Deux sommets sont en préparation pour trouver une issue à la crise politique et humanitaire que connaît la province du Nord-Kivu, dans l’est de la République Démocratique du Congo. Les pays des Grands Lacs et leurs partenaires africains, européens et américains se retrouveront prochainement dans le cadre de rencontres sous-régionale et internationale. Le Rwandais Paul Kagame, soupçonné d’être impliqué dans le conflit dans le Nord-Kivu, et son homologue congolais, le président Joseph Kabila, sont prêts à discuter pour éviter la guerre entre leurs deux pays.
La crise dans l’est de la République Démocratique du Congo fera l’objet de sommets sous-régional et international. Le premier devrait réunir les Etats des Grands Lacs et de la Communauté des Etats d’Afrique autrale (SADC) sur proposition de l’Union africaine et des grandes puissances sous-régionales, comme l’Afrique du Sud. Le président de l’Union africaine (UA), le Tanzanien Jakaya Kikwete, et celui de la Commission de l’UA, le Gabonais Jean Ping, ont ainsi suggéré la tenue de cette rencontre. De même, le président Sud-Africain Kgalema Motlanthe et son homologue congolais Denis Sassou Nguesso ont appelé vendredi soir, à Brazzaville, les pays des Grands Lacs à intervennir « de toute urgence » pour trouver une solution à la crise qui secoue le Nord-Kivu.
Réunir Kabila et Kagame
« Notre responsabilité est que nous exercions notre influence afin de mettre fin à la bataille à l’Est de la RDC (…) Ainsi la convocation de toutes les nations des Grands Lacs et de la Communauté des Etats d’Afrique autrale (SADC) s’impose afin que nous traitions des causes subjacentes de cette crise », a déclaré le président sud-africain, au cours d’une conférence conjointe avec le président Sassou Nguesso.
Le second sommet multipartite se tiendra à Nairobi au Kenya, sous l’égide des Nations unies, en présence des présidents rwandais Paul Kagame et congolais Joseph Kabila. L’annonce a été faite vendredi par Louis Michel, le commissaire européen à l’Aide humanitaire, qui avec la secrétaire d’Etat adjointe américaine aux Affaires africaines, Jendayi Frazer, ainsi que les ministres des Affaires étrangères français et britannique, Bernard Kouchner et David Miliband, ont multiplié les contacts diplomatiques en RDC.
Le secrétaire général des Nations unies a également dépêché des émissaires à Kigali et à Kinshasa. Jusqu’ici, Paul Kagame s’était refusé à participer à une telle rencontre considérant que le conflit dans l’est était interne à la RDC. Le pouvoir rwandais, aux mains des Tutsis, est soupçonné de soutenir le tutsi congolais Laurent Nkunda, le leader du Congrès national pour la Défense du Peuple (CNDP), qui menace dans le Nord-Kivu le gouvernement congolais. Le chef rebelle reproche à Kinshasa de s’être allié à des Hutus impliqués dans le génocide de 1994 au Rwanda.
Secourir les populations du Nord-Kivu
L’urgence en RDC est aujourd’hui double : empêcher la guerre entre la RDC et le Rwanda et évider une catastrophe humanitaire. L’échec du cessez-le-feu conclu en janvier à Goma, la capitale provinciale du Nord-Kivu, a plongé depuis le 28 août la province dans la violence. L’armée congolaise et les rebelles s’ y affrontent. La situation s’est détériorée ce mercredi avec l’abandon par l’armée congolaise de ses positions. Les habitants sont livrés à la rébellion, qui a toutefois prononcé, jeudi, un cessez-le-feu unilatéral qui est respecté. Le CNPD a également autorisé l’ouverture de couloirs humanitaires. Mais les rebelles ont chassé près de 50 000 personnes, selon le Haut commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR), des camps situés dans les environs de la ville de Rutshuru, dans le Nord-Kivu.
Des exactions contre les populations ont été également commises par l’armée régulière, d’après les Nations unies. «La situation humanitaire est catastrophique. Les besoins sont multiples en nourriture, eau, secours médicaux et non alimentaires», selon le Comité international de la Croix-Rouge (CICR). «Nous sommes très inquiets pour la sécurité des civils qui sont pris au piège entre les deux camps (ceux de Kibati, au nord de Goma et ceux à poximité de Rutshuru, ndlr) et de ceux qui ont pris la fuite», a affirmé le chef de la délégation du CICR en RDC, Max Hadorn.
Plusieurs pays, comme la Belgique, ont débloqué des fonds pour venir en aide aux populations du Nord-Kivu, où des ONG comme Oxfam International ont cessé leurs activités. Javier Solana, le chef de la diplomatie européenne, a déclaré vendredi que l’Europe pourrait acheminer l’aide en utilisant des ressources militaires. Les députés congolais ont, pour leur part, appelé leur gouvernement, qui détient à « 95% » les clés d’une sortie de crise, selon Louis Michel, à négocier avec le CNDP. C’est le prix, semble-t-il, pour que le Nord-Kivu retrouve un semblant de sérénité.