Le gouvernement algérien a adopté, mardi, une nouvelle loi sur les partis visant à interdire le retour du Front islamique du salut sur la scène politique. L’alliance présidentielle, représentée par le Front de libération nationale (FLN), le Rassemblement national démocratique (RND) et le parti islamiste modéré du Mouvement de la société pour la paix (MSP), est accusée, par le Parti des Travailleurs (PT), de bloquer les réformes politiques du président Abdelaziz Bouteflika. Par ailleurs Louisa Hanoune, le leader du PT agite le spectre de l’ingérence politique. Ramdane Tazibt, député PT et Vice-président de l’Assemblée nationale s’explique. Interview.
Ramdane Tazibt, député du Parti des Travailleurs et Vice-Président de l’Assemblée nationale, donne son avis à propos de la nouvelle loi sur les partis adoptée mardi à Alger.
Afrik.com : Que dénoncez-vous dans ce projet de loi ?
Ramdane Tazibt : La loi actuelle a introduit des modifications positives comme la dissolution d’un parti par exemple. Le Parti des Travailleurs a proposé un système déclaratif. A savoir la libre création d’un parti politique. Aussi, l’action publique est totalement ignorée dans ce texte. Il touche même aux libertés politiques, si une manifestation a lieu sans organisation, les militants risquent une peine de prison !
Afrik.com : Que proposez-vous ?
Ramdane Tazibt : Plusieurs choses nous dérangent. Par exemple, nous sommes contre le fait que le gouvernement puisse rembourser des sommes faramineuses aux hommes d’affaires algériens. C’est énorme ! Aussi le respect des principes islamiques n’est pas pris en compte. Il peut y avoir des interprétations religieuses qui peuvent porter atteinte aux partis. Il n’est pas normal qu’un député qui milite pour la séparation de la religion et de l’Etat tombe sur une loi faisant référence à la religion. Pour tout cela, nous sommes pour la séparation de la religion et des affaires politiques.
Afrik.com : Vous soupçonnez l’alliance présidentielle de faire barrage aux réformes politiques ?
Ramdane Tazibt : Cette alliance bloque les réformes du président, et notamment celles du 15 avril. Des engagements politiques ont été pris pour en finir avec les pratiques anciennes, ainsi avoir accès à un vrai code électoral qui donne, entre autre, droit aux députés de changer de partis même une fois élu. Mais cette alliance a fait capoter ces mesures. Nous militons pour que chaque ministre qui se présente à l’élection présidentielle démissionne au moins trois mois avant la date butoir. L’alliance a également fait couler ce projet de loi. Il faut à tout prix organiser des élections législatives anticipées pour mettre un terme à cette alliance.
Nous ne sommes pas opposés au retour du FIS
Afrik.com : Louisa Hanoune, le leader du PT, n’a pas été très tendre à l’égard de Abdallah Djaballah, le leader du Front pour la justice et le développement (FJD). Pourquoi ?
Ramdane Tazibt : On ne lui reproche rien. On a seulement noté qu’il a formulé des déclarations qui n’avaient pas lieu d’être, lors d’un forum international en Algérie. Il s’est présenté comme un candidat potentiel à l’élection présidentielle alors même qu’il n’a pas encore de parti. Pourquoi est-il allé discuter avec les ambassadeurs de la France et des Etats-Unis? On aurait dit un émissaire. Il a déclaré que la France et les Etats-Unis n’avaient plus peur des partis islamistes. Mais personne ne lui a demandé de faire l’intermédiaire. Ce ne sont que des manipulations. Encore hier, la France et les Etats-Unis avançaient main dans la main avec les dictateurs arabes, aujourd’hui ils félicitent les partis islamistes élus démocratiquement. Évidemment qu’ils ne vont pas critiquer ouvertement ces partis.
Afrik.com : Mme. Hanoune a fait référence à une invasion française et américaine…
Ramdane Tazibt : Ils interviennent dans les affaires internes du pays. Nous avons à faire à des ingérences politiques de la part de ces pays. L’Algérie subit des pressions. Il y a beaucoup de visites de responsables de ces deux pays afin d’exprimer tout le mal qu’ils pensent de nous sur le plan économique par exemple. De quel droit ? Dans quel but?
Afrik.com : Etes-vous favorable ou non au retour du FIS en politique ?
Ramdane Tazibt : Nous sommes en train de sortir d’une crise terrible qui a coûté la vie à des milliers de personnes. Des décisions ont été prises et l’heure n’est pas à la médisance. Nous aspirons à ce que tous les Algériens puissent avoir le droit de faire de la politique. Maintenant, est-ce que le moment est opportun pour rouvrir tous ces dossiers ? La question reste en suspens. Il n’y a pas qu’un seul responsable de la crise. Un jour, les choses devront être clarifiées. Mais nous ne sommes pas opposés au retour du FIS en politique.