Lumbi, ont alors été arrêtés. Mais manque de chance pour les autorités, la scène a été intégralement filmée. Apprenant cela, les éléments des renseignements ont alors tenté de confisquer les disques durs des enregistrements mais, peine perdue, une copie avait été conservée par les responsables de l’hôtel montrant l’implication des agents de l’ANR venus directement de Kinshasa pour accomplir leur besogne. Résultat : face aux menaces des dirigeants de l’hôtel de rendre publics ces enregistrements, les autorités ont préféré étouffer l’affaire et relâcher immédiatement les fils de Pierre Lumbi, sans autre forme de procès.

Cependant, loin d’avoir tiré les leçons de ce fâcheux précédent, les autorités congolaises semblent poursuivre leur entreprise de déstabilisation à l’encontre de Moïse Katumbi qui, plus que jamais, est perçu comme le rival le plus dangereux du Président Kabila.

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