L’organisation de l’élection présidentielle pour une première passation pacifique de pouvoir entre deux Présidents élus au Niger semble tourner court. La proclamation des résultats provisoires par la CENI a provoqué une vague de violence dans plusieurs villes du pays. La fête qui aurait pu être espérée n’a pas eu lieu.
Avec sa première élection devant déboucher sur une première passation pacifique du pouvoir entre deux Présidents démocratiquement élus, le Niger de Mahamadou Issoufou était parti pour être félicité. En effet, dans une sous-région ouest africaine où la course au troisième mandat est devenue la norme, le Président nigérien a décidé de ramer à contre-courant, de respecter la Constitution de son pays qui limite à deux le nombre de mandats à la tête de l’État, et de réaliser ce qu’aucun de ses prédécesseurs n’a réussi à faire depuis l’accession du Niger à l’indépendance.
Un scrutin qui s’est déroulé dans « des conditions satisfaisantes »
Le second tour de l’élection présidentielle, qui a opposé le candidat du parti au pouvoir, Mohamed Bazoum, à l’ancien Président Mahamane Ousmane, s’est globalement bien déroulé le dimanche 21 février 2021. A part quelques irrégularités qui ne sont pas de nature à remettre en cause la validité du scrutin, le principal événement déplorable a été la mort de sept agents de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) dont le véhicule a sauté sur une mine à Waraou, localité située à une centaine de kilomètres de Niamey.
Forts de ces constats, les observateurs de la Communauté des États sahélo-sahariens (CEN-SAD) ont organisé le lundi, soit au lendemain du scrutin, et à la veille de la proclamation des résultats provisoires, une conférence de presse au cours de laquelle ils ont « exhorté tous les candidats en lice à respecter les résultats issus des urnes et à recourir aux procédures et aux voies légales pour le règlement de tout contentieux », car selon eux, le scrutin s’est déroulé dans « des conditions satisfaisantes ».
Contestation, scènes de violence et mort d’hommes
La proclamation, le mardi 23 février, des résultats provisoires qui donnent pour vainqueur Mohamed Bazoum avec 55,7% des suffrages, entraîne une contestation de l’opposition qui dénonce un hold-up électoral. Des scènes de violences sont enregistrées ça et là dans le pays : commerces saccagés, stations-services vandalisés, affrontements entre manifestants et forces de l’ordre, etc.. Ce jeudi, les manifestants se sont attaqués au domicile du correspondant de RFI à Niamey, Moussa Kaka, qu’ils ont saccagé et incendié.
Depuis le début des manifestations, au moins deux morts sont déplorés et 468 personnes ont été arrêtées.
Face à cette flambée de violences, l’ONU et la CEDEAO ont sorti, ce jeudi, un communiqué conjoint dans lequel elles ont formellement condamnées ces actes de violence. « La CEDEAO et les Nations Unies condamnent fermement les actes de violences survenus suite à la proclamation des résultats provisoires et appellent toutes les parties prenantes à la retenue », peut-on lire dans ce communiqué.
Que veulent les Nigériens ?
Ces violences post-électorales observées viennent ternir ce qui était censé être un franc succès, un processus de transition pacifique réussie. Il devient alors urgent de s’interroger sur les motivations réelles des Nigériens qui s’adonnent à ces actes de vandalisme n’honorant guère un pays qui n’est qu’à sa première tentative de passation pacifique de pouvoir entre deux Présidents depuis son indépendance en 1960. Que veulent ces Nigériens qui allument des foyers de violence dans leur pays ?
Il est encore temps pour l’opposition de se ressaisir, pour Mahamane Ousmane, qui traîne derrière lui une réputation de sage, d’appeler les manifestants au calme afin que le Niger gagne, surtout que Mohamed Bazoum a la main tendue.