Procès Ousmane Sonko : le Sénégal dans l’attente d’un verdict qui pourrait « enflammer » le pays


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Manifestations Sénégal
Manifestations Sénégal

Les Sénégalais ont les yeux rivés sur ce jeudi, 1er juin 2023. Et c’est peu dire. Le très médiatique procès du principal opposant, Ousmane Sonko, dans l’affaire de viols présumés sur l’ancienne masseuse, Adji Sarr, doit connaître son dénouement, ce jeudi.

Ousmane Sonko sera fixé sur son sort, ce jeudi. Un verdict qui risque d’être lourd de conséquences pour la démocratie sénégalaise. Dans cette affaire, le procureur de la République a requis 10 ans de prison contre celui qui se positionne comme un très sérieux candidat pour le scrutin de février 2024.

Une affaire qui déchaîne les passions

Depuis deux ans, le Sénégal vibre au rythme de cette affaire qui a pris les allures d’un véritable feuilleton politico-judiciaire et qui a déjà endeuillé, plusieurs fois, le pays. Au moins une vingtaine de civils ont perdu la vie dans ces tensions, depuis 2021. Les partisans d’Ousmane Sonko n’hésitent pas à braver la rue pour défendre la cause de leur leader. Ce dernier n’a jamais cessé d’appeler la jeunesse à la résistance. Vendredi dernier, l’opposant a démarré une marche de Ziguinchor à Dakar, dénommée « caravane de la liberté ». Son objectif était de marcher sur la capitale pour le « combat final » contre Macky Sall. « Soit le Président Macky Sall recule, soit on lui fera face (…) Il faut qu’on termine en beauté », avait affirmé le maire de Ziguinchor.

Ousmane Sonko placé en résidence surveillée

Mais, les éléments de la gendarmerie interrompront sa marche, dimanche. Intercepté, Ousmane Sonko est conduit sous escorte à son domicile dakarois, à la Cité Keur Gorgui. De fait, l’opposant est placé en résidence surveillée. Les violentes manifestations de ses partisans dans le périmètre de la résidence ne feront pas bouger les forces de l’ordre qui surveillent la maison. Aux jets de pierres et autres, les forces de sécurité réagissent par l’usage abondant de gaz lacrymogènes. Les dénonciations faites par le leader du Pastef sur les réseaux sociaux pour protester contre ce qu’il appelle une séquestration ne changeront rien à la présence des hommes en uniforme autour de sa maison.

Même ses avocats ont été empêchés, mardi, de le rencontrer à son domicile par les éléments des forces de sécurité. Ces derniers n’ont pas hésité à faire usage de gaz lacrymogènes. « Ce n’est pas normal, nous sommes dans un État de droit. Ils n’ont pas le droit de nous gazer. Ce qui se passe dans ce pays est inadmissible », fait remarquer maître El Hadj Badara Ndiaye, un des avocats de l’opposant. « Ousmane Sonko est en prison chez lui. Il est en cellule. Il ne peut pas sortir de chez lui. Personne ne peut avoir accès à lui. C’est grave », renchérit son collègue, maître Khoureychi Bâ.

La justice mettra-t-elle le feu aux poudres ?

Dans ces conditions, la tension est à son point culminant. Et une condamnation d’Ousmane Sonko qui remettrait en cause son éligibilité risque d’être une source de violentes manifestations. Peut-être la goutte d’eau qui ferait déborder le vase. Le pire est à craindre. Surtout que Macky Sall n’entend pas laisser les actes de violence impunis.

À l’occasion du dialogue national qu’il a inauguré, ce mercredi, le Président sénégalais a utilisé le langage de la fermeté. Pour Macky Sall, « l’État est et restera debout pour protéger la Nation, la République et les institutions ». Et de poursuivre : « Chaque violence physique, chaque violence verbale, chaque mot de haine, chaque bien privé ou public saccagé et, au-dessus de tout, chaque Sénégalais tué constitue une blessure profonde à notre pays ». Boycotté par une frange de l’opposition sénégalaise, le dialogue censé faire baisser la tension semble mal parti.

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Par Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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