La sensibilisation contre le sida semble désormais fonctionner au Kenya, au point que le pays se retrouve confronté à une pénurie de préservatifs sans précédent. Les pouvoirs publics font appel à l’aide internationale pour éviter une crise sanitaire majeure et les États-Unis ont déjà promis un plan d’urgence de 45 millions de contraceptifs.
La pénurie qui touche le Kenya est incomparable avec celles que vivent actuellement d’autres pays d’Afrique. Il ne s’agit pas d’une manque d’eau comme en République Démocratique du Congo, ou bien d’une disette alimentaire comme c’est actuellement le cas en Somalie en raison d’une sécheresse importante. Cela ne concerne pas non plus une insuffisance électrique, comme au Sénégal. Non, le Kenya est touché par une crise bien plus … prosaïque : une pénurie de préservatifs.
Catastrophe nationale
L’information a été annoncée très officiellement mercredi par Shahnaaz Sharif, le directeur de la Santé Publique kényane, lors d’une conférence de presse. Et si la pénurie est prise avec autant de sérieux au Kenya, c’est que le pays est particulièrement touché par le virus de sida. L’épidémie est d’ailleurs qualifiée de catastrophe nationale depuis 1999 et toucherait aujourd’hui 13 % de la population, soit 2,2 millions de personnes selon l’ONG Médecins Sans Frontières. Cette impossibilité à mettre la main sur un préservatif au Kenya pourrait donc avoir de graves conséquences sanitaires si les pouvoirs publics ne réagissaient pas rapidement. Les autorités kényanes en appellent ainsi à l’aide internationale pour redresser la barre, et notamment au plan d’urgence présidentiel américain contre le sida (PEPFAR) qui avait déjà fourni 19 millions de préservatifs en janvier, écoulés en un mois et demi. En réponse, les États-Unis ont déjà annoncé une livraison de 45 millions de contraceptifs le 10 avril prochain pour compenser le manque. Le Fonds des Nations-Unis pour la population devrait également en fournir 180 millions.
Sensibilisation
La pénurie pourrait avoir de graves conséquences. Cependant, elle traduit une véritable prise de conscience de l’utilité du contraceptif par la population kényane. « La pénurie de préservatifs vient d’une consommation en forte hausse et des commandes insuffisantes de la part des autorités compétentes …] La demande était de 8 millions par mois, puis elle est passée à 12 millions et elle est maintenant d’environ 20 millions », a comptabilisé Shahnaaz Sharif. En novembre 2009, une large campagne de lutte contre le Sida avait été lancée au Kenya. Le mois suivant, [1,5 million de personnes avait déjà été dépistées sur les 39 millions d’habitants que compte le pays. Il ne faudrait pas que l’approvisionnement prenne trop de temps au risque de voir ces efforts de sensibilisation réduits à zéro. Le ravitaillement des régions isolées pose particulièrement problème. Dans celle d’Isiolo, au Nord du pays, certains iraient jusqu’à « recycler des préservatifs usés ».
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