Rachida Dati, la Ministre française de la Justice, a reçu ce lundi à Paris, les premiers présidents des tribunaux et les procureurs généraux. Une rencontre, sollicitée par le Conseil supérieur de la Magistrature, qui fait office de première dans le monde juridique. Elle intervient dans un contexte de vives tensions entre la Garde des Sceaux et les magistrats.
(Presque) plus rien n’étonne au cabinet de la Ministre de la Justice Rachida Dati. Après les départs successifs de 7 des 18 collaborateurs de son ministère, c’est au tour du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) de manifester son mécontentement. Ce vendredi, le CSM a demandé à être reçu par la garde des Sceaux, suite à la vive polémique autour de la convocation, le 29 août, du vice procureur de Nancy, Phillipe Nativel. Une demande inédite à laquelle la ministre a répondu positivement. Elle a convoqué ce lundi matin à Paris les premiers présidents des tribunaux et les procureurs généraux et recevra le Conseil supérieur de la magistrature vendredi prochain à midi.
La Magistrature, instrument du pouvoir…
Cette convocation intervient dans un contexte de tensions dans le milieu judiciaire. Rien ne va plus entre Rachida Dati qui se dit « Chef des procureurs », titre qui ne figure dans aucun texte de lois, et ses présumés vassaux qui n’acceptent pas ses méthodes. Ces derniers ont exprimé, « [leur] vive émotion et [leur] particulière préoccupation devant ce qui pourrait constituer une atteinte gravissime à [leur] statut » a indiqué la Conférence nationale des procureurs. Pour la ministre, la réalité est tout autre. « Un parquetier est sous l’autorité du garde des Sceaux, il n’a pas à faire des commentaires sur les lois », avait-elle rétorqué afin de justifier la convocation de Phillipe Nativel.
A l’origine de cette assignation, des propos du vice procureur de Nancy, rapportés par le quotidien régional l’Est Républicain. « Je ne requerrai pas cette peine plancher de quatre ans car les magistrats ne sont pas les instruments du pouvoir » aurait-il affirmé début août avant de les démentir lors de son entrevue à la Chancellerie. Ce vice procureur de Nancy avait requis un an d’emprisonnement à l’encontre d’un prévenu pour trafic de stupéfiant récidiviste et non la peine plancher de quatre ans, prévue par la loi du 10 aout qui renforce la lutte contre la récidive. Cette loi, présentée au Sénat par Rachida Dati, seulement un mois après sa nomination, prévoit l’instauration de peines minimales pour les récidivistes et vaut également pour les mineurs multirécidivistes de plus de 16 ans.
L’opinion française soutient Rachida Dati
Si la Ministre continue de s’attirer les foudres de la magistrature et celle de certains de ses collaborateurs, l’opinion publique semble plutôt favorable à son action, à en croire un sondage Opinion Way réalisé pour le Figaro et LCI. 63% des personnes interrogées estiment « normal » la convocation du vice procureur par Rachida Dati. Pour 29% des sondés seulement, cette initiative est « choquante » et représente « « une grave atteinte à l’indépendance de la justice ».
Paradoxalement, l’enquête révèle que 51 % des personnes interrogées estiment que « les magistrats doivent pouvoir faire des commentaires sur la loi », alors que pour 37 % du panel, « ce n’est pas le rôle d’un magistrat de faire des commentaires sur la loi ». Une contradiction qui met en exergue le point de vue de l’opinion publique. Les Français –toute proportion gardée- ne trouveraient donc pas incompatible « le droit » a la parole des magistrats et le fait de devoir rendre des comptes. Un point de vue, qui, ne semble pas être totalement partagé par Rachida Dati qui a rappelé récemment la fonction première des magistrats, à savoir une fonction exécutive.
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