Planètes-plaisir pour jeunes lecteurs africains


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Planète Jeunes et Planète Enfants se sont imposés comme les premiers magazines panafricains pour jeune public. Interview de leur rédactrice en chef comblée mais toujours sur la brèche, Kidi Bebey.

Institutrice, éditrice, auteur d’albums et de livres pour enfants, Kidi Bebey est rédactrice en chef de Planète Jeunes depuis 1994 et de Planète Enfants depuis 1998. Aujourd’hui présents sur tout le continent africain, les deux magazines ont réussi à faire entrer la lecture-plaisir dans le quotidien des jeunes Africains.

Afrik : Planète Jeunes et Planète Enfants sont aujourd’hui les premiers magazines panafricains pour les jeunes et les enfants. Vous avez atteint vos objectifs ?

K.B. : Nous avons créé un lectorat. Je rencontre des jeunes qui me disent ne pas lâcher leur mère tant que celle-ci ne leur a pas donné l’argent pour acheter leur Planète. Cela fait très plaisir. Cependant, le meilleur magazine est toujours à venir. C’est une vraie et belle bataille. Il faut imposer l’idée que l’écrit peut faire du bien et pas seulement l’écrit du livre scolaire. Qu’on peut rire avec.

Afrik.com : Comment sont nés les deux magazines, Planète Jeunes et Planète Enfants ?

Kidi Bebey : Ces magazines sont la réponse à la question,  » Que donne-t-on à lire aux jeunes Africains aujourd’hui ? « . Un groupe de personnes travaillant dans l’éducation et l’écrit ont voulu créer un bon magazine adressé aux jeunes, viable économiquement. Or, le papier coûte cher et les jeunes en Afrique sont les derniers qui ont le droit de s’exprimer et à qui l’on s’adresse. C’était une idée folle en somme. Et pour moi, c’était une évidence : je devais participer à un tel projet.

Afrik : Quelle est la ligne éditoriale des magazines ?

Kidi Bebey : Nous ne voulons pas faire des jeunes Africains des cas particuliers. Aucun d’eux ne souhaite être vu comme le pauvre petit Africain qui n’a que le sida, le chômage et les guerres comme avenir. Ils partagent avec les jeunes du monde entier des goûts musicaux, des looks et un lot commun : la puberté. Ils ont envie d’avoir la parole, un sens critique, de parler de leur corps qui change mais aussi de leurs rapports avec leurs parents. Dans Planète Jeunes, nous avons donc une partie consacrée à toutes ces questions et que nous prenons très au sérieux. Il y a aussi de l’information, du sport, des sciences. Un  » cocktail  » qui aborde différents pays et différents sujets. Pour Planète Enfants, la conception éditoriale et l’ouverture sur le monde sont différentes. Pour un enfant, le monde c’est lui, sa famille, son quartier, son école. Il y a plus d’histoires intimes, de bandes-dessinées…

Afrik : Planète Jeunes est-il un magazine  » engagé  » ?

Kidi Bebey : C’est un magazine éducatif mais pas au sens d’un livre scolaire, pédagogique, sage. On entre dans le journal par des thèmes qui sont propres aux jeunes : des vedettes, du sport, de la musique. Mais nous voulons aussi développer le sens critique et civique. C’est pourquoi nous lançons des actions pour informer sur un problème précis. C’est le cas pour notre dossier sur les enfants soldats qui a fait réagir les lecteurs. Nous avons senti un réel désir de mobilisation.

Afrik : D’ailleurs, les lecteurs réagissent beaucoup à votre travail…

Kidi Bebey : Outre les 400 lettres que nous recevons chaque mois, notre boîte électronique est inondée d’emails. La teneur des lettres a énormément évolué. On est passé de missives dithyrambiques à des critiques plus précises sur le contenu, des confidences, des suggestions, des points de vue sur l’actualité, l’évolution de la société, le futur.

Afrik : Comment les magazines sont-ils diffusés ?

K.B. : La formule de l’abonnement est réservé à la France car on n’y trouve pas les magazines en kiosque. En Afrique, la vente se fait au numéro. Beaucoup achètent le magazine à deux ou trois. Nous avons un taux de circulation exceptionnel : environ 17 lecteurs par numéro. L’abonnement est un acte d’achat qui n’est pas dans les habitudes culturelles africaines. Pour s’abonner, il faut posséder l’argent pour ça et, surtout, avoir confiance en l’avenir.

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