Le ministre de la Justice RD congolais, Alexis Thambwe Mwamba, était du 9 au 12 juillet à Lubumbashi, la capitale du Haut-Katanga. Le Garde des Sceaux a présidé au lancement des Journées du Barreau qui réunissaient l’ensemble des avocats du pays. Mais pas uniquement…
Les journées du barreau n’étaient elles qu’un prétexte ? Le ministre de la Justice en a également profité pour visiter le Palais de Justice de Lubumbashi, ainsi que la Prison centrale de Kassapa. Surtout, Alexis Thambwe Mwamba a mis à profit son séjour lushois pour donner ses instructions aux magistrats locaux. Il s’est notamment entretenu avec le Procureur général près la Cour d’appel de Lubumbashi et le Premier président de cette même juridiction. L’objectif : les « inciter » à confirmer en appel, lors de l’audience prévue le 19 juillet prochain, la condamnation de Moïse Katumbi dans un obscur dossier de spoliation immobilière.
L’intéressé avait été condamné après que la juge Chantal Ramazani Wazuri, réfugiée depuis en France, avait subi des pressions de la part du pouvoir (lire, à ce sujet, notre article : « Juge Chantal Ramazani : « Sous la menace, nous avons violé la loi pour condamner Moïse Katumbi »). Alexis Thambwe Mwamba a d’ailleurs demandé, lors de son dernier séjour à Lubumbashi, aux deux collègues magistrats de Mme Ramazani du Tribunal de paix de Kamalondo, où avait été jugée l’affaire en première instance, de le suivre à Kinshasa. Alexis Thambwe Mwamba, dit-on, souhaiterait qu’ils témoignent tous deux contre leur collègue en niant les pressions exercées par le pouvoir en première instance. En attendant, le ministre entend qu’une décision de condamnation soit prononcée quels que soient les moyens de défense ou les exceptions soulevées par les avocats de la défense, celui-ci les ayant qualifiées d’emblée de « manœuvres dilatoires ». Pour rappel, la requête en suspicion légitime, soulevée par la partie défenderesse afin de dépayser le dossier dans un autre ressort juridictionnel, avait été écartée par la Cour constitutionnelle.
Si le ministre exige une décision ferme et rapide, c’est qu’il est en réalité pressé par le calendrier. In fine, il s’agit de dissuader Moïse Katumbi de rentrer au Congo, comme l’y a autorisé le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU en juin dernier à Genève. Dans la foulée, l’opposant avait fait savoir qu’il comptait rentrer dans le courant du mois d’août, soit dans quelques jours en théorie. D’où l’activisme empressé de Thambwe Mwamba.
M. Katumbi, contraint à l’exil depuis plus d’un an, est victime d’un véritable acharnement judiciaire de la part du pouvoir. Il est en effet considéré par Joseph Kabila comme son opposant le plus dangereux. Ainsi, afin de l’affaiblir et de l’écarter de la course à la présidentielle (dont la date a été sciemment repoussée par le régime en violation de la Constitution), le dernier Gouverneur de l’ex-Katanga a fait l’objet de condamnations et de poursuites judiciaires aussi fantasques les unes que les autres selon l’Eglise catholique et les ONG qui les ont qualifiées de « mascarades ».
Une chasse aux sorcières qui révèle un climat général délétère, loin, très loin, de la décrispation politique convenue entre le pouvoir et l’opposition dans le cadre de l’Accord de la Saint-Sylvestre signé le 31 décembre 2016…