3ème épisode de notre Chronique du Procès en appel qui se déroule à Lumumbashi. « J’ai honte », nous confie au téléphone un magistrat du ressort de la Gombe à Kinshasa. « Ce qui s’est passé hier en RDC n’est pas grave. C’est gravissime », poursuit-il. L’événement auquel ce haut-magistrat fait référence, c’est la tentative d’assassinat, ce mercredi 19 juillet à minuit, du juge Jacques Mbuyi.
Tant il est vrai que l’onde de choc provoquée par la tentative d’assassinat, ce mercredi 19 juillet à minuit, du juge Jacques Mbuyi (lire à ce sujet nos deux articles, ici et ici) n’est pas encore retombée.
« J’ai honte », répètera-t-il à plusieurs reprises lors de notre échange téléphonique. « Vouloir assassiner un juge pour intimider les autres magistrats et commettre l’irréparable sur sa femme et ses enfants, c’est inadmissible », s’emporte-t-il. « Le pire dans toute cette histoire, c’est que le corps de la magistrature ne réagit pas. Aucun de nos syndicats ne s’est élevé pour dénoncer ces actes barbares », déplore-t-il. « De tels actes auraient mérité que l’on cesse immédiatement nos activités, de nous mettre en grève si vous préférez. A situation exceptionnelle, mesure exceptionnelle. A tout le moins, aurions-nous dû décider d’une journée ‘tribunaux morts’. Mais rien. Rien du tout. Je suis choqué. J’ai honte pour ma profession », conclut ce magistrat chevronné, qui pourtant en a vu bien d’autres, la voix serrée comme dans un sanglot.
Un autre de ses confrères, joint par téléphone, qui officie à Goma, dans l’est du pays, est tout aussi remonté. « Hier, ça n’est pas la justice que l’on a tenté d’assassiner. Tout simplement parce que celle-ci est déjà morte », nous dit-il. « Que faudra-t-il à la magistrature pour réagir ? Et surtout à qui le tour ? Qui sera la prochain Jacques Mbuyi ? », fait-il mine de s’interroger. Pour lui, l’indépendance de la Justice en RDC n’est plus qu’une fiction. Celle-ci « est totalement inféodée à l’Exécutif, ce qui est la négation même de l’Etat de droit », nous fait-il remarquer.
Depuis Goma, il suit avec attention le procès en appel de Moïse Katumbi qui se déroule actuellement à Lubumbashi. Pour lui, son issue ne fait aucun doute. « Katumbi sera condamné tout simplement parce que le régime de Kinshasa en a décidé ainsi », nous dit-il avant de lâcher : « ne soyez pas naïf. Il n’est qu’à voir les règles de procédure. Elles ont déjà allègrement été violées. »
Hier soir, Manda Lupula, le président du TGI de Lubumbashi, devant lequel se déroule le procès en appel de Moïse Katumbi, est venu rendre visite au juge Mbuyi à l’Hôpital du Cinquantenaire. Effondré, il a pleuré, selon plusieurs témoins. Le lendemain (aujourd’hui, 20 juillet) à neuf heures, l’audience a repris au TGI de Lubumbashi. Comme si de rien n’était…