Portrait d’une main tendue : Nina et les Bana Nzila


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Educatrice de jeunes enfants, Nina a vingt cinq ans. En janvier 2012 elle décide, dans une mission de Volontariat de Solidarité Internationale, de rejoindre Pointe Noire et l’Association Espace Enfants (AEE) qui lutte contre l’exclusion sociale des jeunes et des enfants en situation de grande vulnérabilité dans les rues de la ville Océane.

(De notre correspondant)

Nina Fréour est bientôt sur le chemin du retour. Un an déjà ! Un an d’une vie pas comme les autres, d’une vie partagée en pointillé avec les Bana Nzila, ces enfants des rues. A Ponton La Belle, ils sont quelques centaines, abandonnés ou sans famille, ou ayant quitté d’eux même la maison, la rue pour seul domicile. C’est à travers l’enfance en rupture que Nina, ex-bénévole de l’UNICEF à Lille, aura vécu sa première heure Africaine.

« Si plus jeune j’ai voyagé un peu en Europe et dans les DOM-TOM françaises, je n’avais jamais posé les pieds sur le continent Africain. Atterrir et vivre à Pointe Noire a été un véritable choc culturel, au sens positif du terme car je trouve la culture Congolaise d’une grande richesse. Quand bien même j’avais effectué à Lille (France) divers stages en faveur notamment de la Banque Alimentaire ou des demandeurs d’Asile, c’était aussi ma première vraie expérience au service d’une association caritative ».

Cette association, créée en avril 1997 à l’initiative de Micheline Potignon Ngondo et de Pauline et Edmond Mbouyou, intervient tout autant sur la stabilisation de l’enfant en Centre d’hébergement (Abri, protection, soin), que sur son projet de vie (Scolarisation, professionnalisation) sans omettre la documentation sur l’enfant et sa famille ou encore la médiation familiale. Et c’est sans froid aux yeux – mais chaud au cœur – que Nina rejoint AEE, une équipe composée d’un coordonnateur, d’un gestionnaire, d’une gouvernante, d’un chauffeur et de bénévoles. Il y avait bien aussi une assistante sociale dépendant du Ministère des Affaires sociales mais, mutée ailleurs, qui n’a pas été remplacée depuis août.

« Maman Pascaline et les 40 enfants »

« Maman Pascaline, la gouvernante est une femme extraordinaire. Cela fait plus de 10 ans qu’elle travaille et qu’elle vit avec sa famille (3 enfants) à l’AEE. Elle se lève tous les matins à 4h pour préparer le repas des 40 enfants pris en charge par l’Association, pour les préparer pour l’école et elle se couche tard tous les soirs. Pas de jours de congés, pas de vacances. Elle est entièrement dévouée à ces enfants. Je ne sais vraiment pas ce qu’ils feraient sans Maman Pascaline ! » lâche Nina dans un ton admiratif ! Et de poursuivre : « Lorsque je suis arrivée, mon premier constat a été que les enfants, malgré toute cette charge d’amour, avaient peu accès à des activités culturelles ou ludiques. J’ai donc mis en place jeux de sociétés, sorties à l’Institut Français pour la lecture ou l’éveil musical, club vacances Renatura, peinture… L’équipe a pris part à cette dynamique et je suis heureuse de savoir qu’un accord de partenariat vient d’être récemment établi avec l’Institut Français afin que perdure cette initiative. Ainsi les enfants peuvent bénéficier de l’accès gratuit à l’Institut (Bibliothèque, cyber café) et aux activités proposées telles le théâtre, l’éveil musical, les soirées cinéma, l’heure du conte. Ils sont également conviés aux évènements ponctuels comme les concerts ou les pièces de théâtre ».

Si Nina, qui portait ce projet de volontariat Internationnal depuis l’âge de ses 17 ans, a vécu des moments parfois magiques, comme le spectacle de fin d’année de l’atelier « Eveil musical » dirigé par Prince Mpoutou où les enfants se sont révélés être de brillants percussionnistes, elle est passée aussi par des chemins plus sombres. Pour les besoins de l’article elle témoigne ainsi « en privé » de la tragédie du destin d’un jeune enfant , tragédie poignante qu’elle préfère publiquement passer sous silence, en signe profond de respect pour cet enfant là, pour tous les autres enfants ! Les grandes douleurs sont muettes dit le proverbe, alors Nina se tait.

Pour faire avancer les choses, en concertation avec le coordonnateur de l’association, Josué Nlemvo Ntelo, Nina a travaillé plusieurs mois sur la réécriture du projet d’établissement et sur les dossiers de demande de subventions avec l’espoir que cela aboutisse à des soutiens financiers de la part des entreprises et fondations contactées car AAE manque malheureusement cruellement de fonds pour mener à bien ses actions.

 » A la Congolaise »

Pour celle qui aimerait à son retour en France travailler dans une ONG comme La Croix Rouge ou le Secours Catholique, la vie à Ponton La Belle aura été parfois difficile. En témoigne sa maison qui s’est écroulée et qui a failli lui coûter la vie ou encore ce chauffeur ivre d’un Taxi Bleu envoyant Nina et son jakarta dans les décors ! Mais Nina ne veut retenir que le positif. « J’ai appris à vivre différemment, plus simplement et à être plus « vraie » avec les gens, Ce sont là les avantages d’être coopérant : mon salaire ne me permet pas de vivre comme les expatriés. Je vis donc plus ou moins « à la congolaise » : faisant mes courses au grand marché, mangeant chez les mamans, à vivre sans eau chaude (parfois même des jours sans eau), à rouler en jakarta et pour les voyages plus longs, à partir en « occasion ». Forcément l’intégration en est facilitée. Mais la représentation du « riche mundélé » est assez ancrée alors c’est aussi et parfois une difficulté, car les gens ne comprennent pas forcément que je puisse être française et ne pas avoir beaucoup d’argent ! ».

Il est certain que Nina Fréour gardera en elle le visage de chaque enfant, celui de Maman Pascaline comme elle gardera l’image d’un accueil chaleureux et naturel des Ponténégrins qui de son propre aveux aura été une vraie et belle découverte facilitant sa vie au quartier, tout en se désolant d’un Congo qui souffre hélas de son environnement : « Que nous soyons en ville ou à la plage ou même parfois en brousse, les déchets jonchent le sol, bouchent les caniveaux, finissent dans les rivières ou dans la mer. Ca gâche la beauté du pays…C’est comme cette marée noire qui a eu lieu il y a maintenant 2 mois ! Les plages de Pointe-Indienne sont jonchées de pétrole et rien n’est fait pour enlever les plaques » !

Entre enfance et plages à l’abandon La République du Congo se doit de ne pas baisser les bras !

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