Quel que soit le résultat de ces élections présidentielles américaines, la planète retiendra le charisme d’un homme : Barack Obama. Aussi bien aux Etats-Unis que dans les coins les plus reculés de la planète, le sénateur noir de l’Illinois déchaîne des passions, des plus légitimes aux plus insolites. Petit tour du monde de l’Obamania.
Il n’y a pas qu’aux Etats-Unis que Barack Obama fait des émules car l’engouement qu’il suscite est contagieux. Ses fans au sein de la communauté hispanique lui ont dédié un site, les « Amigos d’Obama », une chanson Viva Obama ! et, pardessus tout, développé une ferveur qui s’exporte vers le Mexique voisin. Si chacun des autres candidats à la Maison Blanche, aussi bien la démocrate Hillary Clinton que le républicain John McCain, est en mesure de défendre la cause des immigrés mexicains, les partisans latinos du candidat se disent touchés par ses origines modestes et son discours qui fait fi des clivages ethniques et prône le changement. «Nous cherchons désespérément (un porte-voix) qui parle avec authenticité. (…) C’est de leadership, pas de phrases toutes faites dont nous avons besoin », explique Miguel Orozco, le président de la société Nueva Vista Media spécialisée dans la communication à destination des Latinos, et à l’origine de la création de cette fenêtre virtuelle.
A des milliers de kilomètres, au Kenya où une bière porte désormais son nom, c’est plutôt l’ascension politique d’un fils du pays que l’on salue. Dans la patrie du père de Barack Obama, la popularité du candidat démocrate est incontestable. En 2006, il y recevait un accueil triomphal. Sarah Hussein Obama, sa grand-mère paternelle, est la première de ses fans. La notoriété du démocrate est telle qu’elle peut servir de faire-valoir politique. Nicholas Rajula, candidat malheureux à la députation dans l’Ouest du Kenya en décembre dernier, s’est dit apparenté au sénateur de l’Illinois, arguant que leurs pères seraient originaires du même village, Nyangoma Kogalo, situé à proximité du Lac Victoria, en pays Luo. Il n’a pas hésité à employer la même rhétorique de changement que l’homme politique américain. Bien que la grand-mère de Barack Obama reconnaisse Nicholas Rajula, comme son petit-fils, son lien de parenté avec le candidat démocrate n’est pas reconnu par ce dernier. Raila Odinga, le leader du Mouvement démocratique orange (ODM) et candidat malheureux à la présidentielle du 27 décembre 2007, a également affirmé qu’il était le cousin de Barack Obama. Le sénateur américain appellera d’ailleurs son « cousin » à l’apaisement. Son bras de fer politique avec le président Mwai Kibaki, vainqueur des élections, a plongé le Kenya dans de sanglants affrontements et une crise politique dont elle essaie de se remettre depuis quelques semaines.
Obama, la Nippone, roule pour l’Américain Obama
Quasi-unanimité ici et un peu de polémique là-bas, au Nigeria. La plus puissante nation d’Afrique de l’Ouest est, elle aussi, atteinte du « phénomène » Obama, comme le décrit le parlementaire de l’Etat de Lagos, Adewunmi Onibiyo Adelabu, à l’origine du site de soutien Obamanigeria.org. D’aucuns accusent ces promoteurs d’utiliser les deniers publics pour financer leur action. Le concept « Obama Nigeria Initiatives », dont cette vitrine sur la Toile est l’émanation, est une aventure qui fédère, selon Adewunmi Onibiyo Adelabu, « 30 des 40 membres du parlement de l’Etat de Lagos, soit 75% de la population».«Nous sommes particulièrement ravis par l’exploit de Barack Obama parce que pour la toute première fois dans l’histoire des Etats-Unis, il a (vaincu) la discrimination raciale.» Le mouvement, promet-il, devrait aller en s’accroissant et rassure les plus sceptiques sur la provenance des fonds qui financent son projet : ils seraient privés. En 2005, Barack Obama avait conditionné l’annulation de la dette du Nigeria à son intervention dans l’arrestation de Charles Taylor, l’ancien dictateur libérien qui avait alors trouvé refuge dans ce pays.
Plus inattendue est la ferveur que Barack Obama suscite dans la ville japonaise d’Obama, petit port de pêche de 32 000 âmes. Situé à 400 km de Tokyo, « la petite plage » (signification de Obama) espère bénéficier de la notoriété qu’induirait la victoire potentielle du sénateur noir de l’Illinois. Mais pour le maire de la ville, Toshio Murakami, ce n’est pas qu’une simple opération de communication pour attirer les touristes. Son soutien est également motivé par des convictions politiques. Dans un article publié dans l’édition Internet du 23 février du Japan Times, signé Pio D’Emilia, il estime que Barack Obama « poursuivra le dialogue et les pourparlers de paix avec la Corée du Nord », qui menace toute la région avec l’arme nucléaire. Une question sur laquelle les Japonais, qui l’ont bannie, sont très sensibles depuis les bombardements américains de Nagasaki et d’Hiroshima durant la Seconde Guerre Mondiale. En réponse au deux courriers et aux cadeaux qui lui ont été faits en 2007 par la localité nippone et son maire, le candidat démocrate a répondu en début d’année qu’il était touché « par (ce) geste amical», tout en soulignant qu’ils partageaient «plus qu’un nom», à savoir « une planète et des responsabilités communes». En somme, des valeurs universelles que le métissage de Barack Obama incarne parfaitement.