La République démocratique du Congo (RDC), plus grand pays francophone du monde, et le Canada, deuxième plus important contributeur de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), collaborent étroitement au sein de cette organisation intergouvernementale, qui a entre autres pour missions de promouvoir la francophonie économique et de renforcer l’espace économique francophone pour en faire un espace d’échanges économiques, de coopération et de solidarité privilégié, mutuellement bénéfique.
En effet, bien que des investissements miniers canadiens en RDC soient très importants, les relations commerciales et économiques d’import-export entre les deux pays sont très modestes. Les deux pays avaient pourtant entamé des négociations bilatérales en février 2015, en vue de parvenir à un Accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers (APIE), mais celles-ci sont fort malheureusement au point mort depuis maintenant quatre ans. En l’absence d’un accord de protection des investissements, le climat actuel des affaires poserait de sérieux défis aux entreprises canadiennes.
Félix Tshisekedi est très conscient de la très faible capacité de son pays à attirer des investissements directs étrangers, en raison de la détérioration générale du climat des affaires due notamment au manque d’efficacité de l’administration publique congolaise et à une bureaucratisation excessive qui constituent des obstacles aux investissements privés. Il serait également conscient que l’administration publique congolaise doit faire l’objet d’importantes réformes afin de pouvoir remédier aux insuffisances structurelles existantes qui freinent les investissements privés. À ce propos, l’appui du Canada, au travers notamment de l’École nationale d’administration publique (ENAP), pour accompagner la réforme de la fonction publique congolaise, ainsi que le renforcement des capacités de gestion des hauts fonctionnaires congolais serait très apprécié.
Pendant sa campagne présidentielle, Félix Tshisekedi avait promis aux Congolais d’investir dans les programmes sociaux, que ce soit dans le domaine de la santé, de l’éducation, de l’agriculture, de l’électricité, de l’eau et de l’assainissement. Aussitôt élu, il s’emploie à relancer l’activité économique et à réhabiliter les infrastructures de base, en même temps qu’il est en train de tout mettre en œuvre pour apporter des mesures correctives nécessaires et favorables à l’amélioration du climat des affaires, notamment en combattant la corruption et le système des pots-de-vin qui y ont élu domicile, afin d’attirer plus d’investissements dans tous les secteurs de l’économie nationale.
Toutefois, le secteur de l’économie qui représente un défi important à relever pour la RDC et qui présente une opportunité précieuse d’affaires pour les investisseurs canadiens, est celui des infrastructures publiques qui sont dans un état de délabrement sans pareil et qui nécessitent un volume important d’investissements directs étrangers.
En effet, les réseaux routiers, ferroviaires, portuaires et aéroportuaires sont notamment identifiés comme des priorités en vue de faciliter le transport des personnes, des marchandises et des produits agricoles de première nécessité, indispensables pour renforcer le commerce intra-régional, l’intégration du marché intérieur, mais aussi pour contribuer à la réduction de la pauvreté extrême et à la croissance économique du pays.
Félix Tshisekedi devra compter sur des partenariats entre les secteurs publics et privés pour répondre aux besoins croissants de son pays et de sa population. D’où la nécessité de lancer un appel en faveur d’investissements étrangers, notamment canadiens, pas seulement dans le secteur minier, mais également dans les autres secteurs, tels que celui des infrastructures.
Le 06 septembre prochain, le président Tshisekedi va ouvrir solennellement le 5ème Forum économique et commercial dénommé « Makutano », qui se penchera sur la recherche des leviers innovants pour booster la compétitivité́ et la croissance en RDC.
C’est donc une occasion intéressante pour les entreprises canadiennes qui envisagent de faire des acquisitions en RDC, de développer des activités commerciales, de nouer des liens avec des entreprises congolaises et africaines, ou encore de tisser des relations d’affaires avec des potentiels partenaires congolais, aussi bien dans les secteurs commercial, industriel et professionnel, voir même avec des entreprises publiques et privées, de se rendre à Kinshasa à cette occasion à Kinshasa pour prospecter les opportunités d’affaires et d’investissements.
Le « Makutano » est organisé chaque année à Kinshasa pour faciliter les échanges commerciaux et les investissements, en vue de stimuler la croissance économique. Il s’agit d’un forum au cours duquel les participants, notamment les dirigeants d’entreprises publiques et privées, les investisseurs nationaux et étrangers et les gens d’affaires, triés sur le volet, se réunissent autour d’intérêts communs pour partager les expériences avec leurs pairs et identifier des opportunités d’affaires et de partenariats.
Mais comme nous l’avons évoqué ci-haut, l’absence d’un accord de protection des investissements étrangers entre les deux pays peut avoir un effet dissuasif sur les investisseurs canadiens en RDC. C’est pourquoi nous croyons que l’élan donné par le changement de leadership politique en RDC, avec l’élection de Félix Tshisekedi, peut faire en sorte que les deux pays reprennent rapidement les négociations dans le but de conclure un accord qui offrira une plus grande prévisibilité et une certitude accrue aux investisseurs canadiens qui envisagent de réaliser des investissements en RDC, et ce, dans les divers secteurs de l’économie nationale.
La conclusion d’un APIE qui équilibre les intérêts de deux pays, en établissant un cadre juridiquement contraignant de droits et d’obligations, est un accord gagnant-gagnant qui pourrait grandement contribuer à accroître les investissements canadiens en RDC et favoriser la croissance et le développement économique de ce pays.
Isidore Kwandja Ngembo, politologue et analyste des politiques publiques
Il a été Conseiller à la direction d’Afrique centrale et occidentale du ministère canadien des Affaires étrangères