Mutuelle d’un genre nouveau, « Profit health » fonctionne grâce à un système de parrainage où les migrants couvrent, depuis la Belgique, l’accès aux soins médicaux de leurs proches restés en RDC. Fruit de la collaboration entre le réseau Africa Synergies International, l’organisation Assistance Sanitaire Internationale, l’organisme pharmaceutique Orbi Pharma et la société de transfert de fonds, Moneys/Trans, cette initiative a pour but de constituer une chaîne de solidarité permettant l’accès aux soins médicaux aux personnes à très faibles revenus. Un projet pilote qui est amené à faire tâche d’huile.
Par Vitraulle Mboungou
Les Kinois ont enfin leur mutuelle de santé. Trois quarts de Congolais de la République démocratique du Congo n’ont pas accès aux soins de santé. Conscient de ce fait alarmant, le réseau panafricain de business angels, Africa Synergies International (ASI), fondé en 2001 à Bruxelles (Belgique), a décidé de créer une couverture maladie universelle : « Profit Health ». Ce projet pilote, lancé il y a un an, a été imaginé par le Fond Médical de Coordination (Fomeco), structure appartenant à l’ASI. En phase d’expérimentation sur l’axe Belgique-RDC depuis un mois, il permet aux personnes à bas revenus vivant à Kinshasa et ayant des proches en Belgique, d’être soignées gratuitement dans des centres hospitaliers déterminés, et de recevoir les médicaments dont elles ont besoin.
Trois formules différentes
Avec « Profit health », le réseau ASI souhaite résoudre le problème d’accès aux soins en RDC « de manière durable et non sporadique », explique Jean Baptiste Bokoto, le président du Réseau Africa Synergies International. Ce programme propose trois différentes formules : « l’abonnement », où le client souscrit un forfait de 20€ par mois et par personne ; la « provision santé », qui est un pré-payement des soins et enfin le « transfert occasionnel ». Pour ces deux dernières formules, le prix à payer est laissé au soin du client. Une fois que le client a choisi une de ces formules, il lui convient de sélectionner l’hôpital le plus proche géographiquement parmi les cinq retenus par l’ASI dans la capitale congolaise. Pour ces hôpitaux, choisis pour la qualité de leurs soins et leur situation géographique, ce programme est profitable aux deux parties. Comme l’explique le docteur Ilanga, directeur du Centre hospitalier Minibal, et de Fomenco à Kinshasa et représentant de « Profit health » dans le pays : « la diaspora nous aide à acquérir du matériel de santé neuf qui nous permet d’assurer de meilleurs soins aux Kinois. C’est donc une collaboration en deux volet que nous avons établie ».
Le réseau travaille également avec la société de transfert de fonds Money/Trans, avec laquelle il a passé des accords de partenariat, matérialisés par la création d’un couloir humanitaire pour le transfert d’argent à prix réduit et à finalité médicale. Soit un taux de 2€ par transfert au lieu de 5€. La fourniture de médicaments est assurée par Orbi Pharma, organisme pharmaceutique basé en Belgique et spécialisé dans la vente de médicaments à très bas prix, tandis que l’Organisation Assistance Sanitaire Internationale s’occupe du transfert des malades graves vers la Belgique, à des tarifs préférentiels. Plus de 200 personnes de la communauté congolaise de Belgique se sont d’ores et déjà affiliées à « Profit health », qui couvre essentiellement les soins d’urgence et infirmiers ainsi que les soins pédiatriques.
Des transferts déductibles des impôts
« Peu de gens savent que le droit fiscal belge fait que lorsque vous transférez de l’argent à l’étranger au titre de ‘provision alimentaire’ pour votre famille directe restée au pays, les sommes envoyées sont déductibles des impôts, explique Jean Baptiste Bokoto. Grâce au reçu de votre transaction et au contrat signé dans le cadre de Profit health vous pouvez finalement aider vos proches sans dépenser quoi que ce soit.
Le réseau ASI a l’ambition d’étendre cette expérience à d’autres régions congolaises et à d’autres pays africains. Séduit par « Profit health », le reste de la population réclame lui aussi un tel système. Pour ce faire, il est prévu d’ouvrir une antenne de soins intensifs pouvant accueillir les cas les plus graves au Centre Minibal à Kinshasa ; et de créer une pharmacie mutualiste permettant de fournir directement les médicaments aux malades sur place. Avec Orbi Pharma, comme l’explique Jean Baptiste Bokoto, « les médicaments sont malheureusement reçus au compte goutte ». Il y a manifestement une demande de plus en plus croissante en faveur de cette initiative, mais le projet d’élargissement du système sur tout le pays et sur le continent, est pour l’instant en suspens, par manque de partenaires techniques et financiers. L’ASI compte toutefois bien relever le défi pour les populations africaines à bas revenus. S’il est encore un peu trop tôt pour faire un bilan de l’expérience, il convient tout de même de saluer d’ores et déjà cette initiative solidaire et réfléchie.
Réseau Synergies vzw
Prince Royal, 66, 1050 Bruxelles