Pour intégrer l’Ecole nationale de magistrature, la ministre française de la Justice, Rachida Dati, a fait mention dans son CV d’un diplôme qu’elle n’avait pas obtenu, selon les journaux L’Express et Le Canard Enchaîné. L’accusée annonce la sortie prochaine d’un livre dans lequel elle livrera sa vérité.
Pour Rachida Dati, 41 ans, première française d’origine maghrébine à occuper un ministère régalien, l’exercice de la fonction de Garde des Sceaux est loin d’être une sinécure. Au-delà de la fronde des magistrats qui lui reprochent son autoritarisme, elle doit faire face à une attaque en règle de la presse.
La dernière en date, orchestrée par le Canard Enchaîné, concerne son curriculum vitae qu’elle aurait falsifié. Dans son dernier numéro, publié ce mercredi, le journal publie un extrait du CV qui figure au dossier administratif de la ministre. Ce dernier indique, pour l’année 1993, «M.B.A. du groupe H.E.C.» avec la mention « ancienne élève de l’Institut supérieur des affaires». Or, comme le magazine L’Express le révélait la semaine dernière, Rachida Dati n’a jamais obtenu le diplôme. Le Canard Enchaîné se demande donc pourquoi elle fait mention du M.B.A dans son CV et souligne « l’ambiguïté » de la méthode employée, selon lui, « de sorte que certains magistrats ou hauts fonctionnaires ont pu comprendre (…) que la jeune femme était bien diplômée. »
C’est la validité même de l’entrée de Rachida Dati à l’Ecole nationale de la magistrature (ENM) que met ainsi en doute le Canard Enchaîné, puisqu’elle a présenté ce CV pour y obtenir son admission en 1996. Selon les journalistes de l’hebdomadaire, l’annonce de la publication imminente de l’article aurait provoqué un véritable « branle-bas de combat » au ministère de la justice. La Garde des Sceaux en personne les aurait appelés pour leur reprocher de l’attaquer en raison de ses origines. Une accusation qu’ils récusent en bloc.
Une erreur administrative ?
Le cabinet de la ministre n’a pas nié le problème lié au dossier de la Garde des Sceaux. « Rachida Dati n’a jamais prétendu être titulaire d’un MBA européen, elle est ancienne élève de l’ISA », a déclaré à Reuters le porte-parole du ministère, Guillaume Didier. Le ministère s’est refusé à toute déclaration explicite sur le sujet, cependant il a diffusé le week-end dernier une déclaration au site internet du Nouvel observateur d’un magistrat, Jean-Pierre Bonthoux, ancien secrétaire général du parquet général de Versailles, qui sous-entend que Rachida Dati comme les autres candidats de l’ENM ne « sauraient en aucun cas être tenus pour responsables » d’erreurs administratives.
Quoiqu’il en soit, Rachida Dati possédait une maîtrise de sciences économique et une maîtrise de droit, ainsi que quatre années d’activité professionnelle, le minimum requis pour postuler à l’entrée de l’ENM via une deuxième voie qui vise à recruter des candidats au profil original. Le MBA fournissait un atout supplémentaire, mais n’était pas indispensable.
Mardi matin, dans une interview diffusée par la radio Europe 1, la Garde des Sceaux a nié en bloc les accusations portées contre elles. Elle a annoncé la prochaine parution d’un livre, Je vous fais juge, dans lequel elle livrera sa vérité. « Je corrige quelques rumeurs ou des choses qui sont fausses. Je corrige des incorrections. Quand on parle de faux diplômes, il faut une matérialité » a-t-elle affirmé en évoquant l’ouvrage.
La polémique sur son CV intervient au moment où elle entame une difficile réforme de la carte judiciaire. Elle pourrait également affaiblir le gouvernement, que Nicolas Sarkozy avait ostensiblement ouvert à des personnalités issues de l’immigration dont, aujourd’hui, le moindre faux pas est guetté. Il convient donc qu’ils aient un passé et un comportement absolument irréprochable, si tant est que la vie d’un homme puisse être sans faille et sans tache.
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