Derrière l’initiative de l’Union pour la Méditerranée (UPM), il y a des visées qui crèvent les yeux: le pétrole et le gaz de l’Algérie et le pétrole libyen, a souligné le président sénégalais, Abdoulaye Wade, dans une déclaration publiée mercredi à Dakar par le quotidien gouvernemental « le Soleil ».
Dans sa déclaration il indique avoir « essayé d’attirer l’attention de mes collègues sur l’événement majeur que constituait l’UPM et ses conséquences sur l’Afrique au sud du Sahara, l’Afrique noire », lors du 11ème sommet de l’Union africaine (UA) qui s’est déroulé à Charm el-Cheikh, en Egypte, du 30 juin au 1er juillet,
Selon lui, le lancement de l’UPM, lundi à Paris, en France, ne sera pas sans conséquences pour l’Afrique au sud du Sahara, tant au point de vue économique que politique, estimant que c’est la construction de l’avenir de l’Afrique qui sera remodelé.
Il demande aux Africains de tirer, dores et déjà, « les conséquences du départ éventuel de certains Etats de l’Afrique du Nord de l’Union africaine vers l’Europe », l’UMP posant pour lui « le premier acte de ce départ sans préavis ».
Le président sénégalais reste convaincu que des pays de l’Afrique du Nord iront nécessairement vers l’Europe qui les » phagocytera bien un jour ». « Car l’Europe, ajoute-t-il, est condamnée à rajeunir sa population, ce qui ne peut se faire que par l’apport de sang nouveau. Cela explique pourquoi l’Europe est à la recherche d’immigrants assimilables, par l’absorption de 80 millions de citoyens d’Europe centrale ».
Concernant les pays du sud de la Méditerranée, Me Wade a salué le fait que la Libye ait rejeté l’UPM sans ambages. « Pour ce pays, l’africanité ne fait pas de doute, tout au moins avec Kadhafi ».
Pour le Maroc, le président Wade souligne que « ce pays lâché par l’Union africaine dans l’affaire de la virtuelle République arabe sahraouie aurait toutes les raisons d’aller là où elle est au moins désirée, précisant que les chefs d’Etat se rendent compte, de plus en plus, qu’ils ont lâché la proie pour l’ombre, le réel contre le virtuel ».
Mais révèle-t-il, « le Maroc a opté pour le groupe des vingt nations qui à Charm el-Cheikh, ont décidé de constituer immédiatement le premier noyau des Etats unis d’Afrique, en mettant en place, en ce qui les concerne, le gouvernement continental ».
A propos de l’Algérie, « la présence de ses nombreux ressortissants en Europe fait que son choix ne sera pas facile », estime le président Wade.
Quant à la Tunisie, « elle est déjà partie courageusement sans raser les murs », fait observer le président sénégalais qui s’interroge sur la position que l’Egypte va adopter. « Il est inimaginable que la plus ancienne civilisation du monde que nos ancêtres ont créée, parte avec nos pyramides et laisse derrière Abu Simble et la Nubie », affirme- il.
« Moubarak (Hosni, le président égyptien) ne devrait pas avoir d’état d’âme pour rester avec nous (Union africaine) puisqu’il qu’il fait partie du groupe des vingt nations favorables au gouvernement africain », a-t-il ajouté.
Pour le président Wade, les pays d’Afrique du Nord doivent choisir clairement, car ils ne peuvent pas appartenir à deux unions à la fois. Par ailleurs, le président Wade dénonce aussi la coopération à double vitesse, à deux étages même, introduite par les Européens avec le lancement de l’UPM. « L’Europe leur offre des infrastructures, routes et trains régionaux, tout ce que l’Afrique a réclamé en vain depuis longtemps », a-t-il dit.
« Le désert du Sahara deviendra ce que nous étions en train de combattre, un mur séparant politiquement notre continent en deux parties », a ajouté le président Wade.
Face à cette situation, le président sénégalais demande à l’Afrique noire « d’ouvrir les yeux » sur ce qui se passe actuellement autour d’elle, estimant qu’il ne restera aux Africains que les Etats unis d’Afrique ». « Il faut que les chefs d’Etat se départissent de leur micro nationalisme aveugle et regardent loin devant », a-t-il soutenu.
Malgré tout, le président Wade note que « finalement, l’Union pour la Méditerranée pourrait bien, après tout, accélérer le processus de la véritable unité africaine ».