Présidentielle 2025 au Gabon : victoire écrasante d’Oligui Nguema, contestation feutrée de Bilie-By-Nze


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Brice Oligui Nguema, Président du Gabon

Brice Clotaire Oligui Nguema a officiellement remporté la première élection présidentielle de la transition gabonaise avec un score écrasant de 90,35 %, selon les chiffres provisoires du ministère de l’Intérieur. Mais cette victoire, attendue et massive, est loin de faire l’unanimité.

Le candidat arrivé deuxième au scrutin du samedi, l’ancien Premier ministre Alain-Claude Bilie-By-Nze, avec à peine 3 % des voix, a tenu à faire entendre une voix dissonante, dénonçant une élection « opaque » et un système de fraude « reconstitué », tout en affirmant ne pas vouloir contester les résultats devant la Cour constitutionnelle.

Une victoire annoncée

Depuis le coup d’État du 30 août 2023, qui avait mis fin au régime d’Ali Bongo Ondimba et porté au pouvoir le Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI), dirigé par Brice Clotaire Oligui Nguema, le scrutin du 12 avril 2025 était présenté comme le point de bascule vers une nouvelle République. L’organisation rapide de l’élection et la participation massive ont été saluées par une partie de la population. Pourtant, l’écart de voix entre le général-président et ses adversaires laisse planer un parfum de déséquilibre.

Dès le lendemain de l’annonce des résultats, des scènes de liesse ont éclaté dans plusieurs quartiers de Libreville, mais aussi des interrogations, notamment sur l’ampleur du score accordé au candidat du CTRI, jugé irréaliste par certains observateurs.

Le refus d’un recours

Dans un discours mesuré mais incisif, Alain-Claude Bilie-By-Nze a reconnu la victoire du chef de l’État, tout en marquant clairement sa défiance à l’égard du processus électoral. « Bonne chance à lui ! », a-t-il déclaré, insistant pour dire qu’il ne s’agissait nullement de félicitations. Selon lui, le scrutin a été entaché de nombreuses irrégularités, avec des résultats « à la tête du client » et une machine de fraude qu’il juge identique à celle de l’ancien régime.

Ancien Premier ministre d’Ali Bongo, Alain-Claude Bilie-By-Nze semble désormais vouloir prendre ses distances avec son passé politique. « J’ai tourné la page », affirme-t-il, se présentant comme la première figure de l’opposition au nouveau pouvoir, et dénonçant la collusion entre l’ancien Parti démocratique gabonais (PDG) et le CTRI.

Il refuse cependant de déposer un recours devant la Cour constitutionnelle, qu’il estime inféodée au pouvoir exécutif : « Je ne perdrai pas mon temps à saisir la Cour constitutionnelle tenue par un frère du Président », a-t-il lancé dans une formule cinglante, en référence au président de cette institution, Michel Oligui Nguema, frère du Président nouvellement élu.

Les chantiers d’un pouvoir consolidé

De son côté, Brice Clotaire Oligui Nguema a préféré mettre en avant la légitimité populaire de son mandat. « Les Gabonais attendent beaucoup de nous », a-t-il déclaré, promettant de transformer rapidement l’appareil institutionnel : plus de 1 000 textes règlementaires devraient être pris dans l’année pour mettre en œuvre les fondements de la nouvelle Ve République gabonaise.

Le Président élu a rappelé que la victoire ne devait pas conduire à l’immobilisme : « La victoire, c’est le travail qui continue », a-t-il martelé à ses collaborateurs, ce lundi, après la montée des couleurs. Le défi est immense : apaiser les tensions politiques, restaurer la confiance dans les institutions, lutter contre la pauvreté, et organiser les futures élections législatives, encore sans date précise.

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Par Serge Ouitona, historien, journaliste et spécialiste des questions socio-politiques et économiques en Afrique subsaharienne.
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