Procès Sankara : accusé d’actes de tortures, Jean-Pierre Palm nie en bloc


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Thomas Sankara (18 nov 21)
Thomas Sankara

Basile Guissou, ancien ministre sous la révolution, a été auditionné, ce mercredi 17 novembre, dans le cadre du procès de l’assassinat de l’ancien Président du Burkina Faso, Thomas Sankara. Il déclare avoir vu venir les événements du 15 octobre 1987.

Le professeur Basile Guissou, ancien ministre de Thomas Sankara –il a été successivement ministre de l’Information et de la Culture, ministre des Affaires extérieures et ministre de l’Environnement dans le gouvernement du Conseil national de la révolution (CNR)– était à la barre, ce mercredi 17 novembre, pour apporter son témoignage. D’abord, pour lui, les événements du 15 octobre étaient prévisibles. C’est pourquoi, selon sa déposition, il était allé voir le Président Sankara avant le mois d’octobre 1987 pour lui dire que s’il ne faisait rien pour baisser la tension perceptible au sein du CNR, il allait démissionner du gouvernement. À ces propos, le Président du Faso lui aurait répondu : « Si toi tu as encore le choix, moi non ».

Deuxième fait majeur rapporté par Basile Guissou. 7 octobre 1987. Thomas Sankara en personne lui rend une visite inopinée à son domicile, à 22 h. Les deux hommes discutent de plusieurs sujets y compris de la tension qui régnait entre les leaders de la révolution. Une nouvelle fois, Basile Guissou fait une proposition à Thomas Sankara : aller discuter à cœur ouvert avec Blaise Compaoré. Le capitaine s’est contenté de dire que c’était trop tard. Huit jours plus tard, ce qui devait arriver, arriva. À la barre, Basile Guissou est également revenu sur ses déboires avec la gendarmerie dirigée par Jean-Pierre Palm.

L’homme rapporte avoir été traqué, de jour comme de nuit, par la gendarmerie, après la mort de Thomas Sankara. « J’ai été frappé, torturé cadeau, pour parler comme les Ivoiriens. Arrêté en décembre 1987, c’est en mars 1988 que j’ai été libéré », confie le témoin. À la question de savoir celui qui dirigeait la gendarmerie à l’époque, Basile Guissou répond que c’est bien Jean-Pierre Palm qui, précise-t-il, supervisait personnellement les séances de tortures. « Il venait, cigarette au bec, et il disait à ses éléments de frapper plus fort pour qu’on crie. Il est allé jusqu’à convoquer mon épouse qui venait d’accoucher, il y avait à peine deux mois, disant que c’était elle qui mobilisait les épouses des détenus pour parler à la presse », déclare l’ancien ministre.

Même après sa libération, les persécutions n’ont tout de même pas cessé. Il rapporte par exemple un épisode où il a été interpellé par des policiers alors qu’il rentrait du service : « Un soir, je revenais du service. J’ai été accosté par des policiers qui m’ont amené au niveau des rails pour me torturer et me raser la tête avec des bouteilles jusqu’à ce que je me suis évanoui ». Face à toutes ces révélations qui l’accablaient, l’accusé Jean-Pierre Palm a été invité à la barre pour une confrontation avec le témoin. Comme il l’a toujours fait depuis le début, l’ancien patron de la gendarmerie a tout nié.

« Je n’ai jamais torturé qui que ce soit ni assisté à quoi que ce soit. Si on m’amène la preuve que moi, Jean-Pierre Palm, j’ai torturé quelqu’un, je me soumets à la loi. Je ne suis pas une poubelle, peut-être que j’ai fait des choses qui ne sont pas bien, mais je n’ai jamais torturé quelqu’un. Ce sont mes grands frères, c’est moi qui leur achetais la cigarette et je partais causer avec eux les soirs », clame-t-il.

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Par Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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