Le Haut Commissaire pour les réfugiés, António Guterres, est arrivé vendredi à Kinshasa pour une visite de cinq jours en République démocratique du Congo (RDC). Pendant son séjour congolais, le n°1 du HCR devra rencontrer le président Joseph Kabila, avant de se rendre dans des camps de déplacés situés à 15 km de Goma, au Nord-Kivu, où la situation des populations civiles reste très préoccupante.
Notre correspondant à Kinshasa
Avant de quitter Genève, le diplomate onusien s’est dit « extrêmement préoccupé par les souffrances de ces gens et par la terrible situation humanitaire à laquelle ils sont confrontés, une situation que la dernière série de combats a encore aggravée». Dans son agenda, le responsable du HCR prévoit également de rendre visite au personnel de la force de maintien de la paix des Nations Unies et les organisations humanitaires partenaires de l’ONU, qui, a-t-il déclaré, travaille « dans un contexte marqué par une forte pression et des contraintes sécuritaires afin de fournir aux déplacés l’assistance et la protection dont ils ont tant besoin».
Selon un communiqué du HCR, au cours des douze derniers mois, « le conflit en cours, le renforcement des effectifs militaires et l’insécurité généralisée dans le Nord-Kivu ont été la cause d’un déplacement massif de population, soit environ 400.000 personnes, ce qui constitue la pire crise de déplacement depuis la fin de la guerre civile en 2003 ». Et d’ajouter, « quelque 170.000 personnes ont été déplacées depuis le mois d’août. Au total, on estime le nombre d’individus déplacés au sein de la province (du Nord Kivu) à 800.000, parmi lesquels figurent les personnes déplacées par les conflits antérieurs ».
Accalmie précaire sur terrain
Selon la porte-parole de la Monuc au Nord-Kivu, Sylvie van den Wildenberg, « la situation reste tendue, mais aucun combat n’a été signalé le vendredi 14 décembre entre les Forces armées congolaises (FARDC) et les troupes insurgées ralliées à l’ex-général Laurent Nkunda ». Mais depuis quelques jours déjà, les troupes rebelles avancent vers les villes de Saké et de Goma, après avoir infligé un cinglant revers aux troupes loyalistes dans la cité stratégique de Mushake.
Le Secrétaire général de l’ONU a exprimé jeudi sa préoccupation pour la population civile. Sur place, la Mission de l’Organisation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC), s’est dit inquiète pour la situation des femmes et des filles, en indiquant «qu’entre janvier et octobre 2007, dans la seule région, 2.700 cas de viol avaient été signalés»
Plusieurs centaines d’enfants sur la ligne de front
L’ONU a accusé ce matin les groupes armés présents au Nord-Kivu de recruter « des centaines de garçons et de filles et de les envoyer sur la ligne de front ». Selon un communiqué conjoint MONUC-UNICEF « plusieurs témoignages recueillis récemment confirment qu’après un recrutement forcé, les enfants reçoivent un entraînement militaire et sont envoyés sur la ligne de front, au cœur des combats, alors que d’autres sont utilisés pour des tâches logistiques variées ou comme esclaves sexuels ».
Depuis 2004, plus de 8 500 enfants avaient déjà rejoint leur famille après avoir quitté volontairement les groupes armés du Nord-Kivu. D’après les témoignages recueillis, plusieurs de ces enfants ont été à nouveau recrutés. La crise actuelle compromet tous les acquis durement obtenus pendant les trois dernières années de démobilisation d’enfants au Nord-Kivu.
L’ONU pointe un doigt accusateur sur le général dissident, Laurent Nkunda, patron du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP), et les Forces démocratiques pour libération du Rwanda (FDLR). Le communiqué précise que : «dans les zones sous contrôle du CNDP, les familles et les communautés qui ne veulent pas remettre leurs enfants pour le soutien de « la cause » rapportent subir intimidations et persécutions ». Et de préciser que « le CNDP et les FDLR semblent s’inscrire comme premiers responsables du recrutement et de l’utilisation d’enfants parmi tous ceux qui les pratiquent au Nord-Kivu ». Les deux agences onusiennes rappellent aux concernés que la loi nationale congolaise, dont la Constitution, interdit la présence d’enfants de moins de 18 ans au sein de l’armée. De plus, le recrutement et l’utilisation d’enfants de moins de 15 ans par des forces et groupes armés sont considérés comme un crime de guerre qui peut être poursuivi par le Tribunal Pénal International.
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