Née Sylvia Brigitte Opitz, May Ayim est une écrivaine, poète et militante afro-féministe allemande née le 3 mai 1960 à Hambourg dont l’œuvre mérite d’être plus reconnue pour avoir ouvert la voie à une plus grande réflexion sur les questions identitaires des Afro-descendants en Allemagne.
Par Zina Eberlein
Par son travail et ses livres tel que « Farbe Bekennen » (Reconnaître les couleurs) qui présente des femmes noires et allemandes issues de différentes générations. Cet ouvrage ainsi que d’autres écrits de l’auteure, mettent en avant l’Histoire noire dans une Allemagne qui ignore très souvent son passé colonial, tout en offrant aux afro-descendants la possibilité de se reconnaître dans une œuvre au sein du paysage littéraire majoritairement blanc du pays.
Diplômée en pédagogie et s’étant par la suite formée à l’orthophonie, May Ayim utilise les mots pour porter un regard critique sur la société dans laquelle elle a grandi et souffert de son apparente différence. Enfant d’une mère allemande et d’un père ghanéen, Sylvia Opitz est adoptée à l’âge de 18 mois et élevée au cœur d’une fratrie blanche. Etant l’unique femme de couleur dans son entourage, son école et dans un pays encore très marqué par les répercussions de l’idéologie nazie, l’écrivaine a dû faire face à toutes formes de racisme et d’un sentiment de solitude important.
En effet, pendant longtemps elle se sentait seule face à ce vécu quotidien et violent soulevant de nombreuses questions identitaires et étant à l’origine de son voyage au Ghana où elle y rencontra la famille de son père. Dans les années 80, May Ayim emménage à Berlin et fait connaissance avec d’autres femmes noires engagées dont la poète afro-américaine Audre Lorde dont la rencontre signe la naissance d’une amitié fructueuse basée sur un échange intellectuel et culturel. Cette relation amena May à utiliser le terme « Afro-deutsch » (afro-allemand) pour la première fois, analogie du concept d’afro-américain.
A ce jour, May Ayim est reconnue comme une des pionnières du mouvement afro-allemand et de la lutte contre le racisme. Instigatrice d’une prise de conscience et critiquant une dormante hypocrisie au sein d’une Allemagne prônant la tolérance tout en fermant les yeux sur les actes racistes du quotidien. Le poème « grenzenlos und unverschämt » (sans frontières et effrontée) adresse justement cette thématique tout en mettant en avant l’auto-détermination et la liberté d’être pleinement soi dans toute sa diversité.
Le 9 août 1996, May Ayim se donne la mort en se jetant du 14e étage d’un immeuble à l’âge de 36 ans. En 2010, la Gröbenufer, une rive de la Spree à Berlin Est, est renommée en son honneur : May-Ayim-Ufer.