« Promouvoir le Cameroun comme destination africaine », c’est l’ambition de Cameroon Holiday’s dont la première édition se déroule les 29 et 30 avril, à Yaoundé. La manifestation, organisée conjointement par le ministère du tourisme et la Sofitoul (Société financière de tourisme et de loisir), réunit un large panel de professionnels du tourisme nationaux et internationaux. L’occasion de faire le point sur un secteur qui cherche les voies de son développement.
« A la découverte de l’Afrique en miniature. » Le slogan choisi pour le premier Cameroon Holiday’s n’est pas nouveau. Et depuis de nombreuses années déjà, politiques et professionnels du tourisme s’accordent à dire qu’avec sa vingtaine de parcs nationaux, son somptueux littoral, la diversité de ses richesses naturelles et de son patrimoine culturel, le Cameroun a le potentiel pour devenir un grand du tourisme africain et mondial. Le nombre de visiteurs en 2010 est encourageant. 573 000 touristes ont choisi cette destination. Deux fois plus qu’il y a cinq ans. Une performance qui a permis au pays d’être enfin classé, l’année dernière, par l’Organisation mondiale du tourisme (OMT) parmi les destinations touristiques internationales. Des résultats qui, néanmoins, demeurent « insignifiants comparés aux ressources immenses » du pays, estime le vice Premier ministre Jean Nkuete. Le tourisme contribue à 11% du PIB mondial, et à tout juste 2,5% de celui du Cameroun. Un constat qui conduit Jean Nkuete à déclarer que, dans cette activité, « le Cameroun est encore à la recherche de ses lettres de noblesse ».
Les raisons d’un tel décalage entre potentialité et réalité, les professionnels du tourisme camerounais en ont une idée précise. « Le prix des voyages et les tracasseries », diagnostique Prince Emmanuel Ngassa Hapi, le président du syndicat des agences de voyage et de tourisme du Cameroun (SNAVTC). Les tarifs pratiqués par les compagnies aériennes, ceux des visas, les lourdeurs administratives et le manque de coordination entre les différents acteurs du secteur n’encouragent pas les étrangers à visiter le pays. « Quand un Européen doit choisir entre le Cameroun et la Thaïlande, après avoir fait ses calculs, il choisit la Thaïlande », déclare M. Ngassa Hapi. Pour Chantal Lewat, présidente du syndicat patronal des industries de l’hôtellerie et du tourisme, le facteur humain est déterminant. « Il n’y a pas les bonnes personnes aux bonnes places », juge-t-elle. Il y a trop peu de Camerounais formés aux métiers du tourisme. « J’en avais tellement marre de crier, que j’ai ouvert une école (l’Institut professionnel de l’hôtellerie), et je fabrique des professionnels », confie-t-elle. Un constat que prend à son compte Ebénézer Elimbi, ancien haut fonctionnaire, pour qui « les ressources humaines au ministère du tourisme sont insuffisantes ». « Nous avons besoin de spécialistes pour traiter les problèmes précis du tourisme, estime-t-il. C’est à cette condition que nous pourrons mieux cerner les ressources disponibles et les produits à développer. »
Cap sur le haut de gamme
Quel tourisme proposer ? Et avec quels moyens ? En 2004, le président Paul Biya a inscrit le tourisme dans « la politique des grandes ambitions pour le Cameroun ». Pourtant, sept ans plus tard, les professionnels du secteur s’interrogent. Selon nombre d’entre eux, trop de sites demeurent enclavés, les financements insuffisants et les objectifs mal définis. « Comment imaginer que dans tous les pays africains il y ait un office du tourisme, et qu’au Cameroun il n’y en ait pas ? », demande M. Ngassa Hapi. « Quand on vient au Cameroun, qu’est-ce qu’on va voir ? », lâche Mme Lewat. « Créons un produit touristique. Nous avons le Mont Cameroun, faisons-en un produit phare! », propose-t-elle. Pour elle, il faudrait privilégier le haut de gamme, faire « un tourisme comme le Botswana, où ils ont deux millions de visiteurs par an qui dépensent chacun 1000 dollars en moyenne ».
Un avis que partage, en partie, Rodolphe Simo Kam, le directeur général de Sofitoul et vice-président du comité mixte d’organisation de Cameroon Holiday’s. Dans sa ligne de mire, les touristes fortunés d’Europe, d’Amérique et d’Asie dont les devises alimenteraient le développement national. Une source de revenu trop peu courtisée jusqu’à maintenant. Pour changer la donne, il entend investir dans l’exploitation hôtelière et multiplier les opérations de communication, dont le Cameroon Holiday’s qui, reconduit chaque année dans des régions différentes du pays, serait mis à profit pour « identifier, construire, valoriser, sécuriser et labéliser des circuits nationaux qui pourraient par la suite être commercialisés dans les catalogues internationaux des tour-opérateurs et des agences de voyage ». Des tâches qui paraissent, à première vue, être du ressort de la puissance publique. Mais interrogé sur la question, le ministre du tourisme Baba Hamadou précise que c’est Paul Biya lui-même qui a voulu que public et privé travaillent de concert. Et ce que Paul Biya veut…
Lire aussi : Cameroun : le tourisme sur de bons rails